RANDRIANARIVONY Jeannot1,2,3, RANIVOHARILANTO Eva 1,4 , RAZANAMIHAJA Noëline
1 Laboratoire d’Epidémiologie et Biostatistique en Santé de Populations (LabEBSP) 2 Ecole doctorale Nutrition-Environnement Santé (EDNES), Université de Mahajanga 3 IOSTM, Université de Mahajanga 4 Ministère de la Santé, Madagascar
Résumé : Des questionnaires d’évaluation de la qualité d vie lié à la santé orale ont été développés pour les enfants âgés de moins de 6 ans ainsi que de leurs parents respectifs. Ces dernières décennies, des chercheurs commençaient à s’intéresser sur les perceptions des enfants de moins de 5ans par le développement de nouveaux outils de mesure de qualité de vie liée à la santé orale de plus jeunes enfants tel que le SOHO-5. Cette étude était menée pour estimer la fiabilité après l’adaptation du questionnaire SOHO-5 en langue malagasy. Méthode : l’adaptation transculturelle était menée sur des enfants âgés de moins de 5ans et leurs parents. La fiabilité et validité du questionnaire étaient testées sur 150 enfants, qui avaient bénéficié d‘examen dentaire pour mesurer la prévalence de caries dentaires. Résultats : Le coefficient alpha de Cronbach était de 0,86 pour SOHO-5 enfants et de 0,88 pour les parents. Le coefficient de corrélation intra-classe était de 0,81pour les enfants et de 0,94 pour les parents. Conclusion : cette première version du questionnaire SOHO-5 malagasy est un outil de mesure fiable de qualité de vie liée à la santé orale des enfants malagasy de 5 ans au plus.
Abstract : Oral health-related quality of life (OHRQoL) questionnaires have been developped to be used on children aged below 6-year old and their parents/caregivers. These last decades, researchers were aware about the children’s aged 5-year old and lesser’s perceptions by the development of new instruments to measure their quality of life-related oral health like SOHO-5. This study was aimed to estimate the reliability of the translated, adaped in malagasy of SOHO-5 scale. Method : the transcultural adaptation was conducted on 150 children aged 5-year old and below Results : Cronbach’s alpha coefficients for internal consistency were 0.89 and 0.86 for child’s self-reports and parental reports, respectively. the intraclass correlation coefficients were 0.81 and 0.94 for the parental reports and child’s self-reports, respectively for test-retest. Conclusion : This study showed this first Malagasy version of SOHO-5 is a reliable and valid OHRQoL measure for 5-year-old Malagasy children.
Comment citer cet article : Randrianarivony J, Ranivoharilanto E, Razanamihaja N. Evaluation de la fiabilité du questionnaire SOHO-5 traduit en langue Malagasy. Revue Sciences Santé 2022 ;
I – INTRODUCTION
Malgré l’amélioration de l’état de santé bucco-dentaire annoncée, les caries dentaires continuent à toucher plus de 60% à 90 des enfants dans le monde. [1] Les caries précoces de la petite enfance constituent de sérieux problèmes de santé publique touchant aussi bien les enfants dans les pays industrialisés et développés que dans les pays en développement. (Livny A) [2] Le problème est d’autant plus sérieux dans les pays à faible et moyen revenu, les caries de la petite enfance sont souvent laissées sans traitement. [3]
Les conséquences peuvent affecter la qualité de vie de l’enfant et de sa famille. (Inglehart MR et al.)[4]
Beaucoup de mesures de qualité de vie liées à la santé orale ont été développées et testées auprès de nombreuses populations dans le monde pour évaluer les impacts de l’état de santé sur la vie de tous les jours. De tous les instruments de mesure de qualité de vie liée à la santé orale (OHRQOL=Oral Health Related Quality of Life), très peu ont été développés pour les enfants âgés de moins de 6ans pourtant leur état de santé est d’autant plus lié à leur propre qualité de vie qu’à celle de son entourage.
Ainsi, des instruments de mesure de la qualité de vie des petits enfants, liée à leur état de santé orale, ont été développés.
Pahel et collaborateurs étaient les premiers à avoir développé un questionnaire de qualité de vie destiné à mesurer les impacts de la santé orale des enfants de moins de 6 ans, le “Early Childhood Oral Health Impact Scale” ou ECOHIS. [5]
Le “Oral Health related Early Childhood Quality of Life” (OH-ECQOL) a été développé pour les petits enfants Indiens par Mathur et al. [6]
La plupart des questionnaires de qualité de vie liée à la santé orale des enfants étaient conçus, le plus souvent, de manière composite avec une partie des items à répondre par les enfants eux-mêmes et une autre partie par leurs parents. C’est le cas des groupes de questionnaires pour les enfants (les “Child Perceptions Questionnaires” ou CPQs) et de questionnaires destinés à mesurer les perceptions des parents (P-CPQ 6-14) et les impacts des problèmes de santé orale des enfants sur la qualité de vie de la famille (FIS). [7-10] Mais ces outils sont tous destinés pour les enfants âgés de plus de 6ans et à leurs parents respectifs. Récemment, des auteurs comme Eiser et al. , Filstrup SL et al., avaient démontré qu’il était possible d’obtenir des informations crédibles en interrogeant des enfants âgés moins de 6ans sur leurs perceptions de la qualité de vie liée à leur état de santé. [11, 12]
Le Dental Discomfort Questionnaire (DDQ) est un questionnaire destiné pour les tous petits enfants âgés de moins de 5 ans, pour évaluer les différences de comportement relatées par les enfants avec ou sans maux de dents et avec ou sans dents cariées.[13]
Préalablement, ce sont les parents qui rapportent leurs perceptions de la qualité de vie des enfants liée à la santé orale des enfants, de crainte de l’immaturité et inconsistance des réponses que peuvent donner ces derniers. Mais le même groupe d’auteurs, dans une autre revue de littérature, ont conclu que des informations fiables et valides peuvent etre obtenues des enfants concernant leur qualité de vie liée à la santé en utilisant des techniques de questionnaire appropriées. [14]
Ainsi, basé sur la preuve que les enfants, entre quatre et six ans, sont capables de reporter de façon fiable leurs perceptions de leur qualité de vie, en 2012, Tsakos et al., au Royaume Uni, ont développé le questionnaire SOHO-5. L’échelle mesure les résultats de santé bucco-dentaire pour les enfants de 5 ans (SOHO-5) et évalue l’état de santé orale liée à la qualité de vie des très jeunes enfants par le biais d’auto-rapport et des rapports des proches parents. [15]
SOHO-5 a déjà été adapté socio-culturellement dans plusieurs pays (Abanto J et al., en 2012 au Brésil [16]; Abanto J et al.,en 2013 au Brésil [17]; Abreu-Placeres N et al., en 2017 en République Dominicaine [18]; Rachmawati YL et al., en 2017 en Indonésie[19]; Asgari I & Kazmi, en 2017 en Iran [20] ; Gao SS et al., en 2020 en Chine [21]; Mishu MP, et al., en 2021 au Bengladesh.[22] )
A notre connaissance, à ce jour, aucune étude n’a examiné la structure psychométrique du questionnaire SOHO-5 à Madagascar. Ainsi, Madagascar ne dispose de questionnaire de qualité de vie liée à la santé orale, destiné pour les enfants de moins de 6ans.
Le but de cette étude était d’évaluer les propriétés psychométriques du questionnaire SOHO-5 version malagasy. Les objectifs spécifiques étaient de: traduire la version originale en anglais du questionnaire SOHO-5 en langue malagasy et d’évaluer la fiabilité et la validité du SOHO-5 version malagasy.
II – MATERIEL ET METHODE
Le SOHO-5 consiste à récolter des informations sur la qualité de vie liée à la santé orale des enfants à travers les parents et les enfants eux-mêmes. SOHO-5 est constitué de deux questionnaires. SOHO-5 enfants et SOHO-5 parents. Les deux parties du questionnaire (SOHO-5e enfant) et (SOHO-5p : parents) possèdent sept items.
La version enfant (SOHO-5e ) s’adresse aux difficultés, à « manger », à « boire », à « parler », à « jouer », à « dormir », à « sourire » (à cause de la douleur) et à sourire (à cause de l’apparence), dues aux problèmes dentaires. Les réponses utilisaient une échelle à trois scores de réponses (1=pas du tout ; 2= un peu ; et 3= beaucoup), en se faisant aider par une échelle faciale. L’examinateur pose les questions aux enfants en absence des parents pour éviter leurs influences sur les réponses des enfants.
La version parent, SOHO-5p est à auto-administrer. Cinq types de réponses sont données en option : (0=pas du tout ; 1=un peu ; 2=modéré ; 3=beaucoup ; 4=énormément et 5=Je Ne Sais Pas (JNSP) mais cette dernière option n’est pas scorée.
Calcul des scores de SOHO-5:
Les scores de SOHO-5 sont calculés en faisant la somme des codes de réponses. Un score élevé de SOHO-5 démontre un degré plus élevé d’impacts de l’état de santé orale sur la qualité des enfants.
Le score total s’étend de 0 à 14 dans la version enfant (SOHO 5e ) et de 0 à 28 dans la version parent (SOHO 5p ). Pour évaluer la validité discriminante des questionnaires la présence de stade de caries non traitées était investie. L’examen clinique était mené par des dentistes calibrés.
Collecte des données : Les enfants étaient interviewés par deux enquêteurs entrainés et expérimentés. L’interview a duré en moyenne 5 à 6 minutes. L’interview consistait également à demander aux enfants leurs expériences de douleur dentaire, leur satisfaction de leurs dents et leurs évaluation propres de leur état dentaire, s’ils ont des trous sur les dents ou pas. Ces questions étaient utilisées pour évaluer la validité de la version malagasy du SOHO-5 enfant.
2. Méthode de traduction et de validation
Pour être applicable dans une autre culture que celle dans laquelle il a été développé, un questionnaire doit d’abord être adapté socio-culturellement à la nouvelle langue d’usage.
Ainsi, pour être utilisés sur une population, dans un autre pays, les instruments de mesure de qualité de vie qui ont été pour une grande majorité développés en langue anglaise, doivent être traduits et validés en langues locales.
Il s’agissait d’une étude transversale comprenant 2 grandes étapes : a) l’étape de traduction et b) l’étape d’évaluation des propriétés psychométriques du questionnaire traduit.
L’étape de traduction : Nous avons adopté la méthode de « Traduction-Contre-traduction » préconisée au niveau international par Guillemin F et al (23). Pour la traduction, la méthode de traduction parallèle en aveugle était appliquée. Deux traducteurs bilingues, parlant parfaitement le malagasy et l’anglais avaient traduit le SOHO-5 de l’anglais en Malagasy.
Ensuite les deux traductions étaient comparées pour identifier les divergences linguistiques et mises en commun pour n’en faire qu’une seule version pré-finale en malagasy. Cette dernière va être ensuite re-traduite en anglais par deux autres traducteurs qui ignoraient complètement l’existence de la version anglaise originale. Les deux re-traductions étaient par la suite comparées entre elles ensuite avec la version originale, pour vérifier la qualité de traduction.
A l’issue de ces différentes étapes, la première version malagasy du SOHO-5, était pré testée auprès de 10 enfants âgés de 4-5ans. Le pré-test consiste à évaluer la lisibilité du questionnaire et de ses échelles ainsi que la compréhension des enfants concernant les différents éléments de ce questionnaire. A l’issu du pré-test, le SOHO-5 version malagasy a subi des modifications mineures. Le nombre de questions répétées ou reformulées en tant que réponses indirectes pour l’estimation quantitative de la compréhension des enfants.
b) Etape d’évaluation des propriétés psychométriques du questionnaire traduit
La fiabilité était évaluée par la cohérence interne du questionnaire. L’évaluation de la cohérence interne était menée en évaluant la corrélation entre les items du SOHO-5 utilisant la valeur du coefficient alpha de Cronbach.
Le test de validité psychométrique de SOHO-5 impliquait l’évaluation de la validité du contenu et de construit. Nous avons également testé la validité du construit à travers les associations entre les scores SOHO-5 et les évaluations globales, à l’aide des coefficients de corrélation de Spearman.
III – RESULTATS
La distribution des réponses des enfants aux items du SOHO-5e en version malagasy est présentée dans le Tableau 1. Les impacts les plus fréquemment rapportés étaient sur la difficulté « à manger » 43,3%, « à dormir » 29,3%, et « boire » 26,0% , « à jouer» 22,7 % suivis par le problème de sourire, à cause de douleur dentaire » 20,0%, « parler » 12,7%, et le problème de « sourire à cause de l’apparence des dents » : 10,0 % .
Items a-t-il déjà été difficile pour toi de
Non, pas du tout N(%)
Un peu N(%)
Beaucoup N(%)
1. manger à cause de tes dents?
60(40,0)
25(16,7)
65(43,3)
2. boire à cause de tes dents?
86(57,3)
25(16,7)
39(26,0)
3. parler à cause de tes dents?
98(65,3)
33(22,0)
19(12,7)
4. jouer à cause de tes dents?
79(52,7)
37(24,7)
34(22,7)
5. de ne pas sourireà cause d’une douleur aux dents?
82(54,7)
38(25,3)
30(20,0)
6. ne pas sourire à cause de l’apparence de tes dents?
92(61,3)
43(28,7)
15(10,0)
7. dormir à cause de tes dents?
69(46,0)
37(24,7)
44(29,3)
Tableau 1: Distribution des réponses des enfants aux items du SOHO-5 en version malagasy
Les valeurs des coefficients alpha de Cronbach du score total du SOHO-5 version malagasy étaient de 0,85 démontrant une excellente fiabilité interne des items de ce questionnaire. (Tableau 2)
Items
alpha de Cronbach
enfant
parent
(1) difficulté de manger à cause des dents
0,75
0,76
(2) difficulté de boire à cause des dents
0,76
0,76
(3) difficulté de parler à cause des dents?
0,76
0,77
(4) difficulté de jouer à cause des dents?
0,75
0,76
(5) ne passourire à cause d’une douleur aux dents
0,75
0,76
(6) ne pas sourire à cause de l’apparence des dents?
0,76
0,76
(7) difficulté de dormir à cause des dents?
0,75
0,75
SOHO score total
0,86
0,88
Tableau 2: Statistiques de fiabilité du score total et des items de la version Malagasy du SOHO -5p
Les coefficients de corrélation de Spearman des items entre eux a démontré que toutes les valeurs des items étaient corrélées positivement et de façon significative. Et les valeurs s’étendaient de 0,26 à 0, 65. (Tableau 3)
Tableau 3 : Analyse de corrélation de Spearman
Difficultés / problèmes
Spearman
1
2
3
4
5
6
7
1.« manger »
1
2.« boire »
,47**
1
3.« parler »
,46**
,59**
1
4.« jouer »
,44**
,26**
,48**
1
5.« sourire /douleur dentaires)
,42**
,29**
,41**
,80**
1
6.«sourire/apparence des dents)
,39**
,50**
,65**
,51**
,49**
1
7.« dormir »
,59**
,36**
,34**
,46**
,49**
,43**
1
Tableau 3 : Analyse de corrélation de Spearman
**p<0,001
DISCUSSION
A notre connaissance celle-ci est la première étude ayant traduit et validé le questionnaire de qualité de vie liée à la santé orale des enfants par les enfants eux-mêmes et leurs parents proches respectifs.
Le but de la présente étude était de valider une version en langue Malagasy du questionnaire SOHO -5 destiné pour mesurer la perception des enfants âgés moins de 6 ans sur leurs qualités de vie liées à la santé orale (OHRQoL).
Les items les plus fréquemment signalés concernaient surtout les impacts sur la fonction de l’enfant à cause de la douleur dentaire. Ces résultats rejoignent les données rapportées par leurs parents respectifs sur le domaine « impacts de l’enfant » du questionnaire ECOHIS malagasy concernant l’effet de la maladie dentaire sur la qualité de vie de leurs enfants. Ces impacts étaient « la difficulté à manger », « trouble du sommeil » et « frustration ».
Cela justifiait le résultat de l’étude antérieure de Eiser C et al., évaluant la perception des parents ou tuteurs et les enfants sur la qualité de vie et stipulant que les enfants sont capables de fournir et de communiquer leurs propres perceptions au sujet de la santé.(25) Cependant, certains auteurs jugent qu’il est important de considérer conjointement les réponses des parents ou des tuteurs avec celles énoncées par les enfants pour plus de fiabilité car parfois ces derniers peuvent ne pas etre en mesure de donner des réponses fiables à l’égard de certains domaines psychosociaux et ont probablement de la difficulté à comprendre les émotions nécessitant un plus grand développement cognitif.
En ce qui concerne l’évaluation psychométrique du SOHO-5 malagasy, la valeur des coefficients alpha Cronbach du SOHO-5 total étaient de 0,85 reflétant une excellente fiabilité interne des items de ce questionnaire par rapport à SOHO-5 version originale où la valeur alpha de Cronbach était de 0,74.
Les coefficients de corrélation de Spearman entre items a montré positivement de façon significative une forte corrélation entre les items des domaines (p= 0,000)
CONCLUSION
La présente étude a démontré que le questionnaire SOHO-5 malagasy a montré une fiabilité et une validité satisfaisantes. Ce questionnaire dans sa version malagasy peut être utilisé sur des enfants d’âge préscolaire.
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Laboratoire d’Epidémiologie et Biostatistique en Santé de Populations (LabEBSP)
Résumé :
Contexte : Les caries dentaires précoces sont souvent non traitées dans beaucoup de pays en développement et impactent sur la qualité de vie liée à la santé orale des jeunes enfants ainsi qu’à celle de leurs familles. Le but de l’étude était de déterminer si le traitement des dents cariées et compliquées chez des jeunes enfants améliorerait leur état nutritionnel et leur qualité de vie liée à la santé orale et celle de leurs parents. Méthode : Une étude longitudinale était menée. Les indices dcao et pufa étaient utilisés lors des examens cliniques pour évaluer les caries dentaires non traitées et l’IMC pour l’état nutritionnel. Les enfants âgés de 3 à 5ans étaient sélectionnés. Leurs parents, au nombre de 150, avaient répondu au questionnaire Early Childhood Oral Health Impact Scale (ECOHIS) version malagasy au début de l’étude et ils ont répondu une deuxième fois au même questionnaire cinq mois après le traitement des dents cariées des enfants. Ce traitement allait de simples détartrage et éducation d’hygiène orale, à des traitements conservateurs ou à l’extraction des dents pufa avec complications infectieuses notables. Les changements de qualité de vie liée à la santé orale des enfants avant et après traitement étaient comparés et la taille d’effet, calculée. Résultats : Les enfants en insuffisance pondérale avaient un indice moyen de dents pufa>1 plus élevé que ceux de poids normal (p<0,001). Globalement, l’indice moyen de d-cao était dominé par le composant d-c. Les scores de ECOHIS avant et après traitement des dents PUFA des enfants ont diminué, démontrant une amélioration de la qualité de vie. Conclusion : il y a une corrélation entre insuffisance pondérale et caries dentaires non traitées. Le traitement des lésions dentaires sévères était associé à une amélioration de leurs impacts sur les jeunes enfants et chez leurs familles.
Mots clés : Caries de la Petite Enfance (CPE), caries non traitées, poids, qualité de vie.
Abstract:
Early dental caries is often untreated in many developing countries and impacts on the oral health-related quality of life of young children and their respective families. The aim of the study was to determine whether treatment of decayed and complicated teeth in young children would improve their nutritional status and oral health-related quality of life and that of their parents. Method: A longitudinal study was conducted. The dcao and PUFA indices were used during clinical examinations to assess untreated dental caries and. Children aged 3 to 5 years were selected. Their parents, 150 in number, completed the ECOHIS Malagasy questionnaire at the beginning of the study and completed the same questionnaire a second time five months after the children’s decayed teeth had been treated. This treatment ranged from simple scaling and oral hygiene education, to conservative treatments or extraction of pufa teeth with significant infectious complications. Changes in the children’s oral health-related quality of life before and after treatment were compared and the effect size was calculated. Results : Underweight children had a higher mean pufa>1 tooth index than normal weight children (p<0.001). Overall, the mean d-cao index was dominated by the d-c component. The ECOHIS scores before and after treatment of their children’s pufa teeth decreased. Conclusion: There is a correlation between underweight and untreated dental caries. Treatment of severe dental lesions was associated with an improvement in their impact on young children or their families.
Key words: Early Childhood Caries (ECC), untreated caries, weight, and quality of life.
INTRODUCTION
L’American Academy of Pediatric Dentistry (AAPD) définit la carie de la petite enfance (CPE) ou Early Childhood Caries (ECC) pour les anglophones, comme la présence d’une ou de plusieurs surfaces dentaires cariées (cavitaires ou non), absentes (en raison de caries) ou obturées sur une dent primaire chez un enfant d’âge préscolaire entre la naissance et 71 mois. [1]. Elle est fortement influencée, comme toute carie dentaire, par des facteurs biomédicaux [alimentation riches en sucre, manque d’hygiène bucco-dentaire et manque d’exposition aux fluorures et certains déterminants sociaux de la santé [2]. La carie de la petite enfance (CPE) ou Early Childhood Caries (ECC) pour les anglophones, est une forme virulente de carie dentaire à progression très rapide pouvant aboutir à une destruction de la dentition primaire des bébés et des enfants en âge préscolaire, avec de lourdes conséquences locales et générales [3]. La CPE est un problème de santé publique qui affecte les enfants d’âge préscolaire dans le monde mais plus fortement dans les pays en développement, à faible revenu. La CPE peut même prendre l’allure d’une épidémie dans les pays en développement et où le plus souvent la majorité des lésions carieuses sont laissées non traitées. La CPE est une maladie pandémique dans le monde entier. La prévalence chez les enfants âgés de 3 à 5 ans varie selon les continents et les pays. Les dents cariées sont souvent laissées sans traitement et se détériorent jusqu’à devenir douloureux. Cette situation a un impact important sur la santé bucco-dentaire, la santé générale, la croissance et le développement, ainsi que sur la qualité de vie des enfants.
Sans traitement, la CPE peut avoir des impacts négatifs sur la santé générale de l’enfant ou, à long terme, représenter un facteur de risque majeur de carie pour la dentition permanente. De nombreuses études épidémiologiques ont rapporté que la CPE peut également d’une part affecter le poids, la croissance, et le développement de l’enfant et d’autre part, ses conséquences peuvent affecter le bien-être de l’enfant et celle familiale en terme de qualité de vie [5 ,6]. La qualité de vie liée à la santé est un phénomène subjectif qui peut être influencé par les expériences, croyances et attentes personnelles. Le terme de qualité de vie liée à la santé orale est communément utilisé pour décrire les impacts de la maladie bucco-dentaire et de leurs traitements sur la vie de tous les jours.
La relation entre carie dentaire et poids de l’enfant, mesuré par l’Indice de Masse corporelle (IMC), a été étudiée récemment dans une synthèse de littérature et les résultats étaient inconsistants. Les résultats d’une revue systématique de littérature ont montré une tendance à une association positive entre carie dentaire et surpoids, conséquence d’une consommation élevée d’aliments riches en carbohydrates, et cette situation était souvent rapportée dans les pays industrialisés. Tandis que dans plusieurs pays en développement, la liaison se faisait plutôt entre carie dentaire et faible poids, dû à la malnutrition résultant de l’incapacité de l’enfant à s’alimenter comme il faut à cause des lésions carieuses [7]. Ainsi, les enfants qui avaient des lésions carieuses sur une ou plusieurs dents étaient susceptibles d’être en sous pondéral. En effet, Mushi et al., ont rapporté une association entre caries non traitées et sous poids chez les enfants, notamment dans les pays en développement [8]. Et, les résultats de l’étude de Sheiham et al., ont rejoint cette conclusion également en rapportant que les caries non traitées peuvent affecter la capacité des enfants à s’alimenter convenablement, et les complications infectieuses qui en découlent peuvent avoir des impacts sur le développement de l’enfant, sur sa taille, et son poids [9]. Les complications des caries non traitées peuvent également affecter la qualité de vie de l’enfant ainsi que celle de sa famille [10].
De nombreux instruments de mesure de la qualité de vie liée à la santé orale (Oral Health Related Quality of Life ou OHRQoL) ont été développés pour estimer l’impact des maladies orales ainsi que de leurs traitements sur la qualité de vie mais la plupart étaient destinés aux adultes. Des questionnaires ont été développés par la suite pour mesurer les impacts des maladies orales sur qualité de vie de tous les jours des enfants et adolescents parmi lesquels figurent le Child-Oral Impact on Daily Performance (C-OIDP) [11] ; les Child Perceptions Questionnaires (CPQ 8-10 ; CPQ11-14) destinés aux enfants âgés respectivement de 8 à 10 ans et de 11 à 14ans [12-13]. Le Paediatric Oral Health-Related Quality of Life (POQL) [14], le Early Chilhood Impact Profile ou ECOHIS [15], et le Scale of Oral Health Outcomes for 5-year-old children (SOHO-5) [16] sont destinés aux enfants d’âge préscolaire et à leurs parents.
La question posée dans cette étude était : « Quelles sont les implications du traitement des caries dentaires précoces compliquées, sur la qualité de vie de l’enfant ainsi que de leur famille ? Et pour y répondre le questionnaire ECOHIS était choisi.
A Madagascar, aucune étude sur les impacts des traitements des caries de la petite enfance sur la qualité de vie n’a été menée jusqu’ici.
La présente étude avait pour objectifs d’évaluer si le traitement des dents cariées compliquées chez des jeunes enfants améliorerait leur état nutritionnel et leur qualité de vie liée à la santé orale et celle de leurs parents.
Plus spécifiquement, l’étude consistait à :
décrire l’état de santé dentaire et anthropologique des enfants d’âge préscolaire avant tout traitement,
décrire l’association entre état dentaire, IMC et qualité de vie.
déterminer si le traitement des lésions carieuses va améliorer l’état nutritionnel et la qualité de vie liée à la santé orale des enfants d’âge préscolaire et de leurs familles. Par la même occasion, la réactivité de l’ECOHIS version malagasy, va pouvoir être évaluée de même que sa capacité de détecter les changements au fil du temps dans une étude clinique.
METHODOLOGIE
Notre étude était menée dans un centre d’éducation et de traitement de la malnutrition des enfants d’âge préscolaire de la ville de Mahajanga. Ce centre est doté d’une cantine scolaire qui préparait quotidiennement du goûter à base de lait sans sucre et de repas de midi aux enfants qui y sont inscrits sous la surveillance des éducateurs.
Population d’étude et échantillonnage
La population ciblée par l’étude était constituée de 238 enfants inscrits à ce centre et leurs parents respectifs. Étaient inclus dans notre étude les enfants inscrits en section préscolaire, âgés de 3 à 5 ans.
Étaient exclus de l’étude : les enfants qui n’appartenaient pas à ce groupe d’âge ; ceux qui souffraient de maladies chroniques autres que la carie dentaire ou de problèmes de santé complexes au moment de notre enquête et les enfants dont leurs parents n’ont pas signé la lettre de consentement libre et éclairé pour participer à cette étude. L’échantillon final était choisi de façon exhaustive incluant 150 enfants âgés de 3 à 5 ans et leurs parents respectifs.
Type d’étude : Il s’agissait d’une étude de cohorte prospective portant sur 2 volets : l’évaluation de l’état de santé bucco-dentaire et nutritionnel des enfants en première partie, et l’étude de la qualité de vie de ces enfants Avant et Après l’expérience de soins dentaires, en deuxième volet.
L’intervention consistait à la prise en charge thérapeutique des enfants présentant des complications d’origine infectieuse ou à risque d’en développer. Elle se faisait par avulsion de toutes les dents présentant des complications de carie non traitée source d’infection locale ou générale.
L’indice PUFA/pufa était utilisé pour enregistrer la présence de l’atteinte « pulpaire » visible ; (P), d’ « ulcération »(U) de la muqueuse orale dû à des fragments de racines dentaires, de « fistule »(F) et la présence d’ « abcès »(A) [17]. L’avulsion dentaire était effectuée sous anesthésie locale tout en respectant les protocoles opératoires de l’extraction dentaire chez l’enfant.
L’échantillon était divisé en deux groupes selon le schéma d’étude ci-après :
– les enfants à pufa>1 constituaient le groupe d’intervention qui allaient bénéficier de traitement des dents pufa et
– les enfants à indice « pufa zéro » formaient le groupe témoin (contrôle) et n’avaient bénéficié d’aucun traitement.
Il n’y avait pas de randomisation, mais les deux chirurgiens dentistes traitants, étaient mis en aveugle. Ils ne connaissaient ni le poids, ni la taille des enfants, ni l’objet de l’étude. Les enfants du groupe d’intervention ont été réexaminés cliniquement 4 mois après l’extraction de leurs dents « pufa » pour évaluer s’il y avait eu un changement de leur état nutritionnel et de leur qualité de vie liée à la santé orale.
Critère de jugement principal : une augmentation du poids de l’enfant (mesuré en kg) et une amélioration de sa qualité de vie avec scores de ECOHIS plus faibles, quatre mois après l’extraction des dents « pufa » qui l’empêchaient de se nourrir convenablement.
Considérations éthiques
L’étude avait obtenu l’aval du comité d’éthique du Ministère de la santé sous la référence N° 34 – MSANP/CE du 17 mars 2015.
Avant de commencer l’étude, les objectifs étaient expliqués aux parents et par la suite le consentement libre, éclairé et signé de chaque parent était demandé en leur lisant systématiquement et intégralement la section consentement du questionnaire.
Matériels d’évaluation de la qualité de vie
Comme les enfants d’âge préscolaire dépendent encore beaucoup de leurs parents, l’interview des parents pour avoir leurs perceptions de l’état de santé orale et impacts sur la santé générale et la qualité de vie des enfants était privilégié. En effet, en raison de l’âge du groupe cible (3-5ans), le questionnaire était rempli par le parent ou par un mandataire parental. Le questionnaire de l’échelle d’évaluation de la qualité de vie liée à la santé orale des enfants (ECOHIS ou« Early Childhood Oral Health Impact Scale ») traduit et validé en langue Malagasy a été utilisé [18]. Il s’agit du premier instrument de mesure de qualité de vie liée à la santé orale des jeunes enfants existant en langue malagasy. ECOHIS est un questionnaire développé à l’origine en langue anglaise aux Etats-Unis pour évaluer l’impact des problèmes bucco-dentaires et de leurs traitements sur la qualité de vie des enfants d’âge préscolaire de 3 à 5ans et sur leur famille respective [16]. La version Malagasy du questionnaire, conforme à l’original, comprend 13 items et deux sections principales : Section Impact enfant ou Child Impact Section (CIS) (9 items) et Section Impact Famille ou Family Impact Section (FIS) (4 items). La Section Impact enfant a quatre domaines: symptôme enfant (1 item), fonction enfant (4 items), psychologie enfant (2 items) et image de soi enfant et interaction sociale (2 items). La Section impact famille comprend deux domaines: détresse parentale (2 items) et fonction famille (2 items). Les options de réponses étaient codées comme suit : jamais=0 ; presque jamais=1; occasionnellement=2 ; souvent=3; très souvent=4 et la réponse « Ne sait pas » étaient proposées dans la version Américaine de l’ECOHIS mais pas dans le cadre de la présente étude. Deux questions étaient rajoutées à la fin du questionnaire ECOHIS pour l’évaluation globale de la perception de l’état de santé générale et de l’état de santé orale de l’enfant par leur parent.
Les scores de ECOHIS étaient calculés an faisant tout simplement la sommes des réponses codées des items de la section impact enfant d’une part et des items de la section impact famille d’autre part, séparément. Les valeurs des scores peuvent s’étendre de 0 à 52 ; et pour le score total de l’échelle ECOHIS (de 0 à 36 pour la Section Impact Enfant et de 0 à 16 pour la Section Impact Famille . Les scores les plus élevés expriment un impact plus élevé et le score le plus faible indique de l’impact moindre. Pour les domaines, les valeurs des scores sont réparties comme suit : de 0 à 4 pour le symptôme enfant ; de 0 à 16 pour la fonctionenfant ; de 0 à 8 pour les deux domaines psychologie et image de soi respectivement. Dans la section Impact famille, les scores pour les deux domaines détresse familiale et fonctionfamiliale, s’étendent de 0 à 8 chacun.
ECOHIS a été choisi car il est destiné à évaluer la qualité de vie liée à la santé orale des enfants et il est pour l’instant le seul questionnaire existant en langue malagasy pour ce groupe d’âge.
Examen clinique
Un examen clinique de l’état de santé bucco-dentaire des enfants était effectué pour distinguer les enfants sans besoin immédiat de soins dentaires à ceux qui en ont besoin car présentant des CPE avec complications pulpaires d’origine infectieuse.
Les examens dentaires étaient effectués par deux chirurgiens-dentistes qualifiés et calibrés (coefficient de corrélation intra examinateur égale à 0,91) sous la lumière scialytique du cabinet dentaire du dispensaire en utilisant le formulaire d’enquête bucco-dentaire et les matériels préconisés par l’OMS [19]. Toutes les mesures de contrôle des infections nécessaires, y compris des gants d’examen et les manchons en plastique à usage unique ont été pris pour prévenir l’infection croisée entre les enfants.
Les indices utilisés:
Les indices d-cao (nombre de dents temporaires cariées, absentes ou obturées) et s-cao (nombre de surfaces des dents temporaires cariées, absentes ou obturées) étaient utilisés pour évaluer le nombre moyen de dents et de surfaces des dents temporaires cariées, absentes et obturées.
La sévérité des complications infectieuses résultant des caries dentaires non traitées était enregistrée en utilisant l’indice pufa. L’indice pufa était enregistré séparément de l’indice dcao. Les lésions des tissus environnant qui ne sont pas liées à la dent comme résultat d’une carie n’étaient pas prises en compte. Seul un score est assigné par dent, et il s’agit du score le plus élevé de l’indice pufa.
Mesures anthropométriques :
Les enfants étaient pesés pieds nus et vêtus légèrement sur un pèse-personne et une toise était utilisée pour la mesure de la taille.L’indice de masse corporelle (IMC) était utilisé et calculé à l’aide de la formule :
Les résultats obtenus ont été reportés sur la courbe de corpulence pour l’âge (référence Française et seuil de l’International Obesity Task Force « IOTF ») [21] et interprétés comme suit :
IMC < 3ème percentile : Insuffisance pondérale
3èmepercentile< IMC <97ème percentile : Poids normal
IMC > 97ème percentile: Surpoids, voire obésité
Analyses statistiques des données
Les données ont été saisies et analysées en utilisant le logiciel SPSS 24 .0 pour Windows. Les calculs des moyennes et des écarts types ont été faits pour l’analyse descriptive. Alors que le t- test et l’ANOVA ont été calculées pour la comparaison des moyennes. La comparaison des scores de ECOHIS avant et après le traitement était évaluée en utilisant le Wilcoxon signed-rank test. Les changements étaient calculés en faisant la soustraction des scores après le traitement avec les scores d’avant le traitement. Les signes positifs montrent de l’amélioration et les signes négatifs des scores de changement démontrent une détérioration de la qualité de vie liée à la santé orale des enfants et parents mesurée par ECOHIS version Malagasy. La magnitude des changements était déterminée par le calcul de la taille d’effet (effect size). Les statistiques de taille d’effet étaient calculées en divisant les scores moyens de changement par l’écart type des scores moyens obtenus avant le traitement. Les résultats étaient interprétés selon les suggestions de Cohen indiquant (statuant) que si l’effet de la taille est ≤0, 2, cela indique un faible effet, entre 0.3-0.7 : l’effet est modéré et à ≥0.8 l’effet a une large magnitude. [22]
RESULTATS
a. Caractéristiques socio-démographiques et mesures anthropométriques :
Sur les 175 enfants qui étaient inclus à l’étude au départ, 150 étaient suivis jusqu’à la fin sans interruption. Les raisons des pertes de vue étaient les comportements difficiles de certains enfants sur le fauteuil dentaire (n=17), les absences aux rendez-vous chez les dentistes pour le suivi (n=5) et les réponses incomplètes des parents aux questionnaires (n=3). Quarante trois (43,3% ) pour cent des enfants étaient des garçons ; 44,0% était âgés de 5 ans et près de 60% avaient présenté un poids corporel bien en-dessous de la normale. Les 150 enfants inclus dans l’échantillon étaient composés de 40,7% était de poids normal et 59,3% en insuffisance pondérale. (Tableau 1)
Tableau 1 : Distribution en fonction des caractéristiques démographiques
Caractéristiques
Fréquence N (%)
Sexe
Masculin
65(43,3)
Féminin
85(56,7)
Age
3
36(24,0)
4
48(32,0)
5
66(44,0)
IMC
Poids normale
61(40,7)
Insuffisance pondérale
89(59,3)
b. Santé dentaire et mesure anthropométrique
Les enfants nécessitaient différents types de traitement : de traitements préventifs, de traitements restaurateurs, de traitements endodontiques et d’extractions dentaires. Le Tableau 2 montre que 92,1% des enfants en insuffisance pondérale présentait un indice pufa>1 contre 62,3% des enfants à poids normal et la différence était statistiquement significative (p<0,001).
Tableau 2: Distribution de l’IMC en fonction des dents pufa
IMC
Total
Classification pufa groupes
Poids normal
Insuffisance pondérale
pufa zero
23(37,7)
7(7,9)
30(20,0)
pufa>1
38(62,3)
82(92,1)
120(73,3)
Total
61(40,7)
89(59,3)
150(100,0)
p<0,001
D’après le Tableau 3, Le nombre moyen de surfaces cariées était de 17,56 (10,59) dont 21,10(9,96) pour les enfants en insuffisance pondérale contre 12,39(9,34) pour les ceux à poids normal. La proportion d’enfants présentant un indice d-cao>1 était de 91,7%. Le composant d-c (pour dents cariées) dominait totalement la valeur de l’indice. Globalement, l’indice moyen d-cao était de 7,76 avec 4,04 d’écart type. Les enfants en insuffisance pondérale présentaient un d-cao plus élevé que ceux à poids normal avec 9,12 (3,82) et 5,79(4,54) de moyennes de dents cariées, absentes et obturés mais avec prédominance du composant d-c. La majorité des dents cariées était non traitées (d-o=0,00). Ainsi, pour toute la population d’étude, la moyenne de dents cariées non traitées présentant des complications infectieuses, mesurées par l’indice pufa, étaient de 3,33(2,92). Les enfants en sous poids avaient deux fois plus de dents pufa>1 que les enfants à poids normal [pufa=1,70(2,21)] et [pufa=3,96(3,98)] respectivement et la différence était statistiquement significative (p<0,001).
Tableau 3: Etat de santé bucco-dentaire des enfants en fonction de l’IMC
Etat de santé dentaire
IMC
caos
d-c
d-a
d-o
d-cao
p
u
f
a
PN (n=61)
M*(ET)
12,39 (9,34)
5,79 (3,54)
0,00 (0,00)
0,00 (0,00)
5,79(4,54)
0,67 (1,06)
0,44 (0,96)
0,31 (0,81)
0,28 (0,58)
1,70(2,21)
IP (n=89)
M (ET)
21,10 (9,96)
9,11 (3,82)
0,01 (0,10)
0,00 (0,00)
9,12(3,82)
1,15 (1,45)
1,26 (1,41)
1,20 (1,37)
0,84 (1,17)
4,45(3,98)
Total
M (ET)
17,56(10,59)
7,76 (4,04)
0,01 (0,08)
0,00 (0,00)
7,77(4,05)
0,95 (1,32)
0,93 (1,30)
0,84 (1,25)
0,61 (1,00)
3,33(2,92)
p=
0,000
0,000
0,41
0,000
0,031
0,000
0,000
0,001
0,000
PN=poids normal ; IP= Insuffisance pondérale ; *M=moyenne ; ET= écart type
c. Comparaison des scores de ECOHIS avant et après le traitement :
L’évaluation du changement de l’état de qualité de vie liée à la santé orale des enfants après traitement des dents pufa>1 les plus sévères, par le test de Wilcoxon et l’appréciation de l’amplitude de ce changement par le calcul de la taille d’effet, avaient montré que, entre Avant (score=25,55) et Après traitement (score=19,33), le score total de ECOHIS a enregistré une réduction statistiquement significative (p<0,001). Pour la totalité des items, la taille d’effet variait de 0,3 à 0,7 sauf pour l’item 1 (symptôme/douleur) la taille d’effet était de 0,8. La plus faible ampleur de changement a été trouvée pour l’item « détresse parentale ». (Tableau 4)
Tableau 4 : Evaluation du changement de l’état de qualité de vie liée à la santé orale des enfants après traitement, évalué par le test de Wilcoxon et appréciation de l’amplitude de changement par le calcul de la taille d’effet.
Section
Domaine
Nombre d’items et étendu des scores
Avant traitement Moyenne (ET*)
Après traitement Moyenne (ET)
p
Changement de score Moyenne (ET)
Taille d’effet
CIS
9 items (0-36)
16,65(6,02)
12,10(6,77)
<0,001
4,55(8,32)
0,75
Symptôme
1 item (0-4)
2,63(0,87)
1,93(1,07)
<0,001
0,70(1,32)
0,80
Fonction
2 items (0-8)
7,62(3,19)
5,44(3,40)
<0,001
2,18(4,45)
0,68
Psychologie
2 items (0-8)
3,70(1,85)
2,85(1,75)
<0,001
0,85(2,51)
0,45
Self-image
2 items (0-8)
2,70(1,56)
1,89(1,77)
<0,001
0,81(2,17)
0,52
FIS
4 items (0-16)
8,90(3,06)
7,23(3,39)
<0,001
1,67(4,45)
0,54
Détresse
2 items (0-8)
3,87(1,82)
3,33(1,82)
<0,05
0,54(2,46)
0,30
Fonction
2 items (0-8)
5,03(1,42)
3,91(2,10)
<0,001
1,13(2,55)
0,79
ECOHIS
13 items (0-52)
25,55(7,862)
19,33(9,216)
<0,001
6,22(11,23)
0,79
* ET=écart type
DISCUSSION
Le but de cette étude était d’évaluer la relation entre les maladies carieuses, l’état nutritionnel mesuré par l’IMC, et la qualité de vie des enfants d’âge préscolaire après le traitement des complications de caries de la petite enfance non traitées. La tranche d’âge de 3 à 5 ans était choisie pour deux raisons: d’une part, selon l’American Academy of Pediatric Dentistry, les caries dentaires non traitées touche surtout les enfants d’âge préscolaire de 71 mois ou moins dont le diagnostic précoce de cette affection à cette tranche d’âge est important car sans traitement, cette pathologie peut engendrer des complications lourdes aussi bien locale que générale [3] et d’autre part, il fut rapporté que la CPE est rencontrée plus fréquemment chez les enfants vivant dans la pauvreté ou dans des mauvaises conditions socioéconomiques [23] et c’était particulièrement le cas pour ce groupe d’enfants. L’échantillon d’étude était issu d’une catégorie de familles à faible situation socioéconomique, critère par laquelle ces élèves étaient sélectionnés pour bénéficier des supports alimentaires et de surveillance médicale minutieuse dans ce centre.
Le traitement consistait majoritairement par l’extraction des dents à pufa>1 les plus sévèrement touchées et le traitement conservateur des certaines dents cariées.
Une réduction des scores de ECOHIS était obtenue aussi bien dans la section enfant que dans celle familiale. Dans cette étude prospective, les impacts du traitement sur la qualité de vie liée aux dents cariées non traitées étaient mesurés au début de l’étude et cinq mois après les interventions cliniques. Les paramètres ont été remesurés et les résultats étaient comparés. L’outil de mesure de qualité de vie liée à la santé orale des enfants d’âge préscolaire ECOHIS était utilisé dans sa version malagasy. L’examen dentaire de ces élèves a montré une différence très significative de prévalence de la CPE entre le groupe d’enfants en sous poids et le groupe de poids normal (p<0.001). Les enfants en sous poids avaient quatre fois plus de caries que les enfants de poids normal. Ces résultats rejoignent ceux de Sheiham et al., dans leur étude sur l’impact de la carie dentaire sur le poids corporel, la croissance et la qualité de vie chez les enfants âgés de 3 à 6 ans, ayant conclu que les jeunes enfants, avec des lésions carieuses sévères non traitées, présentaient de plus faible poids que les enfants sans CPE [9]. Mais également que les lésions carieuses non traitées influençaient négativement la qualité de vie de l’enfant et de sa famille comme il a été conclu par la littérature [24-26].
Les résultats de la présente étude ont rapporté que les enfants qui présentaient un indice pufa élevé avaient une insuffisance pondérale très marquée (p<0,001). Ce résultat rejoint les travaux de Salmiah S et al., ainsi que Martins-Júnior et al., qui ont trouvé des résultats similaires [27, 28]. De plus, l’étude a également montré les conséquences négatives des lésions carieuses non traitées sur la qualité de vie des enfants et de la famille. Ces résultats rejoignent les conclusions de plusieurs autres études menées dans différents pays, en Angleterre, Sheiham [9] , en Inde, par Inglehart MR et al., Gaur et al., et ce, notamment sur les enfants en sous poids dans les pays en développement.[29, 30]. Les résultats de cette étude ont montré que les lésions carieuses non traitées influençaient négativement la qualité de vie de l’enfant et de sa famille. Ces résultats rejoignent les conclusions des études menées par Wong HM et al.,et par Gomes et al. [24,25]. Selon Gaur S, Nayak R. en 2011, la CPE sévère influence négativement également le poids et la qualité de vie des enfants d’âge préscolaire issus des familles à faible niveau socio-économique. [30]
Aucun enfant n’a bénéficié de traitement dentaire. Le coût élevé du traitement et le faible niveau socioéconomique de la population en sont les principales causes de non consultation des services de soins dentaires [1].
La comparaison des données obtenues Avant et Après traitement des caries compliquées, a révélé une diminution statistiquement significative (p< 0,001) des scores de ECOHIS traduisant une amélioration des impacts des dents cariées une fois traitées. Et ce, même si le changement positif n’était que modéré comparé à celui rapporté par les études ayant utilisé le même questionnaire mais ayant eu l’opportunité d’expérimenter le traitement des dents cariées non traitées sous anesthésie générale [31-34]. Des études ayant utilisé des instruments de mesure de qualité de vie autres que ECOHIS ont également trouvé des résultats similaires [35- 37]. Malgré que ECOHIS était trouvé, par Thomson et al., comme étant moins approprié pour être utilisé en recherche en services de santé, mais beaucoup plus pour les études épidémiologiques, cet instrument de mesure a permis d’estimer l’amélioration des perceptions des parents concernant la qualité de vie liée à la santé orale des enfants et de la famille après le traitement des lésions carieuses compliquées. [38]
Les tailles d’effet observées dans cette étude étaient plus modérées par rapport aux autres publications antérieures [32-37], la faible amplitude de la taille d’effet peut être attribuée à l’utilisation de l’anesthésie dentaire générale lors de ces études. L’efficacité du traitement dentaire sous anesthésie générale chez les jeunes enfants dans l’amélioration de la qualité de vie liée à la santé orale, rapportée par les parents, a été synthétisée dans une revue systématique de littérature.[38]
Limite de l’étude :
Les résultats de la présente étude ne peuvent pas être généralisées car il s’agissait des données enregistrées sur un groupe d’enfants choisis à base de critères spécifiques.
CONCLUSION :
Cette étude est la première à mettre en évidence l’implication d’un mauvais état de santé bucco-dentaire sur l’IMC des enfants et leur qualité de vie liée à la santé orale à Madagascar.
ABREVIATIONS : AAPD : American Academy of Pediatric Dentistry; d-cao: dent- cariée, absente, obturée; C-OIDP : Child-Oral Impact on Daily Performance; CPE : Carie de la Petite Enfance ; ECC: Early Childhood Caries; ECOHIS:Early Childhood Oral Health Impact Scale; IMC: Indice de Masse Corporelle; PUFA : affection Pulpaire, Ulcération, Fistule, Abcès ; s-caos : surfaces – cariées, absentes, obturées.
FINANCEMENT: Les auteurs déclarent que le financement de l’étude était supporté par de fonds personnels
CONTRIBUTION DES AUTEURS: RN superviseur, a contribué dans la conception, au design de l’étude, à l’analyse statistique et à la révision de l’article ; RJ, chercheur principal a contribué à la conception et à la réalisation de l’étude ; RJJ a supervisé la collecte des données ; RJ et RJJ ont contribué à l’interprétation des résultats, à la rédaction et à la révision de l’article.
REMERCIEMENTS : Les auteurs adressent leurs remerciements aux parents et enfants qui ont participé à l’étude.
CONFLIT D’INTERET : Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflit d’intérêt.
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RAVELOMAHARAVO André Léonard1, 2,RAZANAMIHAJA Noëline 1,2
1 Laboratoire d’Epidémiologie et Biostatistique en Santé de Populations (LabEBSP)
2 Ecole doctorale Nutrition-Environnement Santé (EDNES), Université de Mahajanga
Résumé : La présente étude transversale avait pour objectif d’adapter en langue Malagasy le questionnaire WHOQOL-HIV-BREF sur un échantillon de personnes vivant avec le VIH et d’évaluer les propriétés psychométriques. Méthode: La méthode « traduction-contre traduction » était adoptée pour convertir le questionnaire de l’anglais en malagasy. La validité de contenu, et la fiabilité test-retest étaient évaluées. La consistance interne était mesurée avec le coefficient alpha de Cronbach. Une analyse factorielle confirmatoire était menée pour tester la validité du construit. Les corrélations de Pearson “items-domaine” étaient utilisées pour tester la validité convergente et la validité discriminante était évaluée en comparant les moyennes de scores entre les sous-groupes asymptomatique, symptomatique et Sida. Résultats : La validité de contenu évaluée par un panel de 14 experts a présenté un ratio de validité de contenu supérieur à 0,51 pour chaque item. Le test-retest, évalué sur 50 patients vivant avec le VIH–Sida, a montré une fiabilité satisfaisante avec ICC entre 0,72 à 0,85 (p<0,001). Les propriétés psychométriques étaient évaluées sur un échantillon de 460 patients recrutés dans les centres de références, d’âge moyen de 33,31 (±10,3) ans. L’alpha de Cronbach, pour tous les domaines, était >0,70 indiquant une bonne fiabilité. L’analyse factorielle confirmatoire a identifié sept facteurs présentant des indices de qualité d’ajustement acceptables (NFI=0,898; TLI=0,907; CFI=0,943 et RMSEA=0,045). La corrélation entre chaque domaine et la qualité de vie était bonne sauf pour la spiritualité montrant une validité convergente moyenne. La validité concurrente et la validité discriminante ont montré des résultats satisfaisants. Conclusion : La présente étude a montré que la version malagasy du WHOQOL-HIV est fiable et valide pour évaluer la qualité de vie des patients vivant avec le VIH à Madagascar.
Mots clés :validité, fiabilité, WHOQOL-HIV-bref version malagasy, Qualité de vie
Abstract:
The aim of this cross-sectional study was to adapt the WHOQOL-HIV-BREF questionnaire into the Malagasy language on a sample of people living with HIV and to evaluate the psychometric properties. Method: The “translation-back translation” method was adopted to convert the questionnaire from English into Malagasy. Content validity and test-retest reliability were assessed. Internal consistency was measured with Cronbach’s alpha coefficient. A confirmatory factor analysis was conducted to test the validity of the construct. Pearson “item-domain” correlations were used to test convergent validity, and discriminant validity was assessed by comparing score means between the asymptomatic, symptomatic, and AIDS subgroups. Results: Content validity assessed by a panel of 14 experts showed a content validity ratio greater than 0.51 for each item. The test-retest, evaluated on 50 patients, living with HIV-AIDS, showed satisfactory reliability with ICC between 0.72 and 0.85 (p<0.001). The psychometric properties were evaluated on a sample of 460 patients recruited in the reference centres, with an average age of 33.31 (±10.3) years. Cronbach’s alpha, for all domains, was >0.70 indicating good reliability. Confirmatory factor analysis identified seven factors with acceptable goodness-of-fit indices (NFI=0.898; TLI=0.907; CFI=0.943 and RMSEA=0.045). The correlation between each domain and quality of life was good except for spirituality showing average convergent validity. Concurrent validity and discriminant validity showed satisfactory results. Conclusion: This study has shown that the Malagasy version of WHOQOL-HIV is reliable and valid for assessing the quality of life of patients living with HIV in Madagascar.
Keywords: validity, reliability, WHOQOL-HIV-brief Malagasy version, Quality of life
Comment citer cet article : Ravelomaharavo AL, Razanamihaja N.Traduction et évaluation des propriétés psychométriques de la version malagasy du questionnaire WHOQOL-HIV-BREF. Revue Sc Santé. 2022 ;1 :1-10
INTRODUCTION :
Contexte : D’après le rapport du programme mondial des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), en 2020, dans le monde, 37.7 millions de personnes vivaient avec le VIH dont 36.0 millions d’adultes et 1.7 million d’enfants âgés de 0-14 ans. Plus de la moitié (53 %) de l’ensemble des personnes vivant avec le VIH sont des femmes et des filles. En 2020, 84% connaissaient leur statut sérologique en 2020 et 6.1 millions ne savaient pas qu’elles vivaient avec le VIH. L’Afrique subsaharienne abrite les deux tiers (67 %) des personnes vivant avec le VIH. Ce même rapport, informe qu’en 2021, l’avènement de la pandémie de COVID-19, a fait reculer le suivi de beaucoup de maladies chroniques dont le VIH-SIDA, pourtant, immunodéficiences, les personnes vivant avec le VIH font partie des personnes vulnérables vis-à-vis de la COVID-19 [1].
Des études menées en Angleterre et en Afrique du Sud ont révélé que le risque de mourir de la COVID-19 chez les personnes séropositives était deux fois plus élevé que dans la population générale [2]. Les fermetures et restrictions engendrées par la COVID-19 ont perturbé le dépistage du VIH et ont entraîné une chute brutale des diagnostics et des orientations vers des traitements contre le VIH dans de nombreux pays. En effet, le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme a rapporté que, selon les données recueillies dans 502 établissements de santé de 32 pays d’Afrique et d’Asie, le dépistage du VIH a diminué de 41 % et les orientations vers un diagnostic et les traitements ont diminué de 37 % pendant les premiers confinements dus à la COVID-19 en 2020, par rapport à la même période en 2019 [3].
Dans le monde, l’avènement des multi thérapies antirétrovirales a entraîné une amélioration du pronostic de l’infection à VIH, avec apparition de nouveaux paramètres à prendre en considération tels que l’observance et la qualité de vie. La qualité de vie (QV) est définie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme « la perception qu’ont les individus de leur position dans la vie dans le contexte de la culture et des systèmes de valeurs dans lesquels ils vivent, et par rapport à leurs objectifs, attentes, normes et préoccupations » [4].
La qualité de vie liée à la santé est fondée sur des mesures de perception du patient en matière de: satisfaction du traitement antirétroviral, satisfaction de sa vie sexuelle, ressenti de ses symptômes cliniques, et d’évaluation de son humeur (dépression, irritabilité, anxiété). La qualité de vie est également estimée par des mesures de comportements vis-à-vis de l’observance des traitements.
La qualité de vie est un concept pluridimensionnel permettant l’évaluation des perceptions subjectives mesurant différents aspects négatifs ou positifs de la vie des sujets d’étude. L’évaluation de la qualité de vie est d’une importance capitale quand on envisage d’étudier, comprendre comment vivent les personnes affectées par une maladie, dans le cas de la présente étude, s’agissant de VIH, et de chercher à améliorer leur qualité de vie. On peut également mener une étude de qualité de vie liée à un état de santé spécifique pour évaluer les effets des traitements reçus.
En France, les résultats de l’enquête de l’Agence Nationale de Recherche sur le Sida (ANRS VESPA), menée auprès d’un échantillon représentatif des personnes vivant avec le VIH suivies ont montré que, globalement, la qualité de vie des personnes atteintes par le VIH était inférieure à celle de la population générale. La qualité de vie était influencée par des facteurs médicaux comme la coïnfection par le Virus de l’hépatite C (VHC) ainsi que le stade clinique de la maladie, mais aussi par diverses caractéristiques liées au vécu de la séropositivité ainsi qu’à leur santé mentale. La précarité sociale accompagnée de difficultés financière était également rapportée, être liée à une qualité de vie physique altérée [5].
Des instruments ont été développés pour mesurer les différents domaines de la vie des personnes affectées par une maladie spécifique. Le World Health Organization Quality Of Life (WHOQOL) est pionnier dans ce domaine, développé par l’OMS et ses experts en 1998, il s’agit d’un questionnaire générique pour l’évaluation de la Qualité de Vie globale [6,7].
Un peu plus tard, en 2003, le WHOQOL-HIV, un questionnaire spécifique pour les personnes affectées par le VIH, était développé par l’OMS [8,9].
La version courte de ce questionnaire, le WHOQOL-HIV-Bref a été déjà traduite et validée en plusieurs langues, dans de nombreux pays : en Malaisie [10], au Taiwan [11], au Portugal européen [12], au Vietnam [13], au Portugal [14], en Corée [15], en Iran [16], au Burkina Faso [17], en République islamique de l’Iran [18], en Ethiopie [19], en Thaïlande [20], en Finlande [21], en Chine [22], en Indonésie [23], en Espagne [24], au Brésil [25], en France [26], au Pakistan [27], en Tanzanie [28], en Iran version persane [29], en Italie [30].
Dans une revue systématique de littérature menée par Cooper V et al, sur les questionnaires génériques et spécifiques (WHOQOL-HIV), les auteurs ont conclu que le WHOQOL-HIV-BREF est le plus valide [31].
Aucune étude n’a rapporté l’utilisation de WHOQOL-HIV BREF en langue malagasy. En effet, Madagascar ne dispose pas encore d’outil de mesure de qualité de vie liée à la santé des Personnes Vivant avec le VIH (PVVIH) en langue malagasy. Les objectifs de la présente étude étaient de traduire, d’évaluer la fiabilité et la validité de la version Malagasy de la forme courte du questionnaire WHOQOL-HIV sur les populations souffrant de VIH-SIDA à Madagascar.
METHODE ET MATERIEL
Population et lieux d’étude : Une étude transversale était menée auprès de 460 patients pour la mesure des propriétés psychométriques de la version malagasy du questionnaire WHOQOL-HIV.Cette étude multicentrique était menée dans les six plus grands centres de référence des PVVIH, répartis dans tout Madagascar. Etaient inclus dans l’étude les personnes séropositives et sous traitement ARV (PVVIH), âgées de 18 ans et plus, fréquentant les centres de référence sites de l’étude, ayant accepté de participer à l’étude et qui ne présentaient pas de troubles mentaux, psychiatriques majeurs. L’échantillonnage par convenance était appliqué.
L’étude a été approuvée par le Comité d’éthique de la recherche biomédicale du Ministère de la Santé Publique, sous agrément N° 082-MSANP/CERBM DU 20 juillet 2018.
Matériel : Les données étaient collectées à partir du questionnaire à auto administrer WHOQOL-HIV-BREF version malagasy. Le choix du questionnaire WHOQOL-HIV BREF pour l’analyse de la qualité de vie était justifié par le fait que le WOHQOL-HIV-Bref a bénéficié d’une évaluation dans plusieurs pays pour son adaptation transculturelle et la présente étude aurait alors contribué à cet effort. Par ailleurs, ce questionnaire dispose d’un algorithme d’analyse et d’un manuel d’utilisation accessible, et l’administration confortable des questions. Le questionnaire WHOQOL-HIV–Bref était développé et révisé par les experts du groupe VIH de l’OMS (9). La version initiale du questionnaire était constituée de 100/120 items. Le WHOQOL-HIV-BREF est une forme courte. Il est constitué de 2 items généraux (Qualité de Vie et perceptions de santé générale) et inclut 29 items spécifiques couvrant 6 domaines (physique, psychologique, niveau d’indépendance, relation sociale, environnement et spiritualité).Chaque item était évalué par une échelle de scores de type Likert à 5 points où 1 représente le plus mauvais score et 5 le score le plus élevé et positif de mesure de qualité de vie. Pour certains items mesurant les impressions négatives, les scores ont été recodés suivant les instructions du panel d’experts de WHOQOL-HIV. Sept items (questions) ont été concernés par le recodage : Q3, Q4, Q5, Q8, Q9, Q10 et Q31 pour lesquels le score 1=5 ; 2=4 ; 3=3 ; 4=2 et 5=1 (score le plus élevé). Chaque domaine était évalué en calculant les moyennes des scores qui le constituent et multipliant ensuite cette moyenne par 4.
Adaptation du questionnaire à la langue malagasy:
Processus de traduction : Pour être utilisable dans un autre pays parlant d’autres langues que l’anglais, langue de conception du questionnaire WHOQOL-HIV, ce dernier devrait subir une traduction et un processus de validation. La méthode « traduction-contre traduction » était adoptée. La traduction du questionnaire WHOQOL-HIV-Bref en langue malagasy, suit la méthodologie de ‘’traduction –contre traduction’’, préconisée par Beaton et al. (32) et de Guillemin et al. (33). Deux traducteurs professionnels, natifs de Madagascar, ont traduit le questionnaire en langue malgache.
Les deux traductions ont été ensuite confrontées et très peu de différence avait été soulevée par le comité d’évaluation. Puis une synthèse des deux traductions fut obtenue. Cette dernière fut donnée par la suite à deux autres traducteurs qui ont retraduit cette première version malgache en anglais pour tester la qualité de traduction. Les deux versions retraduites en anglais ont été confrontées et comparées avec la version originale et les imperfections étaient corrigées pour obtenir une version pré finale unique en langue malagasy.
Pré-test (Validité faciale) : La version pré-finale était testée sur 10 participants qui ne feront pas partie de l’échantillon final. Ils étaient invités à répondre aux questions par auto-administration et les enquêteurs notaient leurs réactions pendant qu’ils y répondaient. La séance était suivie par une interview face-à-face pour leur demander s’ils avaient ou non rencontré des difficultés pour répondre aux questions et quelles étaient leurs suggestions d’expressions qui traduisaient au mieux leurs perceptions. Leurs réponses étaient soumises au comité d’expert qui a pris la décision finale.
Validité du contenu : Une approche quantitative a été choisie pour évaluer la validité du contenu selon les recommandations de Lawshe et al. 1975. On demandait aux experts de noter chaque item en fonction de 3 critères : a) l’item est nécessaire ; b) l’item est utile mais pas nécessaire et c) l’item n’est pas nécessaire. Selon la table de Lawshe, le minimum de content validity ratio (CVR) accepté comme significatif avec un panel de 14 experts est de 0,51 par item. Si un item avait un CVR <0,6 l’item est rejeté [34].
Traitement des données et analyses statistiques:
La saisie et traitement des données étaient réalisés à l’aide du logiciel SPSS version 24.0. L’analyse statistique descriptive des caractéristiques sociodémographiques était menée et la fréquence de distribution des réponses à chaque item était évaluée. Les scores de WHOQOL-HIV-BREF étaient calculés ainsi que ceux des domaines. Les effets plafond et plancher étaient calculés par le pourcentage de fréquence de scores de réponses les plus élevés et les plus faibles respectivement. Les effets sont significatifs quand ils atteignent 15% et plus [35].
Mesures de fiabilité :La fiabilité du test-retest était évaluée sur 50 PVVIH, qui ont répondu au questionnaire WHOQOL-HIV-BREF version malagasy et deux semaines plus tard, ils avaient encore une fois rempli le questionnaire pour un retest. La fiabilité du test-retest était évaluée par l’Intra-Class-Correlation (ICC) et son intervalle de confiance à 95%. Un ICC > 0,75 démontre une haute fiabilité du test–retest [36].
La consistance de la fiabilité interne était évaluée par l’alpha de Cronbach. Un α > 0,70 indique une bonne consistance de la fiabilité interne selon Bland JM et al. [37].
Mesures de validité: La validité concurrente était évaluée par la corrélation des domaines avec les 2 questions sur l’état de santé auto-évalué et sur la qualité de vie en général. Une corrélation de Spearman positive et r>0.3 est recommandée pour évaluer la qualité de la validité concurrente [38].
La validité convergente était mesurée par la corrélation de Pearson entre les items et leur domaine correspondant.
La validité du construit (à quel point l’instrument arrive t-il à bien mesurer ce qu’il avait l’intention de mesurer) du WHOQOL-HIV-bref version malagasy, était évaluée par l’analyse exploratrice des facteurs ou Exploratory Factor Analysis (EFA) prenant en considération les valeurs de Kaiser-Meyer Olkin (KMO) et de Barlett’s sphericity pour évaluer si la taille d’échantillon était adéquate pour mener une Analyse Factorielle confirmatoire ou Confirmatory Factor Analysis (CFA). La valeur du KMO devrait être ≥ 0,80 pour indiquer que la taille d’échantillon est acceptable pour mener une CFA. L’analyse factorielle confirmatoire était réalisée pour tester si la solution originale à six domaines ou facteurs correspondait à nos données. Les facteurs étaient extraits par la méthode de composant principal et une rotation Varimax. Une Eigenvalue >1 était utilisée pour déterminer le nombre de facteurs. L’évaluation de l’ajustement du modèle des saturations factorielles était menée à base du calcul des indices d’ajustement suivants: le Root Mean Square Error of Approximation (RMSEA), Comparativ Fit Index (CFI), Tucker Lewis Index (TLI), Normal Fit Index (NFI). Pour CFI, les valeurs > 0.95 sont communément utilisées pour indiquer un bon ajustement du modèle et les valeurs > 0,90 indiquent “un ajustement acceptable » ; RMSEA < 0,05 indique un ajustement excellent tandis que la valeur <0,08 est considérée “acceptable” selon Hu and Bentler [39].
La validité discriminante était mesurée par la comparaison des moyennes des scores. Pour la comparaison, la population d’étude était divisée en groupes: asymptomatiques, symptomatiques et Sida.
RESULTATS :
Au total, 460 PVVIH ont répondu au questionnaire WHOQOL-HIV version Malagasy. L’échantillon était constitué à 57,8% d’hommes et 42,2% de femmes. L’âge moyen (écart type) des participants était de 33,31(±10,3) ans. Quand au niveau d’éducation, 47,8% avait arrêté leur scolarité au niveau secondaire et lycée et 25,7% ont atteint le niveau universitaire. Concernant le stade de la maladie, 55,2% des participants étaient asymptomatiques, 38,9% étaient symptomatiques et 5,9% au stade de sida (Tableau 1).
Tableau 1 : Caractéristiques socio-démographiques des participants à l’étude
Variables
N (%)
Genre
M
266 (57,8)
F
194 (42,2)
Age
Moyenne (ET)
33,31(10,3)
Range
18 à 74ans
Groupe d’âge
<25 ans
87(18,9)
25-34 ans
196 (42,6)
35-44 ans
105 (22,8)
45-54 ans
54 (11,7)
55 ans et plus
18 (3,9)
Niveau d’éducation
N’a pas été à l’école
56(12,2)
Niveau primaire
66 (14,3)
Niveau secondaire et Lycée
220 (47,8)
Niveau universitaire
118 (25,7)
Emploi
Sans emploi
149 (32,4)
Agriculteur/éleveur
27 (5,9)
Fonctionnaire
25 (5,4)
Privé
127(27,6)
Autres
132 (28,7)
Comment avez-vous contracté le VIH ?
Rapport sexuel avec un homme
262 (57,0)
Rapport sexuel avec une femme
96 (20,9)
Par injection de drogue
7 (1,5)
Sang ou dérivés sanguins
65 (14,1)
Autres
30 (6,5)
Stade de la maladie
Asymptomatique
254 (55,2)
Avec symptôme
179 (38,9)
SIDA
27 (5,9)
La traduction – contre traduction s’était bien déroulée et le questionnaire était bien accepté lors du pré-test. L’évaluation de la validité du contenu a montré que toutes les valeurs de CVR des items étaient supérieures à 0,51 variant de 0,57 à 0,99 et significatives à p<0,05) (Tableau 2).
Lors du test-retest, chaque domaine avait présenté un ICC > 0,70. Dans notre étude, nous avons trouvé une étendue de valeurs de ICC comprise entre 0,72 et 0,85 avec p<0,001. (Tableau 3)
Tableau 3: Résultats du test-retest évalué par l’ICC
Domaines
ICC [95% IC]
Physique
0,85[0,74-0,90]
Psychologique
0,85[0,74-0,85]
Niveau d’indépendance
0,82[0,68-0,90]
Relation sociale
0,72[0,51-0,84]
Environnement
0,73[0,56-0,83]
Spiritualité
0,82[0,69-0,90]
Les statistiques descriptives des items et domaines ainsi que les coefficients d’asymétrie et de Kurtosis étaient calculés pour les items. Les valeurs s’étalaient de -1,00 à 1,00. Un coefficient de moins de 1,5 est considéré comme adéquat.
Dans cette étude, l’item qui avait le plus élevé coefficient de Kurtosis (-1,121) était la dépendance aux médicaments (Tableau 4).
Tableau 4 : Statistiques descriptives des items et domaines (N=460)
Domaines et items
Moyenne
ET
Skewness
Kurtosis
Ceiling %
Floor %
Qualité de vie
3,32
1,03
-,202
-,690
Etat de santé
3,24
1,04
-,249
-,458
Physique
13,44
3,09
-,298
-,173
1,3
1,3
Psychologique
12,53
2,74
-,079
,323
0,9
0,7
Niveau d’indépendance
12,89
2,98
-,265
,097
0,9
0,4
Relation sociale
12,40
3,01
-,026
-,038
1,5
0,7
Environnement sanitaire
12,49
2,47
-,322
-,034
0,2
0,2
Spiritualité
11,16
3,41
,610
,078
2,4
0,9
Total domaines
87,19
14,69
-,273
,527
TOTAL des items
97,08
16,29
_,320
,525
ET=écart type
Le tableau 5 présente les résultats de l’analyse de la fiabilité de la consistance interne. Les valeurs de l’alpha de Cronbach s’étalaient entre 0,75 et 0,83 pour tous les domaines.
Tableau 5: Évaluation de la consistance interne avec alpha de Cronbach,
Etendu
Domaine
Moyenne (ET)
min
max
Alpha de Cronbach
1. Physique
13,44(3,09)
5
20
0,75
2. Psychologique
12,53(2,74)
4
20
0,76
3. Niveau d’indépendance
12,89(2,98)
4
20
0,77
4. Relation sociale
12,40(3,01)
4
20
0,78
5. Environnement
12,49(2,48)
5
20
0,76
6. Spiritualité
11,16(3,41)
4
20
0,83
TOTAL Domaines
0,80
Mesures de validité : La validité concurrente était évaluée par la corrélation de Spearman rho entre les items de généralité (Q1 : Bien-être globale/ qualité de vie et Q2 : santé générale) car on avait à faire avec des variables ordinales.
Les valeurs de rho s’étendaient de 0,190 à 0,467 pour l’item « bien-être » et de 0,190 à 0,469 pour l’item « santé générale » (p<0,001). Tous les domaines avaient un r>0,3 sauf le domaine « spiritualité ». Les coefficients de corrélation étaient positifs et modérés entre tous les domaines et les items Q1 et Q2 ce qui indique une bonne validité concurrente. (Tableau 6)
Tableau 6 : Validité concurrentedu WHOQOL-HIV-Bref malagasy utilisant la corrélation de Spearman rho
Variables Global ratings Q1= qualité de vie Q2=santé
rho
p-value
rho
p-value
Score total
0.467
<0,001
0.469
<0,001
Sous scores/Domaines
Physique
0.361
<0,001
0.398
<0,001
Psychologique
0.419
<0,001
0.417
<0,001
Niveau d’indépendance
0.368
<0,001
0.386
<0,001
Relation sociale
0.357
<0,001
0.361
<0,001
Environnement
0.352
<0,001
0.307
<0,001
Spiritualité
0.190
<0,001
0.190
<0,001
La validité convergente était déterminée par la corrélation entre les items et leur domaine d’appartenance.
Les résultats ont montré des coefficients de corrélation modérés à élevés avec leur domaine respectif et le coefficient r s’étalait de 0,313 à 0,926 (p<0,001).
Les corrélations les plus faibles et les plus élevées étaient trouvées dans le domaine « spirituel » où l’étendu de valeurs de r s’étalait de 0,313 à 0,926 respectivement. L’item avec la plus faible corrélation (0,313) avec son domaine (spiritualité) était la « perception de l’importance de la vie ».
La validité du construit était testée en utilisant l’analyse factorielle exploratoire/ exploratory factor analysis (EFA). La valeur de KMO était de 0,855 (ce qui est acceptable car supérieure à 0,85) et le test de sphéricité de Bartlett présentait un Khi2 de 4959,626 et un degré de liberté (ddl) = 406.
Le test de Barlett était significatif à p <0,001 indiquant que les données étaient compatibles pour une analyse par composante principale. Dans notre étude, l’analyse par composante principale était testée sur 6 facteurs à Eigenvalue>1.
Les 6 facteurs extraits expliquaient 56,9% des variances dont le 1er facteur, à lui seul, expliquait 23,45% des variances. Les valeurs des indices d’ajustement trouvées étaient: NFI=0,898 ; TLI=0,906; CFI=0,943 et RMSEA=0,045 indiquant un bon ajustement. Toutefois, la répartition des items dans les différents domaines a changé. L’analyse factorielle confirmatoire a permis de confirmer le modèle original à six domaines. Toutefois, cinq de ces facteurs contenaient plus de 3 items et un domaine n’avait qu’un seul item, il s’agissait du facteur 3 (« finance »). Mais, cet item unique semblait peser lourd dans le construit avec un coefficient de corrélation élevé (r>0,803). (Tableau 7)
Tableau 7: Analyse factorielle confirmatoire basée sur 6 facteurs
items
FACTEURS
1 Spiritualité
2 Environnement psychosocial
3 Financier
4 Psychospirituel
5 Physique
6 Relation sociale et environnementale
Q8
,993
Q9
,970
Q10
,694
Q21
,342
Q22
,523
Q23
,341
Q24
,465
Q25
,414
Q28
,525
Q29
,439
Q30
,555
Q16
,803
Q6
-,430
Q7
-,513
Q11
-,700
Q12
-,817
Q3
-,371
Q4
-,441
Q5
-,640
Q31
-,867
Q13
,393
Q14
,427
Q15
,250
Q17
,552
Q18
,434
Q19
,491
Q20
,299
Q26
,239
Q27
,421
Concernant la validité discriminante, globalement, dans tous les domaines, le groupe “asymptomatique” avait les scores de qualité de vie les plus élevés comparé à ceux des groupes “symptomatiques et Sida. Les différences étaient significatives (p<0,01) sauf pour les domaines “relation sociale” et “environnement” (p>0,05). (Tableau 8)
Tableau 8: Validité discriminante
Domaines
Asymptomatiques (N=254)
Avec symptômes (N=179)
Sida (N=27)
Moyenne(SD)
Médian
Moyenne(SD)
Médian
Moyenne(SD)
Médian
p
Physique
14,08(2,94)
14,00
12,74(2,97)
13,00
12,00(3,84)
12,00
,000
Psychologique
12,85(2,71)
12,80
12,28(2,53)
12,80
11,14(3,75)
10,40
,002
Niveau d’indépendance
13,09(2,88)
13,00
12,89(2,99)
13,00
11,04(3,25)
11,00
,003
Relation sociale
12,64(3,01)
13,00
12,17(2,99)
12,00
11,70(3,83)
12,00
,128
Environnement
12,69(2,37)
10,40
12,30(2,83)
12,00
12,50(2,49)
13,00
,109
Spiritualité
11,51(3,56)
11,00
10,96(3,13)
10,00
9,15(3,02)
9,00
,002
DISCUSSION
La présente étude avait pour objectifs de traduire et d’évaluer les propriétés psychométriques de la version malagasy du WHOQOL-HIV-Bref sur un échantillon de patients suivis dans des centres de références pour les personnes PVVIH.
Dans la revue de littérature menée, il était rapporté que plus de dix pays ont déjà traduit en leur langue respective et validé le WHOQOL-HIV-BREF. Toutes les études ont trouvé que ce questionnaire était fiable et valide. Madagascar ne possédait pas encore d’outil de mesure de la qualité de vie liée à l’infection au VIH. Pour combler ce vide, cette étude transversale a été menée. L’évaluation menée à Madagascar pour la version en langue malagasy rejoint les résultats trouvés dans les autres pays. La validation du WHOQOL-HIV-Bref a fait l’objet d’un effort inter-pays pour son adaptation transculturelle. La présente étude contribuerait à cet effort. La traduction et contre-traduction n’ont pas soulevé de problèmes particuliers attestant la bonne qualité de la traduction. La version finale de la version malagasy du WHOQOL-HIV-BREF était obtenue après avoir subi de modifications mineures. Le contenu en version malagasy du questionnaire était validité par un CVR acceptable pour tous les items. Des résultats similaires étaient rapportés même par Salehi M et al. [18].
Au niveau des domaines, nous n’avions pas observé d’effet plafond ni d’effet plancher. Les scores du test-retest ont montré des valeurs d’ICC acceptables pour tous les domaines montrant une bonne fiabilité des réponses. La consistance interne était satisfaisante pour tous les domaines comme il a été constaté dans d’autres articles écrits par Hsiung en Taiwan [11] ; Salehi M en Iran [18]; Meemoun en Thaïlande [20] ; Fuster Ruiz de Apodaca en Espagne [24] ; Kondo en Tanzanie [28] et où le domaine « spiritualité » avait la plus faible corrélation item-domaine. L’instrument présentait une fiabilité satisfaisante avec un alpha de Cronbach supérieur à 0,70 dans tous les domaines. Ces résultats rejoignent les publications antérieures rapportant des coefficients de corrélation acceptables [12, 28]. Nous avions constaté après analyse des facteurs, que plusieurs items n’étaient pas bien corrélés avec leur domaine respectif initial et c’était également le même constat pour Saddi et al. [10], lors de la validation du WHOQOL-HIV-Bref en langue Malay, de même que pour Canavarro MC & Pereira M (2012) en langue portugaise européenne [12] et pour Lee WK, Kim S, Kim H, et al., en langue coréenne [15]. Et, sur les 6 facteurs, un n’était constitué que d’un item, ce résultat se rapproche de ceux des études ayant identifié 5 facteurs à l’exemple de celle de Ahmed et al. [27] Les résultats de la présente étude ont rapporté un bon ajustement similaire aux autres études de validation de WHOQOL-HIV-BREF menées par Peirera et al. (14)(21), et par Zhu Y et al. [22]. La validité discriminante était satisfaisante. L’instrument était capable de discerner la qualité de vie perçue par les PVVIH symptomatiques et les asymptomatiques sauf pour les domaines « relation sociale » et « environnement ». L’étude menée en Malaisie a permis de discriminer statistiquement et significativement chaque domaine entre les sous groupes asymptomatiques et symptomatiques sauf pour le domaine « spiritualité » [10].
Limites de l’étude : L’étude peut rencontrer des biais et des défauts de toute étude transversale toutefois, ce design d’étude est approprié pour ce genre d’évaluation.
L’échantillonnage par convenance peut avoir affecté la représentativité de l’échantillon, toutefois, la taille assez large de l’échantillon devrait modérer l’effet.
CONCLUSION
Cette étude a démontré que le questionnaire WHOQOL-HIV version malagasy est fiable et valide et peut être utilisé pour valider la qualité de vie des personnes vivant avec le HIV à Madagascar.
Abréviations : ANRS: Agence Nationale de Recherche sur le Sida; CERBM : Comité d’Ethique de la Recherche BioMédicale ; OMS : Organisation Mondiale de la Santé ; CVR: Content Validity Ratio; HIV: Human Immunodeficiency Virus; PVVIH : Personnes Vivant avec le VIH ; ICC : Intraclass Correlation Coefficient ; EFA: Explorator Factor Analysis; CFA: Confirmatory Factor Analysis; WHOQOL: World Health Organization Quality Of Life.
Conflit d’intérêt :
Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêt.
Financement :
L’étude n’a pas bénéficié de support financier. Contribution de chaque auteur dans l’étude :
RAL est le principal rédacteur du manuscrit. RN a contribué à l’analyse statistique et à la révision de l’ensemble du manuscrit. RAL et RN ont lu et approuvé le résultat final.
Remerciements
Nos remerciements sont adressés à tous ceux qui ont aidé à la réalisation de cette étude.
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Article mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution – Pas d’utilisation commerciale – 4.0 International
Article original
1École Doctorale Nutrition-Environnement-Santé, Université de Mahajanga, Madagascar. 2 Laboratoire d’Epidémiologie et de Biostatistique en Santé des Populations.
Résumé : L’étude avait pour butde déterminer les habitudes de soins de santé par les plantes médicinales durant la grossesse et après l’accouchement. Méthode : une étude transversale, basée sur interview face-à-face, était menée auprès de 200 femmes enceintes concernant leurs habitudes d’utilisation de plantes médicinales. Les répondantes habitaient la région d’Androy, située dans la partie sud de Madagascar. Un questionnaire semi-structuré était utilisé les interrogeant sur la dénomination de la plante, la partie utilisée, les indications, la mode de préparation et la voie d’administration. Résultats :Au total 53,0 % des femmes interrogées avaient l’habitude d’utiliser des plantes médicinales. Dix huit espèces de plantes étaient citées dont huit ont pu être vérifiées par la littérature publiée au niveau international. Les feuilles étaient la partie des plantes la plus utilisée. La décoction était la préparation la plus commune. La voie d’administration orale était la plus pratiquée. Les raisons d’utilisation de plantes étaient: pour lutter contre l’hypertension, l’anémie, les infections, pour faciliter le travail, prévenir l’hémorragie postpartum et renforcer la santé des femmes après accouchement. Conclusion : Une liste de plantes médicinales utilisées par les femmes enceintes de la région d’Androy a pu être dressée. Cependant la majorité des plantes citées par les répondantes était peu étudiée et les effets tératogènes sur le fœtus sont encore non élucidés bien que les femmes interviewées n’avaient pas rapporté des effets négatifs de ces plantes sur leur santé. Des études pharmacologiques plus approfondies sont nécessaires. Mots-Clés : femmes enceintes, utilisation de plantes médicinales, Androy, Madagascar
Abstract : The aim of the study was to determine the habits of herbal medicines used by pregnant women. Method: a cross-sectional study, based on a face-to-face interview, was conducted with 200 pregnant women concerning their habits in using medicinal plants. Respondents lived in Androy region, located in the south part of Madagascar. A semi-structured questionnaire was used questioning the name of the plant, the part used, the indications, the method of preparation and the route of administration. Results: A total of 53.0% of the women interviewed had used medicinal plants. Eighteen plant species were cited, eight of which have been scientifically verified through scientific literature. The leaves were the most used part of the plants. The decoction was the most used method of preparation. The oral and dermal routes were the most widely route of administration used. The reasons for using herbs evoked by respondents were to fight hypertension, anaemia; to facilitate labour and reduce postpartum infections and haemorrhage, menstrual pain and strengthen the health of women after childbirth. Conclusion: A list of herbal medicines used by pregnant women in Androy could be listed. However, the majority has been little studied and the teratogenic effects on the fetus are still unclear, although the women interviewed had not reported negative effects of these plants on their health. Keywords: pregnant women, medicinal plants use, Androy, Madagascar.
Comment citer cet article :
Tsivahiny P, Ranjarisoa LN, Tsitohery C, Razanamihaja N. Utilisation de plantes médicinales par les femmes enceintes et ayant accouché dans le sud de Madagascar.Revue Sc. Santé 2020;1:21-30.
INTRODUCTION :
Les plantes médicinales constituent le principal pilier de la médecine traditionnelle. L’OMS a défini la médecine traditionnelle comme étant l’ensemble de connaissances, de compétences, et de pratiques basées sur des théories, croyances et expériences indigènes que l’on utilise pour maintenir la santé, pour la prévention et pour améliorer la santé ou traiter des maladies [1]. Cette branche de la médecine a été utilisée dans le monde depuis des milliers d’années. Dans la plupart des pays en voie de développement, les plantes médicinales constituent, du fait de leur faible coût, le premier choix pour la population. Selon l’OMS, environ 80% de la population des pays en développement dépend de la médecine traditionnelle et 90% des remèdes utilisés en médecine traditionnelle sont basés sur des plantes médicinales [2]. À Madagascar, le taux de mortalité maternelle est resté quasi stationnaire depuis des dizaines d’années. Il est estimé à 478 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes pour la période 2006-2013. La mortalité maternelle est un indicateur révélateur de l’accès des femmes aux soins de santé et de la réponse du système de santé à leurs besoins [3]. En 2014, le Ministère de la Santé Publique (MSANP) de Madagascar a recensé 15 164 agents fonctionnaires composés de 26,03 % de médecins, 37,90 % de paramédicaux, 16,55 % d’agents administratifs et 19,56 % de personnel d’appui. La moyenne nationale en ratio médecin public par habitant était de 1/10 500 en 2014, proche de celle préconisée par l’OMS qui est de un médecin pour 10 000 habitants mais ce ratio masque d’importantes disparités inter régionales. D’après l’estimation de l’OMS,un ratio de 2,3 agents de santé (médecins, infirmiers, sagefemmes) qualifiés pour 1 000 habitants, est nécessaire pour atteindre une couverture de 80 % des accouchements [4]. Devant une offre insuffisante de services de santé, la médecine traditionnelle est parfois l’unique moyen pour accéder à de soins accessibles. Souvent, les coûts des prestations médicales sont tellement élevés que la population n’a d’autre issu que de se tourner vers la médecine traditionnelle. L’utilisation de plantes médicinales par les femmes est fréquente dans les pays d’Afrique et à Madagascar. Parmi les nombreuses habitudes, croyances et rituels autour de la grossesse et de la naissance, la place qu’occupent les plantes médicinales est primordiale dans plusieurs pays à faible revenu. Les plantes sont largement utilisées dans des conditions liées à la santé des femmes comme la fertilité féminine, la ménorrhée, le contrôle des naissances, la grossesse, la naissance (parturition), en post-partum pour favoriser la lactation, pour les soins des nourrissons et pour les soins du visage et du corps. Ces pratiques ont été documentées pour divers groupes ethniques en Afrique [5]. L’utilisation des plantes médicinales fait partie du quotidien notamment en milieu rural. En dépit des avancées spectaculaires de la médecine moderne, la médecine traditionnelle basée sur des plantes n’a eu de cesser de raviver l’intérêt qu’elle a sur la santé à travers les continents. Mais les plantes médicinales sont utilisées d’une manière empirique et il n’y a pas de documentations disponibles concernant leurs utilisations chez la femme enceinte et les connaissances transmises de bouche à oreille par les anciens tendent à disparaître ou à se différencier de leurs versions originales décrites comme une érosion des connaissances observée dans le monde entier. Toutefois, il a été constaté que dans certaines régions de Madagascar, l’utilisation de plantes pour les soins du système reproductif est largement pratiquée et vient en seconde position après les soins du système digestif [6]. La littérature traitant les plantes médicinales à travers le monde est très riche à l’heure actuelle. De longues listes de plantes avaient été utilisées en médecine traditionnelle. Parmi les multitudes d’articles scientifiques rapportant la richesse des plantes médicinales, une faible proportion a été axée sur les soins du système de reproduction et très peu avaient interrogé directement les femmes à ce propos. La revue systématique de littérature conduite par van Andel et al., en 2014, faisait l’inventaire de tous les articles sur les plantes utilisées pour traiter les problèmes de menstruation et a identifié 2 000 espèces de plantes sur le sujet en Amérique Latine, aux Caraïbes, en Asie et en Afrique [7]. Une autre revue systématique de littérature menée au Brésil, en 2016, sur l’utilisation de plantes médicinales pour les traitements des conditions liées à la maternité, à la menstruation, a recensé 343 articles qui avaient répondu aux critères d’inclusion de la revue, et parmi ces articles, 99 traitaient de plantes sur la menstruation et 99 autres sur la maternité. La famille de plantes les plus utilisées était la Fabiaceae, la partie des plantes la plus utilisée était les feuilles et la voie d’administration la plus pratiquée était la voie orale [8]. Une plus récente revue systématique de littérature conduite par Ahmed et al. , publiée en 2018, faisait la synthèse d’articles sur l’utilisation de plantes médicinales par des femmes enceintes en Afrique. Au total 3 659 articles ont été recensés parmi lesquels, une centaine ont répondu aux critères dont 56 % étaient spécifiquement écrits sur l’utilisation de plantes médicinales par les femmes enceintes. Ces femmes utilisaient les plantes médicinales plus fréquemment contre la nausée et pour stimuler le travail afin de faciliter la délivrance [9]. L’utilisation de plantes pendant la grossesse est commune en Afrique et à Madagascar. Classée selon les catégories, l’utilisation de plantes durant la grossesse commence à être documentée [10-18]. D’autres études étaient menées sur l’utilisation des plantes sur le système reproductif en général [19, 20]. Aussi loin qu’on puisse chercher dans l’historique des plantes médicinales à Madagascar, le premier essai d’inventaire des plantes datait de 1986 [21]. Madagascar est dotée d’une flore unique d’importance mondiale, riche pour sa biodiversité, son endémicité et leur utilisation éthnomédicale avec environ plus de 13 000 espèces dont 80 % sont endémiques et 3 500 environ sont rapportées comme ayant des propriétés médicinales, possédant des vertus thérapeutiques [22]. Une étude menée dans la région Mahafaly, une région frontalière avec celle de l’Androy, et ayant les mêmes conditions climatiques, avait rapporté que les plantes médicinales constituaient pour la population les premiers recours pour les besoins en soins de santé [23]. De nombreuses publications sur les plantes médicinales étaient sorties mais la place d’articles sur les plantes utilisées pour les conditions de santé de la femme et rapportées par les femmes elles-mêmes restent peu fréquentes [24, 25, 26]. Pourtant, des études avaient identifié que les femmes utilisaient plus de plantes médicinales que les hommes et connaissaient mieux les plantes médicinales, leur identification, leurs usages et d’autant plus quand il s’agissait de plantes à usage ciblant les conditions de santé des femmes [27, 28]. Hypothèse de la présente étude: les femmes de la région Androy utiliseraient des plantes médicinales pour les soins de santé durant la période de grossesse, après l’accouchement et ainsi que pour leurs enfants. L’étude avait pour but de déterminer les habitudes de soins de santé par les plantes médicinales durant la grossesse et après accouchement. Les objectifs spécifiques étaient de décrire les habitudes d’utilisation de plantes dans le traitement des affections liées à la maternité et aux autres particularités de la santé des femmes etd’identifier les plantes les plus appliquées par les femmes enceintes et accouchées.
MÉTHODE
Il s’agissait d’une étude transversale basée sur interview menée face-à-face auprès des femmes enceintes. L’étude était menée dans la région de l’Androy située à l’extrême sud de Madagascar (figure 1). Le climat y est semi-désertique avec une faible pluviométrie et la région est assujettie à des périodes de famine à répétition.
L’étude a été menée dans sept centres de santé publics dont un centre hospitalier de référence régionale et six centres de santé de base de niveau-II. Population d’étude : Les données étaient collectées auprès de 200 femmes enceintes vues en première Consultation Pré-Natale (CPN). Ont été inclues dans cette étude, toutes femmes enceintes, acceptant volontairement de participer à l’étude, habitant en permanence dans la Région de l’Androy. Les femmes qui étaient seulement de passage dans la Région de l’Androy, n’étaient pas incluses dans l’étude. L’échantillonnage probabiliste était appliqué utilisant des quotas par district. Les centres de santé constituaient les strates et ils ont été choisis par convenance. Collecte des données : Un questionnaire semi-structuré à réponses ouvertes était administré aux femmes qui avaient consenti à participer à l’étude. Le questionnaire était élaboré spécialement pour la description des plantes, leurs indications, leurs modes de préparation et leurs modes d’administration selon les femmes interviewées. Le nom scientifique des plantes était obtenu grâce à la collaboration avec le Centre Universitaire Régional de l’Androy (CURA). Ensuite la liste des plantes médicinales évoquées par les femmes était comparée avec les données de la littérature. Analyse statistique : L’étude a utilisé l’analyse bivariée pour décrire l’utilisation de plantes médicinales en fonction des caractéristiques socio-démographiques. Le test de khi2 était utilisé et la valeur critique était établie à p<0,05. Ils existent plusieurs indices pour estimer la connaissance des répondantes sur les plantes utilisées. Toutefois, l’indice le plus simple utilisé était le calcul de la fréquence de citation c’est–à–dire le nombre d’informations qui mentionnent une espèce de plantes donnée. Ainsi, l’analyse a utilisé l’indice Relative Frequency of Citation ou RFC. La fréquence relative de citation ou RFC était calculée en divisant la fréquence de citation (FC) qui représente le nombre de femmes qui avaient cité la plante en question par le nombre total de répondantes ou participantes à l’étude (N) soit RFC=FC/N. La valeur de l’indice varie de 0 (personne n’a cité la plante) et 1 si la répondante l’a citée.
RÉSULTATS
Interrogées sur leurs habitudes liées à la grossesse, à l’allaitement et aux soins de santé après l’accouchement, les femmes de cette étude avaient rapporté l’utilisation de plantes médicinales. Plusieurs femmes enceintes (53,0 %) interviewées pendant les consultations prénatales, avaient déclaré qu’elles utilisaient des plantes en complément des soins modernes préconisés par les personnels de santé.
Tableau 1 : Utilisation de plantes médicinales en rapport avec les caractéristiques socio-démographiques
Caractéristiques
sociodémographiques
Utilisation de plantes
médicinales
p
OUI (n=106)
NON (n=94)
Urbanisation
0,000***
- Urbain
35(35,4)
64(64,6)
- Rural
71(70,3)
30(29,7)
- Total
106(53,0)
94(47,0)
Niveau d’étude
0,007**
- Illettrée
32(61,5)
20(38,5)
- Primaire
40(42,1)
55(57,9)
- secondaire et plus
34(59,7)
19(33,3)
Groupe d’âge
>0,05
- moins de 24ans
53(53,5)
46(46,5)
- 25-34ans
34(50,7)
33(49,3)
- 35ans et plus
19(55,9)
15(44,1)
Statut marital
0,197
- Célibataire
23(60,5)
15(39,5)
- Mariée
83(51,2)
79(48,8)
Parité
0,003**
- Primipare
16(84,2)
3(15,8)
- Multipare
90(49,7)
91(50,3)
Le tableau 1 décrit la distribution de l’utilisation de plantes médicinales selon le groupe d’âge, le niveau d’éducation, l’état marital, l’urbanisation, et la parité. D’après ce tableau, les femmes enceintes interviewées, vivant en milieu rural, celles de niveau primaire d’éducation, et les multipares étaient les plus nombreuses à déclarer utiliser des plantes médicinales. La différence était statistiquement significative (p<0,01). Les femmes vivant en milieu rural (67,0%) utilisaient plus de plantes médicinales comparées aux femmes du milieu urbain (33,0%) avec une différence statistiquement significative (p<0,001). Il en est de même pour les femmes de faible niveau d’éducation (61,5%) comparées à celles de niveau d’éducation plus élevé et la différence était significative (p<0,01). D’après ce tableau, l’utilisation de plantes médicinales ne dépendait pas ni de groupe d’âge, ni de l’état matrimonial (p>0,05). La comparaison en fonction du nombre d’enfants avait montré que les femmes multipares (84,9%) étaient plus nombreuses que celles primipares (15,1%) à utiliser des plantes médicinales avec une différence statistiquement significative (p<0,01).
Le tableau 2 présente les types de plantes utilisées par les participantes et leurs modes d’administration. Au total 18 espèces de plantes ont été citées par les femmes. La partie de la plante la plus utilisée était la feuille (38,9%) suivie par la tige (22,2%) ou quelque fois les deux parties en même temps (feuilles + tiges) (16,7%). L’écorce des plantes était également utilisée dans 22,2% des cas et les racines rarement (5,5%). La mode de préparation la plus pratiquée était la décoction (83,3%) et la voie d’administration la plus utilisée était la voie orale (88,9%). La plus fréquente indication d’utilisation était :pour la prévention des infections, pour fortifier ou renforcer la résistance physique, pour faciliter le travail, et pour lutter contre la nausée. Les trois plantes les plus citées étaient le Morongo (Moringa oleifera Lam.) citées par 22,6% des participantes pour se soulager du vertige et de l’hypertension ; le Tamboro (Paederia grandidieri Drake) (14,2%) pris comme anti-infectieux et fortifiant ; et le Kinagna (Ricinus Commuis L.)(12,3%) comme myorelaxant. Six autres plantes étaient utilisées par les femmes enceintes interviewées comme anti infectieux le Tohitohy (Cissus Bosseri Desc), le Fandreandambo (Physena sessiliflora Tul), le Taritarike (Leptadenia Madagascariensis Decne), Voanio(Cocos nucifera L.), Tongatse (Catharanthus roseus (L.) G.Don et Lahivozake (Pouzolzia gaudichaudii Leandri). Certaines plantes citées étaient utilisées beaucoup plus pour usage externe, notamment pour l’entretien de la peau en application sur le visage avant, pendant et après accouchement ainsi que pour la toilette intime après accouchement, comme le Katrafae (Cedrelopsis grevei Baill. & Courchet), l’Azagne(Ravenea Xerophilla Jum)., et le Fihamy (Ficus grevei Bail). Cette dernière plante était utilisée par les répondantes comme anti-rides et anti-tâches. Une seule plante, le Hazomena (Securinega capuronii Leandri) était utilisée comme anti hémorragique, mais avait été citée par une seule femme. Le tableau 3 montre la comparaison de la liste des plantes médicinales évoquées par les femmes avec les documents publiés dans la littérature. Les auteurs, le titre de l’ouvrage respectif et la conclusion sur l’utilisation de chaque plante y sont présentés. L’utilisation de huit plantes sur les dix huit citées par les femmes avait été identifiée dans la littérature.
DISCUSSION
Le but de l’étude était de déterminer les habitudes de soins de santé des femmes d’Androy par l’utilisation de plantes médicinales durant la grossesse et après l’accouchement. Près des deux tiers des femmes interviewées avaient rapporté l’utilisation de plantes médicinales. Au Mali, malgré la disponibilité de structure médicale moderne, 80 % des femmes utilisaient des plantes médicinales pour leurs maux [6]. Les résultats des études menées dans d’autres pays en développement diffèrent quelque peu en pourcentage d’utilisation, 55% en Afrique du sud [17], 68% au Nigeria [11]. Les plantes médicinales jouent un rôle important dans les soins de santé des femmes pour de nombreuses régions rurales du monde. Cette dépendance des femmes aux plantes médicinales était constatée aussi chez des populations autochtones dans divers régions du monde : en Asie du sud [10], au Cameroun [14], en Iran en Amérique Latine, aux Caraïbes, en Afrique sub-saharienne [7], et en Arabie Saoudite (La Mecque) [27].
Tableau 2 : Type de plantes utilisées, indication d’utilisation, mode de préparation et d’administration
Plante (nom scientifique)
Dénomination locale
RFC N (%)
Indication d’utilisation
Partie de la plante utilisée
Mode de préparation et période d’administration
1.Moringa oleifera Lam. Fam. Moringaceae
Morongo
24 (22,6)
Anti-vertigineux, antihypertenseur
Feuilles
En décoction, à boire après l’accouchement
2. Paederia grandidieri Drake Fam. Rubiaceae
Tamboro
15 (14,2)
Anti-infectieux, fortifiant
Feuilles
En décoction, à boire à volonté après l’accouchement
3. Ricinus Communis L. Fam. Euphorbiaceae
Kinanga
13 (12,3)
Myorelaxant
Feuilles et tiges
En décoction, utilisé pour la toilette intime après l’accouchement
4. Cissus Bosseri Desc Fam. Vitaceae
Tohitohy
8 (7,5)
Anti-infectieux
Feuilles
En décoction, à boire à volonté après l’accouchement
Tableau 3 : Evaluation et comparaison de la liste des plantes médicinales évoquées par les femmes avec les données publiées dans la littérature
Plantes
Auteurs
Titre de l’article ou de l’ouvrage
Conclusion des auteurs sur l’utilisation
1. Moringa oleifera Lam.
Senan et al.
Anti-hypertensive effect of Moringa Oleifera Lam. Leaves decoction : a pilot study
L’étude a prouvé que la décoction de feuilles de Moringa Oliefera Lam est efficace dans la réduction de la pression artérielle.
Acuram LK et al.
Anti-hypertensive effect of Moringa Oleifera Lam.
Même conclusion
Fombang et al.
Management of hypertension in normal and obese hypertensive patients through supplementation with Moringa Oleifera Lam leaf powder.
La poudre de feuilles de Moringa Oleifera peut être utilisée comme hypotensive dans la gestion de l’hypertension.
Sindhu et al.
Efficacy of Moringa Oleifera in treating iron deficiency anemia in women of reproductive age group
Moringa Oleifera est bénéfique pour les femmes enceintes, pour le traitement de l’anémie.
2. Paederia grandidieri Drake
Randrianarivony et al.
Useful plants and tradition for pregnancy, child delivery and for post-partum care used by people living around Analavelona forest in South west Madagascar
Plante médicinale utilisée également par les femmes durant la grossesse, pendant et après l’accouchement, dans la région du Sud-Est de Madagascar
Andriamparany et al.
Effects of socio-economic household characteristics on traditional knowledge and usage of wild yams and medicinal plants in the Mahafaly region of South-western, Madagascar.
Citée parmi les plantes médicinales de la région Mahafaly du sud-de Madagascar.
3. Ricinus Communis L.
Gallé et al.
Quelques plantes employées dans le SudOuest de Madagascar Ethnobotanique / Monographies scientifiques
La 1ère semaine après l’accouchement, les femmes effectuent un bain avec la décoction de feuilles de Ricinus communis. De tel bain est utilisé aussi pour soulager les douleurs (musculaies, pneumonie) et pour les « problèmes de fontanelle » (déshydratation aiguë) chez le nourrisson.
Makonnen et al.
Antifertility activity of Ricinus communis seed in female guinea pigs.
Ricinus communis possède un effet anti-fertilité chez les cobayes femelles.
4. Cedrelopsis grevei Baill. & Courchet
Gallé et al.
Quelques plantes employées dans le SudOuest de Madagascar Ethnobotanique / Monographies scientifiques.
La décoction de l’écorce jeune aussi appelée olikolike est bue après l’accouchement pour arrêter les hémorragies. Elle est également utilisée en bain, pour aider à nettoyer l’utérus
Razafindraibe et al.
Medicinal plants used by women from Agnalazaha littoral forest (Southeastern Madagascar).
Pour soigner les douleurs d’estomac( feuilles en décoction)
5. Ocimum canum Sims
Gallé et al.
Quelques plantes employées dans le Sud-Ouest de Madagascar Ethnobotanique / Monographies scientifiques
La décoction est utilisée chez la femme après l’accouchement
6. Leptadenia madagascariensis Decne
Gallé et al.
Quelques plantes employées dans le SudOuest de Madagascar Ethnobotanique / Monographies scientifiques
Décoction des racines ou des tiges âgées proposée à la femme qui vient d’accoucher pour faciliter les lochies et nettoyer l’utérus et soulager les règles douloureuses. Déconseillée à la femme enceinte.
7. Catharanthus roseus (L.) G. Don
Gallé et al.
Quelques plantes employées dans le SudOuest de Madagascar Ethnobotanique / Monographies scientifiques
La décoction de la racine et le jus des feuilles fraîches sont utilisés pour soigner les plaies.
8. Cocos nucifera Linn
Esquenazi et al.
Antimicrobial and antiviral activities of polyphenolics from Cocos nucifera Linn. (Palmae) husk fiber extract
Anti infectieux. L'extrait aqueux obtenu à partir de la fibre de noix de coco et les fractions de la chromatographie d'adsorption ont révélé une activité antimicrobienne contre le Staphylococcus aureus.
Les résultats de la présente étude ont montré que plus de la moitié des femmes enceintes interrogées avaient rapporté utiliser des plantes médicinales durant la grossesse et après l’accouchement. Toutes les catégories sociales, mariées ou non, éduquées ou pas, tous les groupes d’âge, vivant en milieu urbain ou rural utilisaient des plantes médicinales à diverses proportions. Sauf que les effets de la majorité de ces plantes utilisées sur la santé de la mère ou du fœtus n’ont pas été encore élucidés du point de vue toxicologique et on ignore leur efficacité et on ne peut pas ainsi garantir leur innocuité [7, 9]. La place de la femme dans l’utilisation, l’identification, le choix de ces plantes semble être de tradition. Certains auteurs ont conclu que si les femmes ne sont pas les réservoirs de connaissances de plantes médicinales, dans tous les cas, elles étaient plus familières aussi bien aux terrains qu’à l’identification des plantes et à la valeur médicinale de la flore locale que les hommes [25, 29]. Les femmes interrogées lors de la présente étude utilisaient des plantes pour faciliter l’accouchement, nettoyer l’utérus et le fœtus, prévenir et traiter les infections, renforcer l’organisme et entretenir la peau. Ces mêmes utilisations ont été relatées par les femmes en Afrique. A titre d’exemple, Malan et al., disaient que la plupart des femmes enceintes recourent à la médecine traditionnelle pour assurer le développement du fœtus et faciliter l’accouchement [10]. En Lusaka, Zambie, selon Banda et al., les femmes utilisent les plantes médicinales pour faciliter la délivrance (22 %), et pour nettoyer les fœtus (12%) [12]. L’affirmation a été renforcée par la publication de Peprah et al., dans l’historique de l’usage de plantes médicinales par les femmes enceintes, où les femmes du milieu rural de Ghana avaient déclaré : « Nous sommes rien sans herbes »[29]. Il était en effet constaté, après évaluation des plantes citées par les femmes de la présente étude, que l’utilisation de huit plantes sur les dix huit citées ont pu être confirmées dans la littérature et les indications, modes de préparation et d’administration étaient similaires aux dires des femmes de la présente étude. D’ autres plantes figuraient dans la liste des plantes connues, même si nous n’avions pas trouvé d’articles rapportant leurs utilisations par les femmes en période de maternité. Le Moringa oleifera Lam. était la plante la plus fréquemment citée par les femmes dans cette étude pour soulager les sensations de vertiges et l’hypertension. Le Moringa est l’une des plantes médicinales la plus étudiée dans la littérature. C’est une plante aux multiples propriétés. En plus de son pouvoir nutritif unanimement reconnu, son utilisation pour réduire la pression artérielle, comme les répondantes l’ont évoquée dans la présente étude, a été confirmée dans la littérature. Plusieurs auteurs tels que Acuram LK et al., Senan et al., et Fombang et al., avaient rapporté également l’effet anti-hypotenseur du Moringa oleifera Lam. [30, 31, 32] et la plante semble également être efficace pour traiter l’anémie Sindhu et al.[33], d’où sa propriété de fortifiant évoquée par certaines répondantes.
L’effet bénéfique du Moringa oleifera Lam a été confirmé par plusieurs auteurs, en particulier son introduction dans la lutte contre la malnutrition, en rapportant que cette plante est le plus bon marché et le plus crédible alternative pour pourvoir de bonne nutrition [34, 35, 36]. Non seulement l’arbre Moringa Oleifera est extraordinaire du fait que toutes les parties de l’arbre sont utiles mais l’aspect le plus étonnant de l’arbre est sa très haute valeur nutritive. Les feuilles sont sources de vitamine A, vitamine B, vitamine C et autres minéraux [34]. Les feuilles étaient la partie la plus utilisée soit brutes et en décoction soit sous forme de poudre. Toutefois, malgré les nombreux autres effets positifs du Moringa oleifera Lam pour la santé, (anticoagulant; antidiabétique, anticancéreux potentiels, anti-inflammatoires, antimicrobiens, antioxydant), des chercheurs qui l’ont testé sur des rats de laboratoire, ont rapporté également son action contraceptive probable et émettaient des réserves quand à son utilisation chez les femmes enceintes. Les auteurs avaient conclu que les feuilles de M. oleifera peuvent ne pas être sécuritaires à la conception et pendant la grossesse [37, 38].
La seconde plante la plus citée par les répondantes, le Paederia grandidieri Drake, a déjà été identifié par des chercheurs (Gallé et al.) à Madagascar dans leur recensement de plantes médicinales sans donner de précisions sur leurs effets ni indications précises sur la santé reproductive des femmes [39]. Randrianarivony et al., et Andriamparany et al., ont évoqué l’utilisation et l’effet bénéfique du Paederia grandidieri Drake de la famille Rubiaceae comme plantes médicinales [16, 23]. Cette plante est très utilisée par les femmes de la région du sud-ouest de Madagascar pour des soins prénataux, les feuilles en décoction administrée par voie orale[23]. Dans la présente étude, le Ricinus communis L., troisième plante la plus citée, était utilisée comme myorelaxant. En décoction, les feuilles et tiges de Ricinus communis L ou Kinagna étaient utilisées pour la toilette intime habituellement avant et après l’accouchement. Gallé et al., ont rapporté que la première semaine après l’accouchement, les femmes avaient l’habitude de prendre un bain avec la décoction de feuilles de Kinagna (Ricinus communis) et que cette décoction des feuilles est utilisée également pour soulager les douleurs (musculaires, coups, pneumonie)[39]. Toutefois, Makonnen et al., en 1999, avaient émis des réserves quand à son utilisation chez les femmes enceintes car ils avaient identifié que le Ricinus communis possède un effet anti-fertilité chez les cobayes femelles [40]. Par contre, les femmes de la présente étude n’avaient pas mentionné que le Ricinus communis avait une activité anti fertilité et que cette plante est donnée aux femmes accouchées après la naissance de l’enfant et également pour faciliter l’accouchement avant la naissance de l’enfant comme, Gallé et al. et Makonnen et al., l’avaient rapportée [39, 40]. Les femmes enceintes de l’Asie du Sud-est avaient également cité l’utilisation de Ricinus communis (Boer HJ et al.) [41]. En usage externe, les fruits de Ricinus communis, par pression à chaud, sont utilisés pour fabriquer de l’huile (Oleum Ricin) pour les cheveux. L’huile de ricin est également utilisée en massage sur la fontanelle, dans le cas de « problèmes de fontanelle » (déshydratation aiguë) chez le nourrisson [39]. D’après la revue systématique de littérature menée par Scarpa A et al., les auteurs ont trouvé que l’huile de ricin est laxative, utilisée pour soulager de constipation aiguë et possède des propriétés pour soigner bien d’autres maladies [42]. L’activité anti-inflammatoire de l’huile de ricin a été relatée par l’OMS, dans le quatrième volume de monographie des plantes médicinales [43]. Mais l’huile de ricin semble être contre-indiquée aux femmes enceintes avant la 40ème semaine de gestation pour éviter le risque d’accouchement prématuré. Elle risque d’accélérer le travail [42]. Aucune publication scientifique n’a été trouvée sur l’utilisation de Cissus Bosseri Desc de la Famille de Vitaceae par les femmes. Par contre, le Cedrelopsis grevei ou Katrafay, citée en cinquième position de fréquence par les femmes enceintes interrogées, son écorce, préparée en décoction, était bue pour nettoyer l’utérus et également comme fortifiant. Le bain de la décoction des feuilles est aussi utilisé pour soulager les douleurs (musculaires, coups, pneumonie) ainsi que pour la toilette intime. Cette mode d’utilisation a été mise en lumière par des auteurs tels que Razafindraibe M et al., Gallé et al., dans leur étude respective [6, 39]. Outre l’usage comme antihémorragique [37] et anti-acidité gastrique (douleur d’estomac) [6] du Cedrelopsis grevei Baill. & Courchet, cette plante a été utilisée comme fortifiant par les femmes enceintes. Dans la publication de Randrianarivony TN, la plante Cedrelopsis grevei était la plante médicinale la plus fréquemment citée par la population d’étude de la partie Sud-est de Madagascar [24]. Les femmes enceintes de cette étude avaient cité les mêmes indications, antiémétique et anti-nauséeux que celles trouvées dans la littérature pour l’Ocimum canum Sims, sixième plante la plus citée dans cette étude. [37]. Selon Gallé et al., les feuilles de Ocimum canun servent à réaliser des inhalations en cas de maux de gorge et la décoction est utilisée chez la femme après l’accouchement [39]. Dans le même ouvrage, Gallé et al. décrivaient le Leptadenia madagascariensis Decne utilisé en décoction des racines ou des tiges âgées et proposé à la femme qui vient d’accoucher pour faciliter les lochies et nettoyer l’utérus et il est utilisé également pour soulager les règles douloureuses. Cette plante est toutefois déconseillée à la femme enceinte. Les femmes de cette étude utilisaient cette plante en usage externe uniquement. Elles avaient l’habitude de se doucher avec l’eau de décoction, après l’accouchement, en tant qu’anti-infectieux [39] Les femmes enceintes interviewées dans la présente étude avaient également déclaré utiliser de décoction préparée à partir de l’écorce de la noix du Cocos nucifera Linn comme antiseptique. En effet, d’après Gallé et al., l’extrait aqueux obtenu à partir de la fibre de noix de coco a révélé une activité antimicrobienne contre le Staphylococcus aureus [44]. Nous n’avions pas pu vérifier par la littérature, l’utilisation des dix autres plantes citées dans cette étude .
La présente étude avait quelques limites : elle était menée dans quatre districts de la région d’Androy et les résultats obtenus peuvent ne pas être généralisables. Mais puisque la population Malagasy a l’habitude d’utiliser des plantes médicinales, il est fort probable que des espèces de plantes similaires soient utilisées par les femmes des autres régions mais cela est à confirmer par une étude future plus élargie. Comme il s’agissait d’une étude descriptive transversale basée sur l’inventaire de ce que les femmes enceintes ont l’habitude d’utiliser comme plantes médicinales, les résultats peuvent souffrir de manque de preuves scientifiquement reconnus notamment concernant les effets négatifs de ces plantes sur la santé du fœtus et celle de la mère. Les produits à base de plantes sont habituellement considérées comme sains car ils sont naturels mais il n’est pas prouvé que tout ce qui naturel est toujours inoffensif pour la santé.
Conclusion : Madagascar est connu pour la richesse de sa biodiversité. L’utilisation de plantes médicinales par les femmes est bien documentée pour certaines aires géographiques. Cependant de nombreuses espèces de plantes médicinales sont peu étudiées et les effets tératogènes sur le fœtus sont encore non élucidés. Bien que les femmes interviewées n’aient pas rapporté des effets négatifs de ces plantes sur leur santé, on en sait peu sur leur sécurité pendant la grossesse. Ces plantes sont –elles inoffensives pour les femmes et les fœtus ? [45] ou courent-elles des risques inutiles en les prenant ? [46].
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Article mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution – Pas d’utilisation commerciale – 4.0 International
1École Doctorale Nutrition-Environnement-Santé, Université de Mahajanga, Madagascar.
2 Laboratoire d’Epidémiologie et de Biostatistique en Santé des Populations
En 2000 les Nations Unies ont fixé les Objectifs du Millénaire pour le Développement qui incluait l’amélioration de la santé Maternelle en réduisant le taux de mortalité maternelle de 75 pourcent pour l’an 2015. L’utilisation des services de santé maternelle était l’une des activités clés pour atteindre cet objectif. A la fin de 2015 peu de pays avaient atteint cet objectif. Les services de santé maternelle restaient faiblement utilisées. Cette étude avait pour but de faire la synthèse de la littérature sur les barrières perçues par les femme enceintes et accouchées, à l’utilisation des services de santé maternelle. Méthode : Une revue systématique de la littérature publiée de 2015 à 2019 était menée. La recherche électronique et manuelle des articles se faisait en utilisant des mots-clés pour identifier les articles. Toutes les méthodes d’étude: qualitative, quantitative et mixte étaient considérées. Une synthèse était effectuée pour mettre en évidence les barrières les plus soulevées par les auteurs. Résultats : 92 articles ont répondu aux critères d’inclusion. Pour les pays d’Afrique les principales barrières restaient le faible niveau d’éducation, le faible revenu des ménages, les facteurs géographiques, le manque de connaissances en santé maternelle et d’informations, les facteurs liés au système de santé et les facteurs socio-culturels. Pour les pays développés, il s’agissait de problèmes liés à l’immigration. Ainsi cette revue a également permis de voir l’émergence d’autres types d’obstacles à l’utilisation des centres de santé maternelle qui n’étaient pas signalés avant 2015, tels que les problèmes spécifiques des femmes déplacées et immigrées dans les pays développés hôtes. Conclusion : Beaucoup de facteurs restent non résolus. Les décideurs en santé devraient tenir compte de ces facteurs dans les nouvelles stratégies d’amélioration de l’utilisation des services de santé maternelle. Mots-clés : barrières OU déterminants OU facteurs de risque ; utilisation des services de santé maternelle OU soins prénatals OU soins postnatals ; perceptions des femmes enceintes et ou accouchées
Abstract :
In 2000, the United Nations set the Millennium Development Goals that includes the improvement of maternal health by reducing the maternal mortality ratio by 75% in 2015. The use of maternal healthcare services was one of the key activities to reach that target. Though at the end of 2015, few countries have reached it and the use of maternal healthcare services remained inappropriate. The main objectives of this study was to synthesize 2015-2019 published literature that had examined the barriers to the use of maternal healthcare services that pregnant women and those who have just given birth perceived. Methods:A systematic review of literature that was published between 2015 and 2019 was undertaken. Manual and automatic research of articles using keywords was used to identify articles about the barriers to the use of maternal healthcare services. All methods – qualitative, quantitative and mix – were considered. Then a synthesis was done to highlight the barriers that are the most raised by the authors. Results: 92 articles matched the inclusion criteria. For countries in Africa, the main barriers remained the low level of education, low household income, geographical factors, lack of knowledge in maternal healthcare, lack of information, health system linked factors and socio-cultural factors. For developed countries, it mainly consists in immigration related issues. Also, this review study has revealed other kind of obstacles to the use of maternal healthcare services that were not common before 2015, such as the specific issues of displaced women and migrants in the host developed countries. Conclusion: Lots of factors remain unresolved. Decision makers in heath sector shall take account of these factors in the new strategies aiming to improve the use of maternal healthcare services.
Keywords: barriers OR determinants OR risk factors; maternal health services use; prenatal care use; postnatal care; pregnant women’s perceptions
Comment citer cet article : Ramamonjisoa BC, Ravelomanatsoa JJ, Rajabo A. Barrières à l’utilisation des services de santé maternelle : revue systématique de littérature. Revue Sc. Santé 2020;1:31-44
INTRODUCTION
L’OMS définit la mortalité maternelle comme étant le décès d’une femme survenu au cours de la grossesse ou dans un délai de 42 jours après la fin de la grossesse, quels que soit la durée et le site de la grossesse, pour toute cause liée ou aggravée par la grossesse ou sa prise en charge, mais qui n’est pas de causes accidentelles ni fortuites. Cette définition a été simplifiée en ces termes : « le décès lié à la grossesse est défini comme le décès d’une femme enceinte ou dans les 42 jours suivant la fin de la grossesse, quelle que soit la cause du décès » [1]. Selon les statistiques de l’OMS, entre 1990 et 2015, le taux mondial de mortalité maternelle (soit le nombre de décès maternels pour 100 000 naissances vivantes) n’a connu qu’une faible diminution de 2,3% par an. En 2015, 303 000 femmes sont décédées pendant ou après la grossesse ou lors de l’accouchement. Une grande partie de ces décès se sont produits dans les pays à faible revenu. En effet, le ratio de mortalité maternelle dans les pays en développement était, en 2015, de 239 pour 100 000 naissances, contre 12 pour 100 000 dans les pays développés. Les causes de décès sont multiples. Les principales complications survenant lors de l’accouchement représentent 75% de l’ensemble des décès maternels. Ces complications sont les suivantes: hémorragie sévère (pour l’essentiel après l’accouchement); infections (habituellement après l’accouchement); hypertension durant la grossesse (pré éclampsie et éclampsie); complications dues à l’accouchement; avortement pratiqué dans de mauvaises conditions de sécurité. Les autres causes de complications sont associées à des maladies comme le paludisme, et le VIH durant la grossesse [2]. La grande majorité de ces décès maternels auraient pu être évités si les femmes avaient accès à des soins médicaux de base pendant la grossesse, l’accouchement et en post-partum [3]. La littérature rapporte que, dans toutes les régions du monde, la plus lourde charge de morbidité maternelle et infantile se concentrent dans les pays où les systèmes de santé sont faibles et les services non disponibles ou inexistants [4]. Selon Law JE et al., l’accès inadéquat aux soins prénatals de qualité contribue significativement à ces décès maternels pourtant évitables. [5] Il est largement admis que le recours aux services de santé maternelle contribue à réduire la morbidité et la mortalité maternelles. L’utilisation des services de soins prénatales permet aux femmes enceintes et à leurs familles de s’informer sur les signes et symptômes de danger concernant les risques de l’accouchement, et d’obtenir des conseils sur les avantages de choisir un accouchement sous assistance médicale et sur les mesures préventives nécessaires telles que les vaccins et autres soins de santé.
A titre d’exemple, le vaccin antitétanique effectué pendant la grossesse peut sauver la vie de la mère et celle du nouveau-né. La prévention et le traitement du paludisme ainsi que la prise en charge de l’anémie chez les femmes enceintes peuvent améliorer la santé maternelle [6]. Toutefois, malgré les efforts déployés pour améliorer les accueils dans les centres de santé, toutes les femmes enceintes n’utilisent pas les services de santé maternelle. [7].
Les données statistiques de 2000-2001 avaient montré que plus de 70% des femmes dans le monde avait fait au moins une visite anténatale avec un personnel de santé qualifié pendant la grossesse. Le taux national était de 73% pour Madagascar [9]. Pourtant, l’OMS recommande quatre soins prénatals à faire pendant la grossesse pour la majorité des femmes enceintes sans complication [8]. En septembre 2000 à New York, une importante réunion des chefs d’états (191 pays) et des grandes institutions de l’ONU adopte la Déclaration du Millénaire qui a été transformée en 8 Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) à atteindre en 2015. L’OMD numéro 5 concernait la Santé de la Mère et visait à réduire de trois quarts le taux de mortalité maternelle (MM) entre 1990 et 2015 [9]. L’accès universel à des visites prénatales était un des indicateurs clés pour atteindre l’objectif N°5 des OMD [10]. L’OMS avait fait la promotion d’un paquet d’interventions fondées sur des preuves probantes de quatre visites prénatales axées sur les objectifs. Celles-ci connues sous le terme de Consultations Prénatales (CPN) [11]. En 2015 à la fin de l’OMD, l’évaluation de l’objectif numéro 5 avait rapporté que « grâce aux OMD, plus de femmes bénéficiaient d’une assistance médicale et des soins nécessaires, pendant leur grossesse et après l’accouchement. Dans le monde le taux de mortalité maternelle a été réduit de près de moitié, et aujourd’hui les ¾ des naissances se déroulent en présence de personnel de santé de qualité ». Il importe de souligner que 99% des 289.000 décès se sont produits dans les pays en développement, plus de la moitié du total de ces décès maternels ont eu lieu en Afrique Sub-saharienne et environ un quart en Asie du Sud. Grâce aux progrès réalisés dans ces deux régions les plus touchées, le taux de mortalité a été réduit, pour l’Asie du sud, de 550 pour 100.000 naissances vivantes en 1990 à 190 en 2013, soit une réduction de 65%, et de près de 50% en Afrique Sub-saharienne la même année. Ces réussites sont faibles par rapport à l’objectif fixé par le numéro 5 de l’OMD, qui visait une réduction des décès maternels de 75% en 2015. [12]. La faible utilisation des services de santé maternelle était une des principales causes de la défaillance de la réalisation des OMD.
Pour répondre à cette problématique, de nombreuses recherches ont été effectuées pour mettre en évidence les facteurs qui influencent négativement l’utilisation des Services de Soins Maternels. La connaissance de ces facteurs devrait permettre d’identifier les interventions les plus adaptées pour la promotion de la Santé maternelle et abaisser ou même éradiquer la mortalité maternelle et infantile. Déterminer les facteurs à l’origine de la non utilisation des services de santé était un challenge que s’étaient fixé de nombreux chercheurs dans le monde. Selon la littérature les facteurs peuvent être d’ordre individuel, sociétal, communautaire et.ou étatique. La revue systématique de littérature menée par Simkhada et al., (2008)., avait identifié comme facteurs les plus souvent cités qui influent sur le recours aux soins prénataux : l’éducation de la mère, l’éducation du mari, l’état civil, la disponibilité, le coût, le revenu du ménage, l’emploi des femmes, l’exposition aux médias, les antécédents de complications obstétriques, les croyances et les idées culturelles sur la grossesse. La parité semblait avoir un effet négatif statistiquement significatif sur la fréquence d’utilisation adéquate des services de santé maternelle. Les femmes dont la parité est élevée avaient tendance à moins recourir aux soins prénatals. D’après les auteurs, il existe une interaction avec l’âge et la religion des femmes. Une seule étude a examiné l’effet de la qualité des services prénataux sur l’utilisation [13]. Les facteurs sus-rapportés par cette revue concernaient les obstacles identifiés avant 2015 et qui ont été pris en comptent pour formuler les recommandations pour les OMD. Les déterminants sont nombreux, variés et susceptibles de changement au fur et à mesures des expériences et nécessitent une actualisation. C’est la raison qui nous a emmenés à faire une nouvelle revue systématique de littérature axée sur la synthèse des études menées de 2015 à 2019. Nous étions partis de l’hypothèse que si on connaît les raisons ou les barrières qui empêchent les femmes d’utiliser les Services de Santé Maternelle (SSM), on pourrait améliorer l’accès aux soins en solutionnant ces barrières.
Le but de cette revue systématique était de faire la synthèse de toute la littérature publiée entre 2015 et 2019 qui avait mené des investigations sur les barrières perçues par les femmes enceintes et accouchées à l’utilisation des services de soins de santé maternelle.
Les objectifs spécifiques étaient d’identifier les articles traitant les barrières à l’utilisation des femmes enceintes ou accouchées des services de consultations prénatales et postnatales ; d’analyser et résumer les principaux déterminants identifiés et de déterminer leurs implications
METHODE :
La recherche d’articles était concentrée sur deux bases de données électroniques internationales : Google Scholar et PubMed en utilisant des combinaisons de mots clés : barrières OU déterminants OU facteurs de risque ; utilisation des services de santé maternelle OU soins prénatals OU soins postnatals ; perceptions des femmes enceintes et ou accouchées
Critères d’inclusion : Les articles originaux publiés entre 2015-2019 rapportant, selon les perceptions des femmes enceintes ou accouchées, les barrières, facteurs, déterminants à l’utilisation de soins de santé maternels (CPN; PNC). Ont été ciblées les femmes enceintes ou accouchées deux ans avant l’enquête ; (ne présentant pas de pathologies (diabètes, HIV, incapacités physiques ou mentales) rapportant les barrières à l’utilisation des services de santé maternelle (SSM). Tous les types d’étude étaient considérés sauf les revues systématiques et méta-analyses. Les langues de publication recherchée étaient le français, et l’anglais ou autre langue si une traduction en anglais ou en français était possible via le site de publication, ou tout article en d’autres langues que le français ou l’anglais mais avec résumé en anglais ou en français accessible.
Ont été exclus, lesarticles publiés avant 2015 et après 2019 ; les revues systématiques de littérature et méta-analyses ; les articles publiés en d’autres langues que le français et l’anglais sans traduction en anglais ou en français du texte ou du résumé.
Processus de sélection : La sélection des articles se déroulait en trois phases : dans la phase 1, les articles étaient sélectionnées à partir du titre et à base des critères d’inclusion et triés par deux chercheurs (RB et RA) séparément. En phase 2, les résumés étaient lus pour évaluer leur éligibilité et ceux qui ne répondaient pas aux critères étaient éliminés ainsi que les doublons. En dernière phase, les articles étaient lus dans leur intégralité et analysés. Les références étaient vérifiées pour identifier d’autres articles à inclure dans la revue. Les articles éligibles ont été classés dans un tableau de synthèse préliminaire constituant le numéro d’identité attribué à l’article au fur et à mesure de son intégration, le nom du premier auteur, l’année de publication, le titre de l’article, le design d’étude suivi, l’échantillonnage, et les principales barrières à l’utilisation des services de soins de santé maternels rapportés et/ou facteurs facilitateurs relatés par les femmes enceintes et accouchées. Pour faciliter la classification et la synthèse des facteurs identifiés dans cette revue, comme étant des barrières à l’utilisation des services de soins maternels [utilisation des CPN, de soins postnatals (PNC), planning familial], le cadre du modèle comportemental d’Andersen [14] était utilisé. Dans ce modèle, les facteurs prédisposant à l’utilisation des services de soins de santé maternelle sont les caractéristiques sociodémographiques telles que l’âge, l’état marital, la parité, le niveau d’éducation de la femme et/ou de son partenaire. Tandis que l’état financier du ménage et le lieu de résidence sont considérés comme des facteurs facilitant les visites des services de soins maternels. Les facteurs de besoins sont la perception, la connaissance de complications de grossesse. Ce sont ces facteurs qui motivent l’utilisation des services de santé maternelle.
Processus d’évaluation des articles et des facteurs identifiés : Les consultations prénatales ou CPN, et les visites postnatales de consultations ou PNC, le planning familial, les vaccins, l’utilisation des services de soins de santé maternelle constituaient les variables dépendantes. La qualité des articles de type quantitatif étaient appréciée si les facteurs associés étaient examinés en utilisant des tests de khi2 et ensuite passés par des analyses multivariées de régression logistique pour déterminer quels facteurs parmi les identifiés étaient les meilleurs pour expliquer et prédire l’utilisation des services. La force d’association était évaluée par l’Odds ratio ajusté à 95% d’Intervalle de Confiance (IC) et une significativité attestée à p<0,05.Les études qualitatives étaient évaluées par la comparabilité de la méthodologie utilisée. L’interview en profondeur ou In-depth Interview (IDI) et discussions en focus groupe (FGDs) étaient priorisés comme méthodes d’enquête. L’analyse thématique était souhaitée.
RESULTATS :
Au total 251 articles ont été identifiés. Après sélection, quinze doublons ont été éliminés et sur les 236 articles restant, 61articles ne relatant pas les barrières (facteurs, déterminants) à l’utilisation des services de santé maternelle étaient exclus de même que les 65 articles dont les dates de publication étaient en dehors de 2015 et de 2019. Après sélection, 110 articles étaient éligibles mais 18 étaient déjà des revues systématiques de littérature et ou méta-analyse. Finalement, 92 articles avaient satisfait aux critères d’inclusion dans cette revue systématique de littérature sur les barrières à l’utilisation des services de soins de santé maternelle. Tous les articles étaient publiés en anglais sauf deux en français.
Identification
Nombre d’articles identifiés à partir des bases de données(N=251)
Sélection
Nombre d’articles restant après avoir éliminé les doublons (N=236) Nombre total d’articles exclus(N=126) dont: – articles ne relatant pas les barrières à l’utilisation des services de santé maternelle (n=61) – articles dont l’année de publication est soit <2016 soit >2019 (n=65)
Eligibilité
Nombre d’articles éligibles (n=110) Nombres de revue systématique de littérature/méta-analyse exclus (n=18)
Inclusion
Nombre d’articles inclus dans la revue (N=92)
Figure 1: Flow chart
Les 92 articles inclus dans la revue étaient classés par année de publication, type d’étude, type d’échantillonnage, principaux facteurs identifiés et conclusions des auteurs.
1) Classification par année de publication : Sur les 92 articles, Quinze étaient publiés en 2015 ; Seize articles en 2016 ; Dix en 2017 ; Dix neuf en 2018 et Trente deux en 2019
2) Classification par région géographique et par pays : Cinq études étaient menées en Europe; Quarante deux en Afrique, Deux au Moyen Orient, Vingt cinq en Asie, Dix en Amérique du nord, Trois en Amérique du Sud et Cinq études ont été réalisées en interpays avec Deux, Sept pays participatifs.
3) Classification selon le design d’étude: Le quasi totalité des articles traitait d’études originales. La majorité des articles, quarante cinq sur les quatre vingt douze (48,91%) étaient des études qualitatives [15, 17, 18, 19, 22, 25, 26, 29, 30, 31, 32, 36, 38, 39, 41, 48, 51, 52, 53, 55, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 66, 69, 71, 78, 81, 85, 86, 89, 90, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 100, 102,103, 106] et quarante deux articles (42/92) (45,65%) étaient des études quantitatives [16, 20, 21, 23, 24, 27, 28, 33, 34, 37, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 50, 56, 57, 64, 67, 68,70, 72, 73, 74, 75, 76, 77, 79, 80, 82, 83, 87, 88, 91, 92, 99, 101, 104, 105]. Sept articles étaient de type mixte (qualitative et quantitative) [35, 40, 49, 54, 65, 67, 84]. Parmi les études quantitatives six articles étaient des études prospectives et quasi expérimentales [24, 33,47, 50 (quasi-expérimentale), 74, 75]. Cinq articles étaient basés sur des enquêtes nationales représentatives [21, 27, 79, 83, 87].
4) Classification selon les types d’analyse des données : Le quasi totalité des études qualitatives avait utilisé l’analyse thématique. Pour les études quantitatives, l’identification des déterminants et l’évaluation des associations avec l’utilisation des services de soins de santé se basaient sur de l’analyse bi variée conduite à l’aide du test de Khi2 et l’analyse multi variée utilisant parfois la régression logistique pour tester les associations entre les variables dépendantes (CPN, PNC, utilisation des établissements de santé pour l’accouchement) et les différents facteurs. Trente deux études avaient appliqué l’analyse par régression pour identifier les déterminants barrières à l’utilisation des centres de soins de santé maternelles. [20, 23, 24, 27, 28, 37, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 50,56, 67,68, 70, 72, 75, 76, 77, 79,82, 83, 87, 88, 91, 92, 99, 101, 104, 105]
Parmi lesquelles, dans dix neuf études, les auteurs avaient pris la peine d’ajuster l’analyse aux covariables pour évaluer la force d’association des déterminants et l’utilisation des services de santé [20, 23, 27, 28, 37, 44, 47, 56, 67, 70, 72, 75, 77, 79, 83, 87, 88, 91, 101]
5) Classification selon les types de barrières identifiées : Les barrières à l’utilisation des services de santé maternelle et infantile identifiés dans la présente revue étaient multiples.
a) Facteurs démographiques et socioculturels:
. Age : l’influence de l’âge en général était rapportée dans plusieurs articles. Les femmes plus âgées conseillent aux jeunes femmes enceintes d’utiliser les méthodes traditionnelles pour garantir l’issu positif de la grossesse [30].
Être âgé de 14 à 34 ans, être dans le 4ème ou 5ème quintile de richesse et les visites à domicile sont des facteurs prédicteurs de CPN précoce [50]. Le retard de présentation aux CPN était associé à l’âge de <20 ans [72]. Les femmes plus âgées, étaient moins susceptibles d’utiliser les services de soins maternels [75].
Les facteurs socioculturels: tels que la religion, les croyances, les traditions, l’éducation, et l’état marital influencent l’utilisation des SSM par les femmes de Talensi [78]. Les femmes plus jeunes voire mineures font moins de CPN par timidité et leur position dans la hiérarchie familiale [63]. Pourtant, d’auteurs auteurs avaient déterminé que l’âge maternel montrait de forte association avec les prestations en établissement de santé mais l’utilisation d’établissement de santé était plus élevée chez les femmes les plus jeunes [88]. Les soins postnatals (PNC) étaient retardés, voir absentes chez les femmes plus âgées. En effet, d’après les résultats de cette revue, plus la femme est âgée, moins elles viennent pour PNC à cause de leur expérience antérieure de grossesse et d’accouchements. Cette relation entre l’âge avancé et l’utilisation des services de PNC (temps et fréquence) était relatée dans Quatre articles. [26, 31, 64, 67]
état marital : [33, 37, 45, 67, 78]
Les mariages des enfants très jeunes âges avaient diminué le recours aux CPN et aux PNC, bref, à la non utilisation des services de santé maternelle. Les femmes mariées à + de 18 ans, étaient plus nombreuses à utiliser les services de santé maternelle. Marier les femmes à partir de 18 ans était considéré comme facteurs facilitateurs [33, 62].
Ne pas être mariée par contre, peut être une barrière à l’accès aux soins maternels [67, 78].
Parité : Les femmes à grande parité utilisaient moins les services de soins postnatals. [50, 47, 67, 68, 74, 91]
En Afrique, la préférence pour les accoucheuses traditionnelles a été fortement affectée par la croyance traditionnelle.
Niveau d’éducation de la femme et ou du mari :
Les analyses révélaient que les femmes, ou celles dont les maris, avaient un faible niveau d’éducation formelle faisaient moins de consultations prénatales et ou postnatales [26, 27, 33, 37, 43, 46, 57, 62, 68, 69, 70, 75, 76, 77, 78, 79, 82, 87, 88, 91, 92, 93, 103].
Par ailleurs, le Health litteracy ou analphabétisation en santé maternelle, était également rapportée. Les connaissances en santé contribuent à expliquer l’association entre l’éducation maternelle et l’utilisation des services de santé, rapportée dans neuf articles [15, 28, 39, 60, 66, 82, 86, 98, 100] .
Rôle du media, de l’information en santé :
Et selon la présente revue, le manque d’exposition ou d’accès aux medias avait des impacts sur la décision des femmes à effectuer des consultations pré, péri ou post natales. Les femmes qui lisaient les journaux avaient une chance plus élevée d’accoucher dans ces établissements de santé. Les femmes, exposées au media, avaient plus de chance de recevoir 4 CPN ou plus. Les femmes exposées aux mass media et non-marginalisées étaient plus susceptibles de faire au moins trois CPN [20, 28, 46, 70, 77, 88, 100].
Facteurs liés aux systèmes d’information :
D’après cette revue, l’information devrait jouer un rôle important. Des articles avaient rapporté l’impact de mass media. Les femmes n’ayant pas accès aux mass media faisaient moins de CPN et de PNC [20, 28, 46, 70, 77, 88, 100].
b) Barrières économiques : Trente sept articles sur les 92 avaient relaté les impacts du faible revenu des ménages et des coûts des soins et de transport sur l’utilisation des services de santé maternelle [15, 16, 17, 19, 23, 25, 27, 29, 30, 33, 35, 36, 40, 41, 43, 45, 50, 59, 61, 62, 63, 65, 67, 70, 74, 76, 78, 79, 80, 81, 83, 87, 88, 89, 90, 96, 97, 101].
c) Barrières géographique/environnementales : les résultats de cette revue avaient rapporté que la distance entre l’habitation et les centres de soins maternels, le manque de moyens de transport était d’importantes barrières à l’accès aux soins maternels. Vingt trois articles sur les quatre vingt douze les avaient soulignées [16, 17, 18, 21, 23, 25, 31, 40, 44, 48, 49, 56, 59, 63, 64, 65, 69, 74, 78, 80, 81, 90, 93].
Facteurs liés au lieu de résidence:
Les femmes vivant en milieu rural consultaient moins les services de santé maternels comparées à celles vivant en milieu urbain. Plus spécifiquement, l’utilisation de CPN est plus fréquente chez les urbaines que chez les femmes du milieu rural [34, 43, 72, 75, 76, 83, 87, 92].
c) Facteurs liés au système de santé : les résultats de cette revue avaient trouvé comme autre barrière l’une utilisation inadéquate des services de soins maternels en relation avec le système de santé :
– les femmes enceintes avaient trouvé que l’attitude négative des prestataires était un frein à l’utilisation des services de santé: [16, 17, 25, 29, 41, 42, 84, 100].
– la fréquente indisponibilité des prestataires était également une barrière à l’utilisation des services de santé maternelle : [18, 35, 36, 40, 44, 49, 59, 63, 87].
– l’accessibilité aux services de soins du point de vue éloignement et coût était identifiée dans quatre articles [48, 63, 103, 106].
– et les perceptions négatives concernant la qualité des centres de soins étaient soulevés dans sept articles [15, 17, 41, 48, 58, 71, 103].
f) Facteurs liés aux croyances, à la religion, à la perception
La Religion pouvait être une barrière à l’accès aux soins :[25, 28, 36, 56, 57].
La croyance que la grossesse est un phénomène naturel et l’absence de symptômes pathologiques, faisaient que les CPN étaient jugées non nécessaires par les femmes.
Mais il y avait également le manque de connaissance des signes de danger et des bénéfices des services de santé offerts. Les femmes sans complication de grossesse manquaient ou retardaient les visites pour CPN. Les CPN manquées entraineraient des manques de PNC [33, 39, 51, 63, 89, 103].
Les CPN et PNC étaient considérés comme des soins curatifs donc, pour les femmes qui le pensaient, il n’y avait aucunement besoin d’en faire et d’utiliser les services de santé maternelle, sauf par peur de complications. Ainsi la demande de CPN se fait seulement en cas de complications de grossesse [15, 19, 31, 34, 40, 46, 48, 52, 73].
Ont été également rapporté comme barrières à l’accès aux services de santé maternelle :
– le manque de pouvoir de décision des femmes [15, 16, 19, 35, 63, 60, 95] qui se traduisait par le manque d’autonomie des femmes [28, 41, 71].
– le manque de planning familial (grossesses non planifiées) [49, 84, 90].
– la peur/crainte de résultat positif du test de VIH : [40, 90] (N=2/92).
d) Barrières spécifiques des femmes immigrées :
– Sentiment de stigmatisation, stéréotype étaient leurs barrières à l’accès aux CPN et PNC relatés dans Neuf articles [15, 38, 69, 85, 86, 94, 102, 104, 106].
– Les barrières de langue ont été rapportées par Cinq articles dans la présente revue [15, 55, 58, 60, 79, 83].
– Les femmes immigrées souffraient d’isolement, d’instabilité, dû à leur situation administrative irrégulière et de manque de support social [60].
De plus, « les fausses couches répétées n’encourageaient pas à faire des consultations prénatales »[94].
Impact des CPN sur les soins postnataux : faire des CPN encouragent à faire des PNC [86, 92].
Les femmes enceintes, de grossesses non planifiées faisaient moins de CPN [40, 92, 95].
Exemples de barrières aux soins postnatals:
pas assez de sensibilisation [72]
le fait d’accoucher à domicile [71]
le manque de compréhension du rôle des CPN et l’idée fausse sur les PNC [78]
l’âge avancé des mères ; la grande parité.
Les femmes mineures, d’après trois articles de cette revue faisaient moins de recours aux CPN [48, 54, 67].
Recours tardifs aux CPN (effectifs seulement à compter du 5ème mois de grossesse):
Causes ou raisons évoquées :
manque de connaissance du calendrier et Objectifs des CPN
perception de complications de grossesse
besoin de bonne santé
absence de symptôme : pas besoin de CPN [70].
Facteurs facilitateurs:
Les facteurs favorisant (positivement) l’utilisation des centres de santé maternelle:
vivre à moins de 5km autour du centre de santé
disponibilité de personnel de santé qualifié;
disponibilité de services de bonne qualité, d’équipement et de faible coût,
facilité d’accès aux établissements de santé
Les facteurs qui influençaient le continuum de soins maternels étaient très complexes. Ils étaient affectés par le niveau individuel, communautaire, et les services de santé.
DISCUSSION:
Les barrières identifiées à travers les pays étaient souvent similaires. Les études menées en Europe centrale et en Europe de l’est, avaient trouvé comme principales barrières à l’accès aux soins maternels adéquats des déterminants socio-culturels, la distance géographique vers les institutions de santé, la communication inappropriée des prestataires de santé, les temps d’attente longs, et le fait de ne pas avoir d’assurance maladie. Ces résultats étaient similaires à ceux rapportés par Mitenience E et al., dans leur revue systématique de littérature [108].
Dans la présente revue, les études menées dans les pays industrialisés ciblaient pour la plupart la situation des femmes immigrées pour qui la barrière linguistique freinait l’utilisation des services de santé maternelle, et les facteurs socio-culturels dominaient les déterminants à l’utilisation des services de santé maternelle.
La plupart des études menées en Afrique, avaient rapporté que le niveau d’éducation et l’alphabétisation en santé étaient des facteurs importants pouvant favoriser l’utilisation des services de santé maternelle par les femmes enceintes et accouchées. Les femmes qui n’étaient pas allées à l’école ou avaient de faible niveau d’éducation (arrêté en primaire) sont moins susceptibles de faire des CPN ou de PNC. Le faible niveau économique des ménages était une barrière importante à l’utilisation des services de santé dans ces pays. La fréquence des CPN était associée au niveau économique des ménages. En dehors de la difficulté financière des ménages, étaient également souligné, comme ayant une association importante à l’utilisation inadéquate ou non utilisation des CPN notamment, les facteurs indirects tels que le manque de moyen de transport, aggravé par la longue distance à parcourir pour accéder aux services de santé le plus proche. Dans la présente revue, la multiparité, être enceintes à moins de 18ans, ne pas être mariée, et avoir une grossesse non planifiée étaient associées à une utilisation retardée de CPN. La faible perception des risques liés à la grossesse, l’influence des époux et belles-mères et les normes traditionnelles et culturelles dominaient encore en Afrique et compliquaient l’accès des femmes aux services de santé maternelle. Ainsi, les barrières socioculturelles liées aux accouchements dans les établissements de santé étaient des croyances profondément ancrées selon lesquelles l’accouchement était un événement de la vie normale, que les femmes souhaitaient être prise en charge par les membres de la famille, bénéficier ainsi d’une plus grande liberté de mouvement à la maison, d’un environnement chaleureux, avoir la possibilité d’obtenir des aliments «chauds», appropriés, et sauvegarder la timidité des jeunes femmes. Des résultats similaires ont été rapportés pour le manque d’éducation de la mère et l’occupation du mari comme rôle d’obstacle important, car c’est l’éducation de la mère et l’occupation du mari qui se sont avérées être de solides prédicteurs de l’utilisation des soins de santé maternelle. Concernant le système de santé, c’est le manque de ressources financières, matérielles et humaines qui est le plus important pour les pays en développement.
Si on classe les facteurs par ordre de fréquence de citation, le premier problème reste les barrières économiques. En deuxième position revient le problème de niveau d’éducation de la femme et du mari. En troisième rang des difficultés se positionnent les barrières géographiques et environnementales suivies par les facteurs liés au système de santé et en dernier lieu, les facteurs socio-culturels.
Comparés aux déterminants soulevés par les études antérieures à 2015, notamment dans la revue systématique de littérature de Simkhada et al. en 2008, on observe la présence de facteurs qui étaient cités avant 2015 et qui sont toujours présents durant la période de la présente revue. Les facteurs tels que le niveau d’éducation du couple, le revenu de la famille et l’emploi de la femme restent des barrières importantes encore non résolues dans plusieurs pays à faible revenu. Il en est de même pour les facteurs culturels. Le manque de pouvoir de décision et d’autonomie des femmes est encore soulevé. Le manque de planning familial, source de grossesses non planifiées. Si dans la revue de Simkhada et al., en 2008, un seul article avait soulevé l’impact de la qualité des services prénataux, les facteurs liés au système de santé étaient rapportés par vingt deux études dans la présente revue [13]. Ont été soulevés l’indisponibilité des prestataires, l’attitude négative des prestataires, l’accessibilité aux services de santé maternelle, et la qualité des prestations dans les services. Rappelons que cette dernière avait été rapportée par sept articles. L’impact des antécédents de complications obstétriques sur l’utilisation des services de santé était encore discuté. Le manque de connaissance des soins de santé maternels laisse croire que le média doit être plus encore sollicité. Cette revue a également permis de voir l’émergence d’autres types d’obstacles à l’utilisation des centres de soins maternels, qui n’étaient pas signalés comme courants avant 2015, tels que les problèmes spécifiques des femmes déplacées et immigrées dans les pays développés hôtes.
La prise en compte des nouveaux facteurs identifiés et des anciens déterminants déjà cités mais encore non résolus, pourrait contribuer à la diminution du taux de mortalité maternelle et infantile dans les pays qui n’avaient pas enregistré de grands progrès dans ce sens, ou dans les pays où ce taux est resté stationnaire, comme c’est le cas à Madagascar.
CONCLUSION:
Les barrières d’accès doivent être systématiquement traitées si on voudrait augmenter l’accès aux soins et par la même occasion réduire le taux de mortalité maternelle mais aussi infantile.
Déconstruire les croyances concernant les systèmes de santé peut améliorer l’accès, en particulier chez les femmes âgées. Elever le niveau d’éducation pour la santé par tous les moyens de communication pourrait augmenter significativement le nombre de consultations prénatales correctes et postnatales.
La mise en place d’une assurance maladie serait une solution pour réduire les frais.
Les facteurs étant bien mis en évidence, il est possible de mettre en œuvre des actions pour améliorer l’accès des femmes enceintes aux services de santé maternelle.
Remerciements : Les auteurs remercient toutes les femmes qui ont participé à l’étude.
Conflit d’intérêt : Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflit d’intérêt
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Article mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution – Pas d’utilisation commerciale – 4.0 International
Article original
1 Laboratoire d’Epidémiologie et Biostatistique en Santé de Populations (LabEBSP)
2 Ecole doctorale Nutrition-Environnement Santé (EDNES), Université de Mahajanga
3 IOSTM, Université de Mahajanga
Résumé :
Le but de cette étude était de découvrir les différences d’habitudes alimentaires et de styles de vie des écoliers âgés de 11 à 16ans à Mahajanga. Méthode : Une étude transversale était menée au niveau régional basé sur utilisation du questionnaire Health Behaviour in School aged Children, à auto remplir. Les écoles étaient sélectionnées par échantillonnage multi-stratifié. L’analyse statistique utilisait le test de Khi2 et calculait l’Odds Ratio à 95% d’intervalle de confiance pour déterminer l’association entre habitudes alimentaires et style de vie. Résultats : Sur 1393 répondants, 17,0% avait rapporté ne pas prendre de petit déjeuner avant d’aller à l’école ; 65,5% en prenait de manière irrégulière indifféremment du genre (p=0,203) et 40,6% avait déclaré être allé à l’école ou dormir sans manger (les filles, significativement plus nombreuses que les garçons (p=0,006). Les proportions de jeunes prenant du petit déjeuner étaient plus élevées chez les garçons dépendant du niveau scolaire (p=0,000). La consommation journalière de légumes était plus fréquente chez les filles (p=0,015) ; quand aux fruits, elle était plus élevée chez les garçons (p=0,000). Aucune différence n’était trouvée entre les genres sur le temps passé par jour devant la télévision. (p=0,924) mais aux jeux vidéo, et sur internet les garçons y passaient plus de temps que les filles (p<0,05). La prise régulière de petit déjeuner était positivement associée à un âge plus jeune (11-12ans) [OR=3,422 ; 95%IC : 2,128;5,503] ; à être en classe primaire [OR=0,207 ; 95%IC :0,118;0,363 ] ou en classe intermédiaire [OR=0,086 95%IC :0,052;0,114 ] ; à n’être jamais [OR=0,438 ;95%IC :0,301;0,638 ] ou rarement [OR=0,709 ;95%IC :0,526;0,954] allé à l’école ou dormir sans manger. Conclusion : Les résultats de cette étude constituent un bon point de départ pour l’élaboration d’un système de surveillance nutritionnelle chez les jeunes à Mahajanga. Mots clés: adolescents, scolarisés, habitudes alimentaires, questionnaire HBSC, styles de vie.
Abstract:
The aim of this study was to discover differences in of eating habits and lifestyles of school children aged 11 to 16 years old in Mahajanga, Madagascar. Method: A cross-sectional study was conducted at regional level based on a self-completion questionnaire. Schools were selected by multi-stratified sampling. Statistical analysis used khi2 test and OR at 95% IC to determine the association between dietary habits and life styles. Results: Among the 1393 respondents, 17.0% reported not having breakfast before going to school; 65.5% had irregular breakfast. Differences were not significant according to gender (p>0.05). And 40,6% had declared going to school or to bed without eating (girls more frequently than boys (p<0.01). proportions of girls having regular breakfast were significantly higher among boys than girls depending the school’s class level (p<0.001). girls’ vegetable consumption was more frequent than boys’ (p<0.05) whereas, fruit consumption was more frequent among boys than among girls (p<0.001) in primary school. No difference was found between girls and boys concerning the TV time per day; but percentage of boys spending more time playing videos and consulting Internet were higher than girls (p<0.05). Thirteen per cent said they had never participated in physical activity (65.4% were female). Regular intake of breakfast was positively associated with a younger age (11-12years old) [OR=3.422; 95% IC: 2.128;5.503];be in primary school classes[OR=0.207; 95% IC :0.118;0.363] or intermediate class level [OR=0.086 95%IC :0.052;0.114] ; never [OR=0.438 ;95% IC :0.301;0.638 ] or rarely [OR=0.709 ;95% IC :0.526;0.954] went to school or to bed without eating. Conclusion: The results of this study provide a good starting point for developing a nutritional surveillance system for young people in Mahajanga. Keywords: adolescents, school aged-children, eating habits, HBSC questionnaire, lifestyles.
Comment citer cet article :
Edwin HCC, Randrianarivony J, Ravelomanatsoa JJ, Rajabo A, Razanamihaja N. Habitudes alimentaires et style de vie des jeunes scolarisés à Mahajanga, Madagascar. Revue Sc. Santé 2020;1:10-20
INTRODUCTION :
Les jeunes occupent une proportion considérable de la population mondiale. En 2012, d’après le rapport des Nations Unies, dans le monde, 1,6 milliard de personnes étaient, âgées de 12-24ans dont 721 millions étaient des adolescents de 12 à 17 ans. La vaste majorité (88%), plus du trois quart de la jeunesse, vit en pays en développement [1]. Une large proportion de cette population de jeunes est en âge scolaire [2]. En Afrique, en 2012, les 12-17ans représentaient 142 Millions d’habitants. L’adolescence est la période de la vie dont la demande en nutriments est la plus élevée afin de répondre aux besoins de la croissance rapide qui la caractérise. C’est également la période durant laquelle les jeunes cherchent à s’affirmer et sont attirés par de nouvelles expériences que ce soit, de se nourrir, de styles de vie ou autres et développent ainsi de nouvelles habitudes alimentaires [3]. Les jeunes étant fragiles et facilement influençables, les amis, les réseaux sociaux ont d’influences croissantes sur eux avec l’âge. Le statut familial et socioéconomique a également des influences sur leurs comportements [1]. L’influence de l’alimentation sur la santé est plus importante que celle de l’alcool et de la drogue et bien d’autres réunis [4].
Connaissances actuelles: L’adolescence est une période charnière pour la croissance et le développement et leur besoin en nutriments est élevé. Pourtant, dans les pays en développement, d’après la synthèse d’une revue systématique de littérature publiée entre 2004 et 2014, sur les habitudes alimentaires des adolescents scolarisés, l’alimentation des jeunes dans est très peu variée et elle est basée principalement sur des plantes mais peu de consommation de fruits et légumes. Ces aliments traditionnellement consommés sont souvent pauvres en nutriments et en énergie faisant constater un déséquilibre énergétique conduisant souvent à la malnutrition [5]. De plus, il fut rapporté, que les habitudes alimentaires ont changé ces dernières décennies chez les jeunes. A titre d’exemple, la consommation de fruits et légumes au sein des repas familiaux traditionnels a diminué en faveurs des repas rapides (fast foods) [6]. Actuellement, on se fait beaucoup de soucis concernant l’augmentation des habitudes alimentaires inadéquates, incluant le saut du petit déjeuner, et une grande consommation d’aliments ou de boissons sucrés chez les jeunes. Le petit déjeuner est souvent considéré comme le principal repas qui apporte le soutien en calories de la journée surtout pour les jeunes pourtant des preuves ont été apportées par la littérature que beaucoup d’adolescents dans le monde sautent le petit déjeuner. Il est estimé que les enfants consomment environ 20% de leur besoin en énergie pour une journée lors du petit déjeuner [7]. La littérature a également rapporté que les habitudes alimentaires et les styles de vie des jeunes constituent des facteurs de risques sérieux pour de nombreuses maladies chroniques contractées à l’âge adulte [8]. Il fut également démontré qu’il existe une association inverse forte entre la consommation régulière d’une certaine portion et types de fruits et légumes et la réduction de mortalité de toutes causes [9]. De même qu’il fut relaté depuis des décennies que la prise régulière de petit déjeuner est associée à la performance scolaire [10]. Ainsi, les données sur les habitudes alimentaires sont importantes pour la promotion de santé alimentaire des adolescents. Pourtant, les recherches sur les habitudes alimentaires des jeunes sont très rarement menées dans les pays en développement, notamment à Madagascar. Aux vues des situations susmentionnées, il nous a paru important de mener une recherche sur les habitudes alimentaires des jeunes scolarisés. Les jeunes scolarisés représentent un groupe facilement abordable, et dont un grand nombre sont réunis dans de sites identifiables et organisés. La présente étude visait à découvrir les différences d’habitudes alimentaires et de styles de vie entre les garçons et les filles, et selon des facteurs socio-démographiques et économiques.
MATERIEL ET METHODE :
Type d’étude, population et lieu d’étude: il s’agissait d’une étude transversale menée dans 20 établissements scolaires sélectionnés de façon aléatoire et par la technique d’échantillonnage multi-stratifié et ciblé. Tous les élèves âgés entre 11 à 16 ans des écoles sélectionnées étaient tous inclus dans l’étude si leurs parents ont consenti à leur participation. Les participants à l’étude étaient recrutés à partir des établissements scolaires publiques et privés. Le principal critère d’inclusion était d’être âgé de 11 à 16 ans. Les écoles à inclure dans l’étude étaient sélectionnées de façon aléatoire et par la technique d’échantillonnage multi-stratifié. L’étude a eu lieu dans l’ancienne province de Mahajanga qui actuellement est divisée en quatre régions administratives. La population totale était de 1 896 000 en 2004. L’échantillon total incluait 1393 jeunes scolarisés.
Matériel: Un questionnaire semi-structuré à auto-remplir était ensuite distribué aux participant. Il s’agissait d’un questionnaire tiré du « Health Behaviour in School aged Children (HBSC) » version en langue Malagasy. Le HBSC est l’unique étude internationale collaborative transnationale sur la santé et les habitudes de santé des adolescents menée dans une quarantaine de pays d’Europe et d’Amérique du Nord. Il s’agit d’un questionnaire dont les items donnent de informations sur les facteurs démographiques, le contexte social, l’état de santé (santé orale y compris), les habitudes de santé (habitude alimentaire et régime, activités physiques, ..), et sur les habitudes à risque (11). La licence d’utilisation du protocole du HBSC 2013-2014 a été accordée par les administrateurs du HBSC, selon le Creative Commons Attribution-Non Commercial-No Derivs 3.0 Unported License accompagnée d’un mot de passe unique permettant l’accès à leur site. Etait prise, pour mener la présente étude, uniquement la partie du questionnaire HBSC qui consiste à décrire les habitudes de prise de petit déjeuner et d’évaluer la fréquence de consommation de certains aliments tels que les fruits, les légumes, les sucreries, des boissons sucrées et énergisantes chez les adolescents. Ensuite, nous avions pris en considérations lors de cette étude les questions sur le style de vie des jeunes et leur relation avec les habitudes de prise de petit déjeuner selon le genre et le niveau scolaire. La fréquence de consommation de petit déjeuner était évaluée par la question « durant la semaine d’école passée combien de jours as-tu pris de petit déjeuner ? ». Les possibilités de réponses étaient : « je ne prends jamais=pas du tout de petit déjeuner en semaine» ; je prends 1jour ; 2jours ; 3 jours ; 4jours ; et chaque jour d’école (5jour/5). (1j, 2j, 3j, 4j, 5j) ». La fréquence de prise de petit déjeuner en week-end était mesurée par la question «durant le week-end passé combien de jours as-tu pris de petit déjeuner ? ». Les possibilités de réponses étaient : « je ne prends jamais de petit déjeuner le week-end ; je prends un jour sur deux ; et je prends le petit déjeuner les deux jours du week-end (samedi et dimanche) ». Les habitudes alimentaires étaient également évaluées par la fréquence de consommation de certains aliments tels que : fruits, légumes, sucreries, coca-cola (boisson sucrée), boisson énergisante etc. Notons au passage que la question sur la consommation de boisson énergisante alcoolisée était posée seulement aux jeunes âgés de 15-16ans de classes de 4ème et de 3ème et pour chaque type d’aliment, les réponses au choix étaient les suivantes : « moins d’une fois par semaine/jamais ; 1jour/semaine ; 2-4j/semaine ; 5-6j/semaine ou 1f/jour (chaque jour de la semaine) ». Le style de vie des jeunes était évalué par le nombre d’heures passées devant la télé, à jouer à des jeux vidéo et à pratiquer des activités physiques.
Collecte des données : Avant le début de l’enquête, les autorités locales et les responsables des services de scolarité, à chaque site d’étude, étaient contactés. Une réunion d’information sur l’enquête et ses objectifs a été réalisée pour les enseignants et les parents d’élève. Une réunion par classe était ensuite organisée avec les jeunes qui ont obtenu le consentement de leurs parents et les objectifs de l’enquête ainsi que les questions de recherche étaient exposés et expliqués à eux avant la collecte des données. Pour protéger leur vie privée et intime, les participants étaient assurés sur la stricte confidentialité des réponses aux questions posées. Le questionnaire à auto remplir était ensuite distribué aux participants. Par ailleurs, le remplissage des questionnaires était fait en salles de classe en présence des enquêteurs formés pour. La séance de remplissage des questionnaires a duré 45minutes. Dans ce questionnaire, les données sur les variables sociodémographiques, les habitudes alimentaires, le style de vie et les pratiques d’activités physiques étaient collectés.
Traduction du HBSC : Avant son utilisation, le questionnaire était d’abord traduit en langue malagasy suivant la méthode de traduction/contre-traduction préconisée par Beaton et al..(12) et ensuite pré testé auprès de jeunes du même groupe d’âge pour évaluer la compréhension de son contenu. Un concept lié à la validité du contenu appliqué à cette étude était la validité faciale (Face validity). Les répondants jugent si à leurs avis, les items du questionnaire sont valides. Leur jugement est basé sur leur compréhension des items. Les élèves (n=35) qui ont participé au pré-test ne figuraient pas parmi l’échantillon final pour la réalisation de l’étude. Le but de ce pré-test était d’abord de mesurer la compréhension du questionnaire par les répondants. Le questionnaire était à auto-remplir par les élèves en présence de leurs enseignants. Analyse statistique : Les données collectées étaient ensuite traitées et analysées à l’aide du logiciel SPSS version 24.0.Les données descriptives étaient exprimées en pourcentage, en moyennes et en valeurs d’écart type. Le test de Khi2 était utilisé pour examiner la signification des différences entre genres, et d’association entre genres, habitudes alimentaires et styles de vie. L’OR à 95% d’intervalle de confiance était calculé pour déterminer l’association entre habitudes alimentaires et style de vie en fonction du genre. L’analyse multivariée par régression logistique était conduite pour déterminer si la fréquence de consommation de petit déjeuner était liée à des facteurs tels que: la performance académique (mesurée par la moyenne annuelle note sur 20 rapportée par les répondants); le poids auto-évalué (déduite de la réponse à la question sur le suivi oui ou non de régime pour maigrir); la tranche d’âge et le niveau scolaire, la pratique d’activités physiques et les conditions de vie familiale (nombre de frères et sœurs vivant ensemble).
RESULTATS :
Traduction: La traduction du questionnaire, originalement développé en anglais, en langue malagasy s’était déroulée en plusieurs étapes. La première traduction a été effectuée par deux traducteurs. Les difficultés concernaient la recherche d’équivalences culturelles. Ensuite cette première version fut donnée à deux nouveaux traducteurs, ignorant complètement l’existence de la version originale en anglais, qui vont la contre traduire en anglais pour vérifier si le questionnaire a gardé le sens initial du concept de questionnaire. Puis la version malagasy concertée a été prétestée auprès des jeunes de même groupe d’âge avant son administration aux jeunes de l’étude. La traduction n’a pas rencontré de difficultés particulières. La version malagasy du HBSC a respecté les items originaux du questionnaire et aucun changement n’a été introduit.
Caractéristiques sociodémographiques : La population d’étude était composée de 1393 élèves répartis dans trois groupes de classes d’âge : 11-12ans (moyenne d’âge=11,36 et n=551), 13-14ans (moyenne d’âge=13,65 ; n=455) ; et 15-16ans (moyenne d’âge=15,36 ; n=387). Distribué selon le genre et niveau d’étude, l’échantillon était composé de 57% de filles et 43% de garçons dont 29,4% des élèves étaient en classe primaire, 53,1% en classes de 6e à 5e, et 17,4% en classes de 4e à 3e. (Tableau 1).
Tableau 1 : Caractéristiques sociodémographiques
Variables
Nombre
%
Moyenne
Genre
M
604
43,4
F
789
56,6
Total
1393
100,0
Age
11ans
551
39,6
11,3
13ans
455
32,7
13,6
15ans
387
27,8
15,3
Niveau scolaire
primaire
410
29,4
6ème-5ème
740
53,1
4ème-3ème
243
17,4
Habitudes alimentaires :
Prise de petit déjeuner les jours d’école de la semaine et le week-end : La fréquence de prise de petit déjeuner durant les jours d’école ainsi que durant le week-end, en fonction du genre est présentée dans le Tableau 2.
Tableau 2: Proportion d’adolescents qui prennent un petit déjeuner chaque jour d’école ou le week-end, qui vont à l’école ou dormir sans manger ou qui suivent un régime pour maigrir, en fonction du genre.
M n(%)
F n(%)
Total N(%)
p
Habitudes alimentaires
Fréquences
Prise de petit déjeuner en semaine(5jours)
0,203
pas du tout
106(46,1)
124(53,9)
230(16,5)
1jour/5
144(42,1)
198(57,9)
342(24,6)
2j/5
83(43,7)
107(56,3)
190(13,6)
3j/5
77(51,3)
73(48,7)
150(10,8)
4j/5
29(45,3)
35(54,7)
64(4,5)
5j/5
165(39,7)
252(60,3)
417(30,0)
Prise de petit déjeuner le week-end
0,015
pas du tout
124(51,9)
115(48,1)
239(17,3)
rarement(1j/2)
128(41,8)
178(58,2)
306(21,9)
tous les jours(2j/2)
353(41,6)
495(58,4)
848(60,9)
Aller à l’école ou dormir sans manger m’est arrivé
0,006
très souvent
55(43,3)
72(56,7)
127(9,1)
souvent
64(69,3)
44(40,7)
108(7,8)
de temps en temps
164(40,5)
241(59,5)
405(29,1)
rarement/jamais
322(42,8)
431(57,2
753(54,0)
Actuellement fais-tu du régime pour maigrir?
0,073
Non, mon poids me convient
239(48,1)
258(51,9)
497(35,7)
Non, mais j’ai besoin de maigrir
96(40,2)
143(59,8)
239(17,1)
Non, puisque je voulais grossir
117(41,7)
166(58,3)
283(20,3)
Oui, je fais du régime
152(40,6)
222(59,4)
374(26,8)
Globalement, environ 17,2% des répondants avaient rapporté ne pas du tout prendre de petit déjeuner les week-end et les pourcentages étaient plus élevés chez les filles mais la différence n’était pas significative concernant la consommation de repas du matin la semaine (p>0,05); par contre, la différence était confirmée le week-end où les garçons étaient plus nombreux à ne pas consommer de petit déjeuner (17,2%) contre 14,6% chez les filles (p<0,05). En tout, seul 30,0% des répondants avaient déclaré prendre le petit déjeuner 5jours sur 5 avant d’aller à l’école, ou si on inclut les 4jours sur 5, le pourcentage était de 34,5%. Dans le même tableau est également présenté le croisement de l’effectif de jeunes qui déclaraient aller à l’école ou dormir sans manger en fonction du genre. Les résultats ont montré que « aller à l’école ou dormir sans manger » était déjà arrivé à 9,1% (très souvent), 7,8% (souvent), 29,1%(de temps en temps) et rarement/jamais à 54,0% des élèves interrogés. Cette situation était arrivée plus souvent aux filles qu’aux garçons avec une différence très significative (p<0,01). Un peu plus du quart (26,8% ) des élèves avait rapporté suivre un régime pour maigrir dont 59,4% des filles mais la différence n’était pas significative (p>0,05). Fréquence de consommation de certains aliments (fruits, légumes, sucreries, boissons énergisantes : D’après les résultats, globalement, 44,3% des jeunes consommait des fruits moins d’une fois par semaine et seul 11,4% en consomment régulièrement contre 12,0% pour les légumes et 15% des sucreries. Le pourcentage de filles (50,9%) consommant des fruits 7 fois par semaine est plus élevé que chez les garçons (p<0,05). Tandis que le pourcentage de garçons (56,0%) consommant des légumes presque chaque jour était significativement plus élevé que chez les filles(44,0%) et la différence était très significative du point de vue statistique (p<0,01). Plus de 16% des élèves interrogés avait rapporté boire du coca-cola 4fois par semaine. Les boissons énergisantes sont consommées chaque jour par 6,6% des élèves. En somme, les sucreries, le coca-cola et les boisons énergisantes, sont consommés sans différence significative par les filles et les garçons. (Tableau 3)
Tableau 3 : Pourcentage d’adolescents qui consomment régulièrement certains produits (fruits, légumes, sucreries, coca-cola,…en fonction du genre
M
F
Total
p
Aliments
Fréquence de consommation par semaine
Fruits
0,026
moins d’1fois
218(44,3)
274(55,7)
492(35,3)
1 à 3fois
236(44,4)
296(55,6)
532(38,2)
4 à 6fois
72(34,4)
137(65,6)
209(15,0)
7fois
78(49,1)
81(50,9)
159(11,4)
Légumes
0,006
moins d’1fois
198(41,7)
277(58,3)
475(34,0)
1 à 3fois
248(42,4)
337(57,6)
585(42,0)
4 à 6fois
66(39,5)
101(60,5)
167(12,0)
7fois
93(56,0)
73(44,0)
166(12,0)
Sucreries
0,221
moins d’1fois
203(45,8)
240(54,2)
443(31,9)
1 à 3fois
236(43,4)
308(56,6)
544(39,1)
4 à 6fois
71(37,0)
121(63,0)
192(13,8)
7fois
93(44,6)
118(55,4)
211(15,2)
Coca-cola
0,181
moins d’1fois
294(43,6)
380(56,4)
674(48,4)
1 à 3fois
200(41,2)
286(58,8)
674(48,4)
4 à 6fois
72(51,4)
88(55,0)
160(11,5)
7fois
38(41,4)
54(58,7)
92(6,6)
Boisson énergisante(Dynamic, etc…)
0,162
moins d’1fois
483(42,4)
656(57,6)
1140(82,0)
1 à 3fois
72(45,0)
88(55,0)
160(82,0)
4 à 6fois
35(54,7)
29(45,3)
64(4,6)
7fois
14(53,8)
12(46,2)
26(1,9)
Le Tableau 4 présente les proportions d’adolescents qui prennent un petit déjeuner chaque jour d’école en fonction du groupe d’âge, du niveau scolaire et des résultats scolaires. D’après ce tableau, les 15-16ans étaient les plus nombreux à ne pas prendre de petit déjeuner les jours d’école (43,5%) comparés aux 13-14ans (36,1%) et aux 11-12ans (20,4%). La proportion de ceux qui prenaient le petit déjeuner chaque jour d’école était la plus élevée chez les 11-12ans (49,8%.) que chez les 15-16ans (28,9%) (p<0,001). Des différences de pourcentage de prise de petit déjeuner étaient trouvées également en fonction du niveau scolaire. Les proportions d’élèves qui prenaient régulièrement de petit déjeuner (5j/5) étaient significativement plus élevées chez les élèves du primaire (40,4%) et les plus faibles chez les 4ème-3ème (29,2%) (p<0,001). Les résultats scolaires notés sur 20 rapportés par les élèves étaient pris en considérations pour évaluer la performance scolaire individuelle.
Tableau 4: Proportion d’adolescents qui prennent un petit déjeuner chaque jour d’école en fonction du groupe d’âge, du niveau scolaire et résultats scolaires
Fréquence de prise de petit déjeuner la semaine et groupe d’âge
11ans n(%)
13ans n(%)
15ans n(%)
Total N(%)
pas du tout
47(20,4)
83(36,1)
100(43,5)
230(16,5)
1jour/5
144(42,1)
129(37,7)
69(20,2)
342(24,6)
2J/5
52(27,4)
91(47,9)
47(24,7)
190(13,6)
3J/5
77(51,3)
47(31,3)
26(17,3)
150(10,8)
4J/5
23(36,5)
16(25,4)
24(38,1)
63(4,5)
5/5
208(49,8)
89(21,3)
121(28,9)
418(30,0)
Fréquence de prise de petit déjeuner la semaine et niveau scolaire
classe primaire n(%)
6ème-5ème n(%)
4ème-3ème n(%)
Total N(%)
pas du tout
26(11,3)
180(78,3)
24(10,4)
230(16,5)
1jour/5
95(27,8)
215(62,9)
32(9,4)
342(16,5)
2J/5
48(25,3)
123(64,7)
19(10,0)
190(13,6)
3J/5
58(38,7)
71(47,3)
21(14,0)
150(10,8)
4J/5
14(22,2)
24(38,1)
25(39,7)
63(4,5)
5/5
169(40,4)
127(30,4)
122(29,2)
418(30,0)
Fréquence de prise de petit déjeuner la semaine et résultats scolaires(note/20)
<10/20 n(%)
10/20 à 13/20 n(%)
>13/20 n(%)
Total N(%)
pas du tout
55(23,9)
115(50,0)
60(26,1)
230(16,5)
1jour/5
75(21,9)
130(38,0)
137(40,1)
342(24,6)
2J/5
37(19,5)
89(46,8)
64(33,7)
190(13,6)
3J/5
19(12,7)
62(41,3)
69(46,0)
150(10,8)
4J/5
19(30,2)
15(23,8)
29(46,0)
63(4,5)
5/5
41(9,8)
135(32,3)
242(57,9)
418(30,0)
Les proportions d’élèves à avoir eu de meilleures moyennes (>14/20) étaient significativement plus élevées chez ceux qui prenaient le petit déjeuner chaque matin de semaine d’école que chez ceux qui n’en prenaient pas (p<0,001). Dans le Tableau 5 est présentée les proportions d’adolescents qui prenaient un petit déjeuner chaque jour d’école en fonction de la pratique d’activités physiques. Les résultats ont montré que 53,2% des jeunes interrogés pratiquaient rarement (1à3j/semaine) d’activités physiques. Les proportions de jeunes qui prenaient 5j/5 de petit déjeuner avant d’aller à l’école étaient significativement plus faibles chez ceux qui ne pratiquaient pas du tout d’activités physiques (23,9%) que chez ceux qui en pratiquaient souvent (28,9%)(p<0,001). (Tableau non présenté)
Composition de la famille et prise de petit déjeuner: La composition de la famille était considérée comme ayant un potentiel d’impact dans la fréquence de prise de repas des jeunes. Il est montré dans le Tableau 6 que plus les frères et sœurs vivant ensemble sont nombreux, moins les enfants prenaient régulièrement de petit déjeuner.
Tableau 6: Proportion d’adolescents qui prennent un petit déjeuner chaque jour d’école en fonction de condition socio familiale(Nombre d’enfants vivant sous le même toit)
Fréquence de prise de petit déjeuner
1-2 enfants n(%)
3-4 enfants n(%)
5 enfants et plus
Total N(%)
pas du tout
172(75,8)
44(19,4)
11(4,8)
227(17,3)
1jour/5
219(68,0)
75(23,3)
28(8,7)
322(24,5)
2j/5
143(78,6)
35(19,2)
4(2,2)
182(13,9)
3j/5
108(76,6)
31(21,8)
3(2,1)
142(10,8)
4j/5
44(74,6)
15(25,4)
0(0,0)
59(4,5)
5j/5
269(70,6)
91(23,9)
21(5,5)
381(29,0)
Les jeunes qui vivaient ensemble avec plus de 5 frères et sœurs ne représentaient que 5,5% de ceux qui prenaient le petit déjeuner chaque jour de la semaine scolaire (p<0,005).
Style de vie en fonction du genre: Le Tableau 7 présente la distribution des jeunes selon les heures passées devant la télévision (TV), à faire des jeux vidéo et à surfer sur internet en fonction du genre. Au total, 34,4% des jeunes avaient rapporté ne pas regarder régulièrement la TV. Le pourcentage de ceux qui avaient déclaré passer plus de 4h par jour de semaine d’école devant la TV était plus élevé chez filles (54,7%) mais la différence n’était pas significative du point de vue statistique (p>0,05). La proportion de garçons (51,2%) à jouer aux jeux vidéo et à surfer sur internet (51,2%) plus de 4h de temps la semaine, était significativement plus élevée comparée à celle des filles. (p<0,05).
Pratique d’activités physiques:
Près de 13% des répondants n’ont jamais participé à des activités sportives dont 65,4% des filles.
Pourtant, parmi ceux qui avaient rapporté en pratiquer tous les jours, il y avait plus de filles que de garçons (56,8% contre 43,4%). Interrogés sur la pratique d’activités physiques, les sept derniers jours précédant l’enquête, 71,4% de filles contre seulement 28,6% des garçons ont rapporté ne pas en avoir pratiqué, représentant 21,8% de l’ensemble, et la différence était très significative (p<0,001).
Les résultats de l’analyse multivariée par régression logistique ont montré que la prise régulière de petit déjeuner était positivement corrélée à un âge plus jeune (11ans)[OR=3,422 ; 95%IC :2,128;5,503 à p=0,000] ; avec « être en classe primaire » [OR=0,207 ;95%IC :0,118;0,363 ;p=0,000] ou en classe intermédiaire[OR=0,086 95%IC :0,052;0,114 ;p=0,000] ; n’être jamais allé à l’école ou dormir sans manger[OR=0,438;95%IC :0,301;0,638;p=0,000] et à ceux à qui cela était arrivé rarement [OR=0,709 ;95%IC :0,526;0,954; p=0,023]. (Tableau 8)
Tableau 7 : Différence de style de vie entre garçons et filles
Variables
Fréquence
M n(%)
F n(%)
Total
p
Heures passées devant la TV en semaine
0,924
rarement/pas du tout
204(42,6)
275(57,4)
479(34,4)
Au moins 1heure
218(43,2)
287(56,8)
505(36,3)
2 à 3 heures
97(44,3)
122(55,7)
219(15,7)
4h et plus
86(45,3)
104(54,7)
190(13,6)
Heures passées jouant aux jeux vidéo
0,006
rarement/pas du tout
243(38,7)
385(61,3)
628(45,1)
Au moins 1heure
205(45,2)
249(54,8)
628(45,1)
2 à 3 heures
92(50,0)
92(50,0)
184(12,2)
4h et plus
65(51,2)
62(48,8)
127(9,1)
Heures passées sur internet (N=1381)
0,005
rarement/pas du tout
274(39,2)
425(60,8)
699(50,6)
Au moins 1heure
111(43,9)
142(56,8)
253(18,3)
2 à 3 heures
62(47,0)
70(53,0)
132(9,6)
4h et plus
152(51,2)
145(48,8)
145(10,5)
Participation à des activités physiques (N=1387)
0,001
tous les jours
203(43,4)
265(56,6)
468(33,7)
4 à 6 fois/semaine
101(51,0)
97(48,4)
198(14,3)
2 à3 fois/sem
97(51,6)
91(48,4)
188(13,3)
1fois/sem
88(35,8)
158(64,2)
246(17,7)
1fois/mois
32(52,5)
29(47,5)
61(4,4)
moins d’1fois/mois
19(40,4)
28(59,6)
47(3,4)
pas du tout
62(34,6)
117(65,4)
179(12,9)
Activités physiques les 7 derniers jours (N=1393)
0,000
pas du tout
87(28,6)
217(71,4)
304(21,8)
1 à 2j
331(57,1)
410(55,3)
741(53,2)
2 à 4j
113(57,1)
85(42,9)
198(14,2)
5j et plus
74(49,3)
76(50,7)
150(10,8)
Tableau 8: Facteurs associés à la prise régulière de petit déjeuner
Prise de petit déjeuner
p
OR
IC 95%
IC 95%
régulière
constante
0,228
inf
sup
[frères et soeurs vivant sous le même toit=2]
0,115
1,622
0,889
2,959
[frères et soeurs vivant sous le même toit=3 à 4]
0,099
1,721
0,903
3,279
[groupe d’âge=11ans]
0,000
3,422
2,128
5,503
[groupe d’âge=13ans]
0,273
1,299
0,814
2,073
[classe primaire]
0,000
0,207
0,118
0,363
[classe 6ème-5ème]
0,000
0,086
0,052
0,144
[résultats scolaires=0]
0,250
0,798
0,543
1,173
[résultats scolaires =1]
0,153
0,798
0,586
1,087
[faire un régime pour maigrir
0,432
0,892
0,671
1,186
[aller à l’école ou dormir sans manger =jamais]
0,000
0,438
0,301
0,638
[aller à l’école ou dormir sans manger =rarement]
0,023
0,709
0,526
0,954
Nagelkerke=0,23
DISCUSSION
Traduction et validation du contenu du questionnaire HBSC sur les habitudes alimentaires des jeunes : rares sont les publications sur la traduction et la validation du questionnaire HBSC en entier et ce, malgré qu’une quarantaine de pays y participent chaque quatre ans. Des domaines, des items ont été souvent pris à part pour validation et tel furent le cas du domaine des habitudes alimentaires et le choix de types d’aliments consommés, objets du questionnaire FFQ pour Food Frequency Questionnaire tiré du HBSC (13). Certains pays comme la Nouvelle Zélande a développé leur propre questionnaire sur la fréquence de consommation d’aliments chez les adolescents (le questionnaire New Zealand Adolescent Food Frequency ou NZAFFQ) [14]. Pour cette étude, le questionnaire était tiré de HBSC version 2013-2014.
Discussion sur les habitudes alimentaires et style de vie des jeunes interrogés: Il est reconnu qu’un petit déjeuner de qualité apporte une grande contribution nutritionnelle aux enfants et aux jeunes adultes. Pourtant, force est de reconnaître que le pourcentage de la fréquence de consommation de petit déjeuner ne cesse de diminuer dans le monde au profit des « fast food» [15]. Dans la présente étude la proportion d’élèves qui consomment de manière irrégulière le repas du matin est très élevée comparée à la littérature et les filles semblent être les plus concernées même si on n’a pas trouvé de différence significative du point de vue statistique. De plus, 17,0% des répondants avaient rapporté ne pas du tout prendre de repas le matin sans différence statistiquement significative entre les garçons et les filles. Ce résultat rejoint la conclusion de Shisana et al., dans l’enquête nationale sud-africaine sur la santé et la nutrition(South African National Health and Nutrition Examination Survey=SANHANES) publiée en 2013, relevant que 19,0% des jeunes âgés de 10 à 14ans en Afrique du sud , ne prenait pas de petit déjeuner et il n’y avait pas de différence significative selon le sexe et la localité. Par ailleurs, ils ont trouvé que sauter le petit déjeuner était légèrement plus fréquent chez les adolescents plus âgés de 14 à 19ans que chez les 10 à 14 ans [16], tout comme dans la présente étude où la proportion de ceux qui ne consommaient pas de petit déjeuner était plus élevée chez les 15-16ans et pas de différence trouvée en fonction du genre. Le petit déjeuner est le repas que l’on saute le plus fréquemment comparé aux autres repas et qui de plus, connaît actuellement de changements notables [17]. Les facteurs explicatifs des changements et des différences d’habitudes de consommation du repas du matin sont multiples et parmi lesquels le genre, l’âge, la race sont souvent cités dans la littérature. En effet, d’après l’étude de Affenito et al., la fréquence de prise de petit déjeuner diminue avec l’âge, les Afro-américaines en consomment moins régulièrement que les Blanches américaines mais la différence raciale diminue avec l’âge grandissant [18]. Tandis que l’étude de Musaiger et al., a montré que les filles étaient plus nombreuse à ne pas prendre régulièrement le petit déjeuner comparées aux garçons mais la différence n’était pas significative [19]. Des résultats similaires ont été trouvés dans la présente étude. Sauter le petit déjeuner chez les filles est souvent interprété comme une méthode choisie pour perdre du poids et il était associé à la non satisfaction de l’image de son corps, et aux désordres alimentaires [20]. Si, beaucoup de jeunes filles sautent le premier repas de la journée dans le but de perdre du poids, cela n’a pas été justifié de façon significative dans nos résultats. En somme, dans la présente étude, le pourcentage de jeunes prenant régulièrement le petit déjeuner (34,5%) était faible comparé au niveau mondial où l’étendue de fréquence de prise de petit déjeuner était de 51% à 95% d’après le rapport international sur le HBSC de 2013-2014 [21].
Consommation de fruits et légumes: Beaucoup de pays et d’organisations ont recommandé la consommation journalière de cinq fruits et légumes. L’OMS recommande un apport quotidien de 2 portions de fruits et de 3 portions de légumes de 400 g / jour (5 portions de 80 g chacune [22]. Les fruits et légumes constituent d’importante source de fibres et contiennent de très faible graisse saturée mais les adolescents ont tendance à ne pas suivre les recommandations. Dans notre étude, les filles consommaient plus de fruits que les garçons mais les garçons plus de légumes que les filles et des différences significatives entre style vie et genre étaient notées. Des résultats similaires étaient trouvés dans l’étude menée en Syrie qui avait indiqué qu’il y avait une variation significative entre les habitudes alimentaires et styles de vie entre garçons et filles. Les garçons consommaient plus de fruits et légumes que les filles [19]. Et globalement, la fréquence de consommation de sucreries était plus élevée que celle de la consommation de fruits et légumes. Les enfants les plus jeunes consommaient plus de fruits et légumes que les plus âgés [23] mais cela n’a pas été trouvée dans les résultats de notre étude. Dans notre étude une association a été trouvée entre prise régulière de petit déjeuner et performance scolaire. Ainsi de bien meilleurs résultats étaient majoritairement et significativement trouvés dans le groupe de jeunes qui on déclaré une prise régulière de petit déjeuner. L’effet du petit déjeuner sur la santé, la réduction de facteurs de risque de certaines maladies chroniques et sur la performance scolaire a été souligné dans la littérature [24,25].
Pratique d’activités physiques : Les garçons étaient plus nombreux à participer à des activités physiques que les filles. Des résultats similaires étaient rapportés par Doku et al.[23]. L’analyse par régression logistique était effectuée pour évaluer la relation entre une prise de petit déjeuner irrégulière et des paramètres pouvant contrôler les facteurs de confusion. L’analyse a retenu comme facteurs pouvant être liés à la fréquence irrégulière de consommation de petit déjeuner, l’âge plus avancé des jeunes et niveau scolaire plus élevé. D’après la valeur du Nagelkerke ces facteurs n’expliquaient que 23% de l’association laissant penser que d’autres déterminants sont à chercher et feront l’objet d’études futures de préférence longitudinales.
La principale limite de cette étude est que le questionnaire n’a pas demandé, la qualité ni la quantité ni le type d’aliment que les jeunes prennent durant le repas du matin avant d’aller à l’école et ainsi ne pourrons pas apporter de jugement sur l’apport nutritionnel de ce repas du matin à la santé de ces jeunes. Il est également à noter que dans notre étude nous n’avions pas interrogé les participants qui ne prennent pas de petit déjeuner à la maison avant de venir à l’école, s’ils achètent d’autres aliments pour le remplacer. En effet, si dans la plupart des pays industrialisés, on peut lister le menu classique d’un petit déjeuner classique : café/thé/lait/sucre/beurre ou fromage/toast ou pain/confiture, jus de fruit, le petit déjeuner d’un jeune Malgache n’est pas bien documenté et devrait-être exploré car il est important de connaître sa composition pour mieux guider le choix d’un menu équilibré très utile à cet âge. Le développement d’un questionnaire simplifié basé sur la consommation de petit déjeuner au cours de la dernière semaine pourrait nous donner un aperçu sur les types d’aliments que les jeunes Malgaches ont l’habitude de prendre lors du repas du matin.
CONCLUSION
Cette enquête sur l’alimentation (la toute première menée à Mahajanga) constitue un bon point de départ pour l’élaboration d’un système de surveillance nutritionnelle durable dans la région. Les systèmes de surveillance alimentaire sont nécessaires pour contrôler la consommation par la population d’aliments et de nutriments en relation avec leur état de santé et de maladies. Les données recueillies constituent les bases nécessaires de discussion pour réaliser les objectifs régionaux et nationaux relatifs à l’alimentation.
Remerciements : Nous adressons nos sincères remerciements à tous les jeunes qui avaient acceptés de participer à cette étude ainsi que les parents et les responsables scolaires sans qui l’enquête n’aurait pas été possible.
Conflit d’intérêt : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflit d’intérêt
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Article mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution – Pas d’utilisation commerciale – 4.0 International
Article original
1 Laboratoire d’Epidémiologie et Biostatistique en Santé de Populations (LabEBSP)
2 Ecole doctorale Nutrition-Environnement Santé (EDNES), Université de Mahajanga
3 IOSTM, Université de Mahajanga
Résumé : Le surpoids et la carie dentaire ont beaucoup augmenté devenant un problème de santé publique majeur dans le monde. La prévalence de ces maladies multifactorielles a augmenté affectant notamment les jeunes. Le but de cette étude transversale était de trouver s’il y a association entre surpoids et carie dentaire chez les jeunes scolarisés âgés de 8 à 16ans vivant dans la zone géographique nord-nord ouest de Madagascar, dans la ville de Mahajanga. Matériels et méthodes: un total de 200 élèves âgés de 8-16ans étaient recrutés à partir d’écoles tirées au hasard et selon l’urbanisation. Au total, 190 jeunes avaient participé à l’échantillon final. La carie dentaire était enregistrée utilisant les indices dcao/DCAO et l’IMC pour âge et sexe pour évaluer le surpoids. Les données étaient analysées utilisant les statistiques descriptives et comparatives. Une différence avec p<0,05 était considérée statistiquement significative. Résultats : une association significative était trouvée entre caries des dents temporaires (d-c) et le surpoids (p<0,05). Aucune association n’a été trouvée entre DCAO et IMC. Le genre, le groupe d’âge, l’urbanisation, la fréquence de consommation de sucreries étaient modérateurs. Conclusion : l’étude n’a pas trouvé d’association statistiquement significative entre surpoids et caries en dentition permanente. Le jeune âge, la consommation de sucreries et la situation géographique urbaine et périurbaine ont été associés à un risque plus élevé de carie chez les élèves en surpoids à dentition temporaire. Cette connaissance peut contribuer à un diagnostic en temps opportun et pour prendre des mesures de prévention appropriées et mieux ciblées. Mots clés: association, carie dentaire, surpoids, jeunes, facteurs associés
Abstract:
Overweight and dental caries are becoming a major public health in the world. The prevalence of these multifactorial diseases is growing fast affecting especially adolescents. The aim of this cross-sectional study was to find if there is association between overweight and dental caries among 8 to 16 years-old school children living in the north West part of Madagascar, in the town of Mahajanga. Materials and methods: A total of 190 school children were recruited from randomly selected schools from urban and per urban areas. Dental caries were recorded according to WHO criteria and BMI for gender and age for measuring overweight. Data were analysed using descriptive and comparative statistics.p<0.05 was considered significant. Results: A significant association was observed between dental caries (dt: decayed teeth) in primary dentition and overweight (p<0.05). No association was found between DMFT and BMI categories. Gender, age group, urbanisation were moderate covariates. Conclusion: There was an association between dental caries in temporary dentition and overweight. Young age, consumption of sweaty foods, urbanisation were predictor for caries in overweight children. This knowledge could contribute to diagnose earlier and decide for the appropriate measures for the prevention. Keywords: association, overweight, dental caries and associated factors
Comment citer cet article :
Ravelomanantsoa JJ, Randrianarivony J, Edwin HCC, Rajabo A, Razanamihaja N. Mesures anthropométriques et état de santé bucco-dentaire des jeunes Malgaches: étude transversale. Revue Sc Santé. 2020 ;1 :1-9
INTRODUCTION :
L’obésité et la carie dentaire sont des maladies multifactorielles, et toutes deux ont connu une croissance ces dernières décennies, aussi bien dans les pays industrialisés que dans les pays en développement. Au niveau mondial, la prévalence de surpoids et d’obésité chez les jeunes âgés de 5 à 19ans a dramatiquement augmenté passant de 4% en 1975 à plus de 13% en 2014 [1]. Quand à la carie dentaire, elle est considérée comme l’une des maladies bucco-dentaires les plus fréquentes de l’enfance. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a estimé qu’entre 60 et 90% des enfants dans le monde ont des lésions carieuses avec cavitation évidente [2]. Selon les résultats de la première enquête épidémiologique nationale menée à Madagascar en 1993, la prévalence de caries dentaires chez les 12ans à Madagascar était de 60,0% avec un nombre moyen de dents cariées de 3,0 [3]. Une association entre carie dentaire et mesures anthropométriques chez les enfants a été décrite dans plusieurs études et revues systématiques de littérature [4-7] avec des résultats quelque peu contradictoires. Plusieurs études ont décrit le lien entre la carie dentaire et les catégories d’Indice de Masse Corporelle (IMC), indiquant que les enfants obèses avaient plus de caries dentaires que les enfants à poids normal [8-12]. D’autres études n’ont pas trouvé d’association [7, 13, 14] et même que cette relation serait plutôt inversée, à savoir, se trouvant entre insuffisance pondérale et carie dentaire. Hooley et al., dans leur revue systématique ont rapporté des preuves avérées suggérant l’existence possible d’une relation entre carie dentaire et faible poids corporel [5]. L’association inversée serait liée au stress alimentaire, au manque de connaissance des parents sur la santé orale, aux infections dentaires. Selon les auteurs, dents cariées non traitées et infections dentaires étaient associées à l’insuffisance pondérale [15,16]. L’association inversée est fréquemment rencontrée entre carie des dents temporaires et insuffisance pondérale [17,18]. En effet, carie dentaire et surpoids/obésité sont liées par des facteurs de risque communs en relation avec l’alimentation [19]. Beaucoup d’études ont été conduites pour déterminer la relation entre obésité et carie dentaire et pour identifier les facteurs explicatifs. A notre connaissance aucune étude n’a été menée à Madagascar sur ce sujet à ce jour. La présente étude avait pour but de déterminer si le surpoids/obésité est associé à la carie dentaire chez les jeunes âgés de 8 à 16ans à Mahajanga, Madagascar.
METHODE ET MATERIELS
Type d’étude, lieu et échantillon: il s’agissait d’une étude transversale. L’étude a eu lieu dans l’ancienne province de Mahajanga, située dans la partie Nord d’ouest de Madagascar. Un échantillonnage à deux étapes était adopté. La taille d’échantillon était définie par convenance (n=200). Pour être inclus dans l’étude, les élèves devraient être âgés de 8 à 16ans. Lors de la première étape, toutes les écoles publiques de la ville de Mahajanga et environnant étaient listées et 5 étaient tirées au sort. En deuxième étape, les classes ayant des élèves âgés de 8 à 16ans de ces cinq écoles étaient listées et dans ces classes, tous les élèves répondant aux critères d’inclusion étaient invités à participer à l’étude si leurs parents respectifs avaient donné leur consentement. Tous les élèves de ces classes choisies, présents à l’école le jour de l’enquête et qui acceptaient d’être examinés, constituaient la taille finale de l’échantillon. En s’appuyant sur la valeur de l’Indice de Masse Corporelle calculé, les élèves étaient ensuite divisés en groupe à « surpoids/obèse » et « groupe à poids normal/sous poids ».
Collecte des données : Un questionnaire était utilisé pour recueillir les données sociodémographiques, habitudes d’hygiène orale et habitudes alimentaires. L’examen bucco-dentaire était effectué pour évaluer l’état de santé gingivale et dentaire selon les recommandations de l’OMS pour les enquêtes communautaires [20]. L’examen était réalisée à la lumière du jour, par des chirurgiens-dentistes calibrés (kappa statistique=0,85) en utilisant des sondes exploratrices et des miroirs buccaux. La lésion carieuse était diagnostiquée en présence de cavité prouvée par une sonde qui accroche à la surface de la dent. L’indice Dent Cariée Absente et Obturée (DCAO) (pour les dents définitives) et l’indice dent cariée, absente et obturée (dcao) pour les dents temporaires, étaient utilisés pour évaluer les expériences de carie. L’indice Community Periodontal Index (CPI/cpi) était utilisé pour évaluer l’état de santé parodontale utilisant trois scores : (score 0= parodonte sain ; score 1=saignement gingival et score 2=plaque/tartre)
Mesures anthropométriques : Le poids des enfants était évalué utilisant une balance bien calibrée. La taille était mesurée avec une toise en ayant les enfants debout, bien droit et pieds nus. L’IMC était ensuite calculé pour chacun avec la formule: poids (en kg) sur la taille au carré (en m) et en utilisant les courbes dites de corpulence. L’obésité infantile est définie comme un IMC pour l’âge et le sexe plus grand que le 95ème percentile [les sujets ont été classés comme en insuffisance pondérale (<5%), normale (<5% à <85%), surpoids (85 à <95%), et obèses (≥ 95%) [21]. La plupart des autorités sanitaires considèrent un IMC pour l’âge et le sexe, situé de la 85e au 95e percentile comme en surpoids et à risque d’obésité chez les enfants. Une réunion des parents d’élèves avait été organisée pour les informer sur les objectifs de l’étude et aussi pour demander leur consentement oral. Les élèves étaient assurés que l’anonymat était gardé et qu’à tout moment ils avaient le droit de quitter l’enquête et que leur décision n’aura point d’impact sur leur accès aux soins. L’étude a obtenu l’accord du comité d’éthique local et de tous les responsables scolaires et de santé pour sa réalisation.
Analyses statistiques : Des analyses descriptives étaient utilisées pour décrire les variables et reportées sous forme de moyennes (écart type) ou de pourcentage. Les tests de chi2 ou de Student et ANOVA étaient appliqués pour les comparaisons de proportions ou de moyennes respectivement. L’analyse par régression logistique multinomiale était utilisée pour identifier les facteurs associés. Toutes les valeurs de p (p-value) <0,05 à 95% d’Intervalle de confiance étaient considérée comme statistiquement significatives. Le traitement des données et l’analyse statistique étaient effectués en utilisant le logiciel Statistical Package for Social Sciences (SPSS) version 24.
RESULTATS :
Sur les 200 élèves ciblés, 190 constituaient l’échantillon final car 6 étaient absents le jour de l’enquête et 4 avaient refusé l’examen clinique par peur du dentiste. L’échantillon final était constitué de 94(49,5%) garçons et 96 filles (50,5%). La moyenne d’âge était de 12,54 ans. Cinquante neuf pour cent des élèves avaient un poids normal (n=113), 77 élèves étaient en surpoids (40,5%) et aucun n’était obèse. Les caractéristiques socio-démographiques de l’échantillon sont présentées dans le Tableau 1. La proportion de jeunes en surpoids était plus élevée chez les garçons (47,9%) que chez les filles (33,3%) et la différence était significative (p<0,05) et en milieu périurbain (55,0%) qu’en milieu urbain (33,8%) (p<0,010). Selon le groupe d’âge, 72,5% des 8-10ans étaient en surpoids ; 43,4% des 11-13ans et 20,3% des 14-16ans (p<0,001). La proportion de ceux qui ont rapporté pratiquer régulièrement d’activités physiques était significativement plus élevée chez le groupe « à poids normal=PN» (80,6%) que dans le groupe en surpoids (19,4%) (p<0,001). Le pourcentage de ceux qui avaient rapporté avoir l’habitude de consommer des sucreries 4fois par semaine était significativement plus élevé chez les enfants en surpoids (54,5%) (p<0,010). Aucune différence significative du point de vue statistique n’était trouvée quant aux habitudes d’hygiène orale entre les deux groupes (p>0,05). Le Tableau 2 présente les paramètres démographiques et anthropométriques chez le groupe à poids normal (PN) et le groupe en surpoids. Les résultats de l’analyse des données cliniques avaient montré qu’en dentition permanente, la prévalence de caries était de 46,8%. L’indice DCAO moyen était de 1,72(2,34), dominé par le composant DC (dents cariées) qui était de 1,54(1,18). Le DCAO augmentait avec l’âge : 0,60, 1,75 et 2,28 pour les 8-10ans, 11-13 ans et 14-16ans, respectivement. Les scores de DCAO et ses composants étaient légèrement plus élevés chez les filles que chez les garçons sans différence statistiquement significative. Aucune différence significative n’était trouvée entre les catégories d’IMC et les expériences de carie dentaire mesurées par l’indice DCAO et ses composants (p>0,05). Une différence significative était trouvée entre les deux groupes en ce qui concernait l’indice dc (en dentition temporaire)et la différence était significative à p<0,05. En dentition temporaire, le score moyen de dco était de 0,38(1,02) et la prévalence était de 65,4%. Il n’y avait pas de différence significative d’expérience de carie selon le genre (p>0,05), mais une différence très significative selon le groupe d’âge (p<0,001), et le score moyen le plus élevé était trouvé dans le groupe en surpoids. (Tableau 3).
Santé parodontale et IMC : En moyenne 25,8% des jeunes examinés avait un parodonte sain sans différence statistiquement significative (p>0,05) entre les deux groupes. Presque la totalité (90,5%) des jeunes présentait un saignement gingival avec une proportion plus élevée chez ceux à poids normal (94,7%) que chez ceux en surpoids (84,4%) à p<0,05. Près des deux tiers présentaient de la plaque dentaire sans différence significative en fonction des catégories d’IMC (p>0,05) (Tableau 4).
Facteurs d’association : Les résultats avaient trouvé une corrélation positive significative entre surpoids et genre (p<0,05), urbanisation (p<0,010), groupe d’âge (p<0,001). Une corrélation positive significative était trouvée entre surpoids et caries de la dentition temporaire (p<0,05).
Tableau 1: Caractéristiques sociodémographiques de la population d’étude
Groupes d’IMC
Variables
Poids normal n(%)
En surpoids n(%)
Total N(%)
p
Genre
0,041
M
49(52,1)
45(47,9)
94(49,50)
F
64(66,7)
32(33,3)
96(50,50)
Urbanisation
0,006
Urbain
86(66,2)
44(33,8)
130(55,38)
Périurbain
27(45,0)
33(55,0)
83(44,62)
Groupe d’âge
0,000
8-10ans
11(27,5)
29(72,5)
40(21,05)
11-13ans
43(56,6)
33(43,4)
76(40,00)
14-16ans
59(79,7)
15(20,3)
74(38,95)
Pratique régulière d’exercice physique
0,000
Oui
83(80,6)
20(19,4)
103(55,38)
Non
28(33,7)
55(66,3)
83(44,62)
Fréquence de consommation de sucreries
0,007
Rarement/jamais
27(81,8)
6(18,2)
33(17,65)
1fois/semaine
32(64,0)
18(36,0)
50(26,74)
2-3fois/semaine
27(55,1)
22(44,9)
49(26,20)
4fois/semaine
25(45,5)
30(54,5)
55(29,41)
Fréquence de brossage
0,122
Occasionnellement
16(51,6)
15(48,4)
31(16,32)
1fois/jour
55(67,9)
26(32,1)
81(42,67)
2fois et plus/jour
42(52,8)
36(46,2)
78(41,05)
Tableau 2: Paramètres démographiques et anthropométriques chez le groupe à poids normal (PN et le groupe en surpoids
Variables
Groupe PN Moyenne (ET)*
min
max
Groupe en surpoids Moyenne (ET)*
min
max
p
Age
13,29(2,18)
8
16
11,43(2,28)
8
16
<0,001
Poids
38,81(9,07)
22
62
46,93(10,1)
26
70
<0,001
Taille
142,81(10,87)
110
165
130,62(11,24)
100
155
<0,001
IMC
18,78(2,07)
12,8
25,3
27,16(3,84)
19,2
35,4
<0,001
Tour hanche
72,04(10,35)
53
96
81,47(9,47)
62
96
<0,001
Tour bras
20,09(3,02)
16
28
23,60(4,04)
17
33
<0,001
Le DCAO et ses composants n’étaient pas significativement liés au surpoids. Même si le groupe à poids normal avait un score moyen de caries dentaires de 1,86(2,56), plus élevé que le groupe en surpoids 1,51(1,98), la différence n’était pas statistiquement significative (p<0,05) (Tableau 5). Après contrôle des covariables, il n’y avait pas d’association significative entre la prévalence de l’IMC pour l’âge et la carie dentaire dans les deux types de dentition. L’analyse par régression logistique a montré que le surpoids était fonction de genre (p<0,010); OR=0,348 pour IC 95% de 0,167 à 0,724), d’urbanisation (p<0,001 ; OR=3,727 pour IC 95% de 1,714 à 8,104), d’âge (p<0,001) ; (OR=0,249) pour IC 95% de (0,137 à 0,451) et de fréquence de consommation de sucreries (p=0,035) ; OR=1,450 pour IC 95% de 1,026 à 2,048 dans la présente étude. Les résultats de l’analyse de R deux de Nagelkerke montraient que ces facteurs n’expliquaient que 35,0% de la variance totale. (Tableau 6).
Tableau 3: Moyenne d’indice d-c, D-C, D-A, D-O et D-CAO en fonction de groupe d’âge chez le groupe à poids normal comparé au groupe en surpoids et selon le genre
Variables
Age
d-c m(ET)*
D-C m(ET)
D-A m(ET)
D-O m(ET)
D-CAO m(ET)
Groupe Poids normal
8-10
2,27(2,15)
0,27(0,47)
0,00(0,00)
0,27(0,90)
0,55(0,93)
11-13
0,21(0,60)
1,58(2,19)
0,07(0,26)
0,14(0,64)
1,79(2,39)
14-16
0,00(0,00)
2,00(2,70)
0,10(0,44)
0,05(0,30)
2,15(2,81)
Total
0,30(0,99)
1,67(2,42)
0,08(0,36)
0,11(0,52)
1,86(2,56)
Groupe en surpoids
8-10
1,66(2,04)
0,62(1,26)
0,00(0,00)
0,00(0,00)
0,62(1,26)
11-13
0,21(0,60)
1,45(1,72)
0,06(0,35)
0,18(0,63)
1,70(2,02)
14-16
0,00(0,00)
2,53(2,07)
0,07(0,26)
0,20(0,77)
2,8(2,30)
Total
0,71(1,49)
1,35(1,76)
0,04(0,25)
0,12(0,53)
1,51(1,98)
p
0,023
0,318
0,390)
0,891
0,310
Genre
M
0,26(0,73)
1,30(1,81)
0,05(0,31)
0,06(0,38)
1,41(1,96)
F
0,51(1,22)
1,78(2,47)
0,07(0,33)
0,16(0,64)
2,01(2,64)
pp
0,083
0,126
0,671
0,229
0,080
m(ET)*=moyenne(écart type)
Tableau 4: Etat de santé parodontale et association aux différentes catégories d’IMC
Variables
Poids normal
en surpoids
Total
p
CPI
parodonte sain
oui
84(74,3)
57(74,0)
141(74,2)
<0,05
saignement gingival
oui
107(94,7)
65(84,4)
172(90,5)
<0,05
présence de plaque/tartre
oui
85(75,2)
50(64,9)
135(71,1)
<0,05
Tableau 5: Corrélation entre obésité, genre, urbanisation, groupe d’âge, hygiène orale, caries dentition temporaire, permanente et mixte, D-CAO,saignement gingival, habitude de consommation de sucreries
Variables
surpoids/PN
genre
urbanisation
âge
brossage dentaire
d-c
D-C
d-c/D-C
saignement gingival
sucreries
surpoids/ poids normal
1
Genre
-,148*
,200
-330**
,029
,174*
-,0,73
,008
-,0,34
,096
,041
,006
,000
,689
,017
,318
,913
,693
,193
Urbanisation
,129
,013
,033
,126
,111
,165*
,009
-,018
,077
,857
,650
,083
,126
,023
,898
,803
groupe d’âge
,015
-,140
,044
,201*
,214**
,039
, 099
,841
,054
,546
,005
,003
,595
,179
fréquence de brossage dentaire
-,050
-,303**
,208*
,065
-104
,126
,495
,000
,004
,374
,151
,086
d-c
,000
-,059
-,058
,109
,108
,995
,417
,430
,133
,811
D-C
-,164*
,293**
,114
-,129
,024
,000
,117
,079
d-c/D-C
,895**
-,154
,205**
,000
,033
,005
saignement gingival
-,098
,138
,178
,059
sucreries
-,138
,059
1
p<0,05; **p<0,01
DISCUSSION
Cette étude avait pour but de déterminer si le surpoids est associé à la carie dentaire chez les jeunes âgés de 8 à 16ans à Mahajanga. Le surpoids et l’obésité de l’enfance sont des problèmes mondiaux qui sont à la hausse en raison de la modernisation et du changement de mode de vie, et d’habitudes alimentaires [22]. Les caries des dents temporaires et surpoids coïncident dans de nombreuses populations probablement en raison des facteurs de risque de confusion communs tels que la fréquence de consommation d’aliments cariogènes et une mauvaise hygiène bucco-dentaire [23]. La littérature rapporte des conclusions conflictuelles sur l’association entre surpoids et carie dentaire. Les résultats de notre étude indiquaient que l’indice DCAO et ses composants n’avaient pas montré de différence significative quand on comparait les groupes à poids normal et en surpoids. Tandis qu’en dentition temporaire, le dco et le dc avaient montré des différences significatives quand on a comparé les deux groupes. L ‘indice de carie dc était plus élevé chez le groupe en surpoids. Ces résultats rejoignent ceux de Parkar et al., qui avaient trouvé que lorsque l’IMC (Poids normal et insuffisance pondérale) et le score moyen de dco était comparé il y avait une différence significative(p<0,001). Toutefois, quand l’IMC et le score moyen de DCAO étaient comparés, le résultat n’avait pas atteint un niveau significatif (p>0,05) [18]. Elangovan et al., ont également trouvé que le score moyen de caries des dents temporaires était plus élevé chez le groupe en surpoids comparé à celui du groupe à poids normal [24]. Sanchez-Perez et al, après avoir examiné des enfants mexicains âgés de 11ans, n’avaient trouvé aucune association significative entre carie dentaire dans la dentition permanente et l’IMC [25]. Tandis que, dans une revue de littérature, Hooley et al., avaient rapporté que la relation inversée entre la carie dentaire et l’IMC était fréquemment rencontrée dans les résultats d’études menées dans les pays en développement et / ou à partir d’échantillons présentant des caries dentaires graves. D’après Hooley et al., la carie est associée aussi bien à des enfants à poids plus léger qu’à ceux en surpoids voire obèses [5]. Une prévalence modérée de carie était enregistrée dans notre groupe d’étude. Dans cette ville de C’est peut-être cet état de santé dentaire qui expliquerait le fait que la relation entre surpoids et carie dentaire était trouvée au lieu d’une association inversée. Ce fait justifierait l’impact des inconforts, voire de la douleur, qui empêcheraient les enfants souffrant de caries multiples et compliquées, non traitées, à se nourrir comme il faut et par conséquent à souffrir d’insuffisance pondérale d’où la relation trouvée entre caries dentaire et insuffisance pondérale rapportée dans la littérature [15].
En ce qui concerne la santé parodontale, dans la présente étude, le groupe en surpoids présentait moins de saignement gingival que le groupe à poids normal. Pourtant, Al-Zahrani et al., en 2003, avaient évalué la corrélation entre l’obésité et la maladie parodontale chez les jeunes, les adultes et les personnes âgées et ils avaient constaté que le surpoids et l’obésité augmentent l’incidence de la maladie parodontale chez les jeunes, alors que l’insuffisance pondérale (IMC <18,5) diminue sa prévalence [26]. Dans notre étude, une corrélation significative négative étaient trouvée entre surpoids et groupe d’âge (p<0,001) (les plus jeunes (8-10ans) étaient les plus touchées) et une corrélation positive avec les caries de la dentition temporaire (p=0,017), mais pas de corrélation positive avec les habitudes de manger des sucreries (p=0,193).
Pratique d’activités physiques : La pratique d’exercices physiques des jeunes de notre étude était limitée au sport à l’école et c’était le groupe en surpoids qui en pratiquait le moins. La diminution de l’activité physique, l’augmentation des modes de vie sédentaires et les changements d’habitudes alimentaires sont des facteurs fortement associés au développement du surpoids et de l’obésité [27].
Mesures anthropologiques : Diagnostiquer l’obésité par des mesures anthropologiques a été depuis longtemps le seul outil disponible pour établir les courbes de croissance des enfants et adolescents à l’exemple d’IMC (P/T2) de Quetelet développé en 1869. Normalement, la courbe de l’enfant augmente jusqu’à l’âge de 1an ensuite suivie d’une régression modérée pour connaître ce que l’on appelle le « rebond d’adiposité » à l’âge de 6ans. Toutefois, l’utilisation de l’IMC chez les enfants est critiquée par certains auteurs. Le densitomètre à rayons X ou DXA (Dual X-ray Absorptiomètre), par exemple, est considérée comme une méthode plus précise et appropriée pour mesurer l’obésité mais son coût d’examen élevé rend souvent impossible son utilisation dans les études de population. Costacurta et al. avaient rapporté que ce sont les critères d’utilisation de l’indice IMC qui induisent en erreur et expliquent les différences de conclusion. La limitation de l’indice IMC serait qu’il ne fait pas la différence entre la masse corporelle maigre et la masse grasse [28].
Facteurs associés : Dans la présente étude, les facteurs tels que genre, urbanisation, fréquence de consommation de sucreries, étaient modérateurs à la relation surpoids-poids normal. Le rôle de l’alimentation dans cette association a été décrié par plusieurs auteurs dont Palmer et al. [29]. Dans la présente étude, les résultats de l’analyse multivariée avaient montré que les facteurs sus cités n’expliquaient qu’un peu plus du tiers de l’association. Cela montre la complexité de la relation entre obésité et caries dentaires. Cette complexité (résultats contradictoires, inconsistants) était démontrée également par la synthèse d’études longitudinales dans une revue systématique de littérature menée par Ling-Wei Li et al. [30].
Limites de l’étude : Une des limites de la présente étude était sa conception transversale, qui exclut les déclarations de cause à effet. Dans la présente étude, les 4 élèves, en insuffisance pondérale, étaient inclus dans le groupe à poids normal et cela pourrait conduire à une augmentation des scores de caries dentaires dans le groupe à poids normal. De plus, l’examen dentaire à la lumière du jour pour détecter la carie pourrait induire à une sous évaluation des lésions carieuses, notamment les caries proximales. Les résultats ne peuvent pas être généralisés à toute la population adolescentes car les obèses n’étaient pas représentés ni ceux en sous poids. Une étude future devrait cibler ces deux sous groupes en particulier.
Points forts de l’étude : Cette étude est la première à Madagascar concernant la corrélation entre les catégories d’IMC et les caries dentaires et pourrait servir de base pour l’avenir des recherches dans ce domaine.
Conclusion :
Il y avait une association statistiquement significative entre surpoids et caries en dentition temporaire. Le jeune âge, la consommation de sucreries et la situation géographique urbaine et périurbaine ont été associés à un risque plus élevé de carie chez les jeunes à dentition temporaire en surpoids. Cette connaissance peut contribuer à un diagnostic en temps opportun et pour prendre des mesures de prévention appropriées et mieux ciblées.
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